Juste une image…

FILMS_ETE_2024
La plage ou la montagne ? Un pays étranger ou la verte campagne d’ici ? Les vacances sont synonymes de découvertes et de détente… Mais, c’est aussi le cas du… cinéma. Et l’écran estival promet, en juillet-août, quelques beaux moments. Une sélection.
3 JUILLET : PENDANT CE TEMPS SUR TERRE
Pendant ce temps sur Terre offre un premier rôle à l’épatante Megan Northam en tête d’affiche du nouveau film de Jérémy Clapin. Elle incarne Elsa, une femme de 23 ans qui a toujours été très proche de son frère aîné Franck, un spationaute disparu mystérieusement trois ans plus tôt au cours d’une mission. Un jour, elle est contactée depuis l’espace par une forme de vie inconnue qui prétend pouvoir ramener son frère sur terre. Mais le « miracle » a un prix…
3 JUILLET : LES FANTOMES
Jonathan Millet fait le pari de saisir la violence de la guerre en suivant la trajectoire d’Hamid (Adam Bessa) d’un désert syrien à Strasbourg, où il vit désormais. Membre d’une organisation secrète qui traque les criminels de guerre syriens cachés en Europe, il cherche son bourreau lorsqu’il était détenu dans une prison militaire. Entre deux appels vidéos avec sa mère et les membres de la cellule Yaqaza, Hamid poursuit sa cible tandis que ses symptômes de stress post-traumatique resurgissent.
10 JUILLET : TO THE MOON
Cole Davis (Channing Tatum) dirige l’Apollo 11, une mission d’envergure historique. Mais la mission n’a plus vraiment l’adhésion des Américains. La Maison Blanche n’ayant pas le droit à l’erreur, l’as de la communication Kelly Jones (Scarlett Johansson) est chargée du Projet Artémis, l’enregistrement d’une fausse vidéo d’alunissage diffusée au public au cas où la vraie tentative viendrait à échouer. Au coeur de la NASA, la comédie romantique de l’été !
10 JUILLET : MOI, MOCHE ET MECHANT 4
Et si Dru, le frère jumeau chevelu de Gru, était le grand méchant de l’opus 4 de la franchise d’animation la plus lucrative au box-office international (avec 4,6 milliards de $ en cinq films)? Mis en scène par Chris Renaud et Patrick Delage, voici le retour d’une aventure pour le jeune public amateur de blagues et de mots farfelus.
17 JUILLET : EAT THE NIGHT
C’est un amour aussi intense qu’éphémère qui unit Pablo (Théo Cholbi) et Night (Erwan Kepoa Falé). Ensemble, ils créent leurs propres territoires, comme celui de Darknoon, le jeu de vidéo développé spécialement pour le long-métrage, inspiré des œuvres de dark fantasy. L’occasion pour le duo Caroline Poggi/Jonathan Vinel de confondre réel et virtuel et de voguer librement entre les genres…
17 JUILLET : TWISTERS
Très marquée par un accident lors d’une violente tornade, Kate Carter (Daisy Edgar-Jones) ancienne chasseuse de tornades, préfère les étudier à New York, sans prendre de risques. Elle va cependant reprendre du service quand son ami Javi lui propose un nouvel appareil pour les détecter. Produit par les producteurs de Jurassic World, un film-catastrophe (réalisé par Lee Isaac Chung) sous tension au coeur de la saison des tempêtes américaines.
24 JUILLET : DEADPOOL 3
Deadpool est retrouvé dans son univers par le Tribunal des Variations Anachroniques, une organisation de surveillance des différentes réalités du multivers et chargée de régler les interférences temporelles. Deadpool (Ryan Reynolds) pourrait devenir un véritable héros en croisant la route de l’indomptable mutant Wolverine (Hugh Jackman)… Le seul film Marvel à sortir en 2024.
14 AOUT : LE ROMAN DE JIM
Aymeric et Florence, deux anciens collègues de travail, se retrouvent au hasard lors d’une soirée à Saint-Claude dans le Haut-Jura. Elle est enceinte et célibataire. Quand Jim naît, Aymeric est là. Ils passent de belles années ensemble, jusqu’au jour où Christophe, le père biologique de Jim, débarque… Les frères Jean-Marie et Arnaud Larrieu (Peindre ou faire l’amour, 21 nuits avec Pattie) distillent une belle chronique familiale portée par Lætitia Dosch, Karim Leklou, Sara Giraudeau, Bertrand Belin, Noée Abita.
14 AOUT : ALIEN ROMULUS
Quelques années après les évènements sur le vaisseau Nostromo, un groupe de jeunes colons de l’espace, emmené par Rain Carradine (Cailee Speany, vue dans Priscilla et Civil War) se retrouve face-à-face avec le Xénomorphe alors qu’ils fouillent les profondeurs d’une station spatiale abandonnée. Le retour de l’un des monstres les plus terrifiants du 7e art dans la neuvième aventure de la franchise. Une nouvelle fois, personne ne vous entendra crier au cinéma !
21 AOUT : GIRLS WILL BE GIRLS
Mira, adolescente de 16 ans, vit dans un pensionnat d’élite niché dans l’Himalaya, au nord de l’Inde. Alors que les examens approchent, la mère de Mira revient s’installer dans la région pour la soutenir et veiller sur elle. Mais la rencontre de l’élève avec Sri, un nouveau camarade, va semer le trouble dans la relation entre les deux femmes, chacune se retrouvant confrontée à ses propres désirs. Une comédie dramatique indienne de Shuchi Talati qui a été couronnée au Festival de Sundance.
28 AOUT : EMILIA PEREZ
Une femme avocate, Rita Moro Castro (Zoé Saldana), est chargée d’aider Manitas (Karla Sofia Gascon), un chef de cartel mexicain en fuite, à subir une chirurgie de réattribution sexuelle pour à la fois échapper aux autorités et affirmer son genre. A Cannes, Jacques Audiard (Palme d’or 2015 pour Dheepan) a surpris son monde avec cette étonnante comédie musicale ! Le film a obtenu le prix du jury et les trois actrices (dont Selena Gomez) ont décroché ensemble le prix d’interprétation féminine.

© Photos DR -Dans le sens des aiguilles d’une monte : Emilia Perez, To the Moon, Le roman de Jim, Twisters, Les fantômes, Pendant ce temps.

La critique de film

Une traque, une femme-flic en danger et la NASA, version comédie  

"Les fantômes": Hamid (Adam Bessa).

« Les fantômes »: Hamid (Adam Bessa).

CRIMINELS.- Un camion bâché brinquebale dans le désert. Arrêté au milieu de nulle part, des soldats en font descendre des hommes usés, affaiblis, hagards, apeurés. Sous la menace de leurs armes, ils les chassent vers les sables… On retrouve l’un d’eux, Hamid, sur un chantier de construction de Strasbourg où, avec d’autres exilés, il manie la pelle et la pioche. Pour Hamid, ce travail est une couverture. Il en effet membre d’une organisation secrète qui traque les criminels de guerre syriens cachés en Europe. Dans la capitale européenne, Hamid est sur la piste de son ancien bourreau, un homme qui l’a torturé dans la prison de Saidnaya, à une trentaine de kilomètres au nord de Damas.
Premier long-métrage de fiction de Jonathan Millet (qui a, par ailleurs, une belle carrière de documentariste au long cours), Les fantômes (France – 1h45. Dans les salles le 3 juillet) est construit comme un véritable film d’espionnage. Le cinéaste entraîne le spectateur dans une traque palpitante durant laquelle Hamid ne lâche quasiment jamais sa cible. D’abord pour réunir les éléments qui lui donneront la certitude que Harfaz, l’universitaire spécialiste en chimie, est bien le tortionnaire recherché. Ensuite, pour permettre son arrestation et son passage devant la justice. Tout cela en étant en contact permanent avec les membres de son organisation basée en Allemagne avec laquelle il communique dans un langage codé tout en jouant à des jeux vidéo de guerre…
« Je voulais, dit le cinéaste, filmer l’écoute, le tactile, l’odeur en reléguant hors-champ toutes les images sursignifiantes comme la guerre ou la torture, qui n’est appréhendée que par des enregistrements. » Du coup, la mise en scène immerge le spectateur dans l’intériorité d’Hamid, personnage torturé au propre et au figuré. Car on découvre qu’outre son passage dans l’ « abattoir humain » de Saidnaya, Hamid a perdu sa femme et sa fillette dans le conflit. Pour Millet, les sensations prédominent, ici, telle la perception amplifiée ou déformée des sons, l’odeur de la sueur, la puissance du toucher (comme dans la séquence où Yara, une compatriote, lui pose un pansement) ou le kaléidoscope des couleurs sur les étals du marché de Beyrouth où Hamid (l’acteur franco-tunisien Adam Bessa au jeu d’une impressionnante intensité) se rend pour apporter des médicaments et apercevoir sa vieille mère, réfugiée dans le camp de la Bekaa.

"Les fantômes": Hamid et Harfaz (Tawfeek Barhom). Photos Kris Dewitte

« Les fantômes »: Hamid
et Harfaz (Tawfeek Barhom).
Photos Kris Dewitte

Retenu pour faire l’ouverture de la Semaine de la Critique au dernier Festival de Cannes, le cinéaste réussit brillamment à raconter la Grande Histoire à travers l’intime d’un personnage dont le tourbillon des pensées, les doutes constituent le théâtre des opérations du récit.
C’est en menant un gros travail de documentation que Jonathan Millet entend parler de réseaux souterrains, de chasseurs de preuves, de groupes qui traquent en Europe pendant des mois les criminels de guerre. Cette découverte est concomitante avec la parution en avril 2019 dans Libération de deux articles sur un mystérieux groupe d’activistes réfugiés, la cellule Yaqaza (un nom qui signifie réveil). Ces anciens membres de l’opposition syrienne, exilés eux aussi en Europe, se sont donné pour mission de débusquer d’anciens membres du groupe terroriste qui tenteraient de se faire oublier.
« Ce qui m’a le plus frappé dans leur quête, dit Millet, c’est son urgence, son absolue contemporanéité. Les bourreaux décrits existent, dans cette vie, aujourd’hui, en France et en Allemagne. Les enjeux de migration dont ils débattent sont ceux qui se jouent actuellement. Leur histoire n’est pas un miroir de notre monde, c’est notre monde. »

"Les gens...": Lucie (Isabelle Huppert).

« Les gens… »: Lucie (Isabelle Huppert).

CONFLIT.- Dans les rues d’une ville, à l’appel de noms, différentes personnes masquées viennent s’allonger sur le sol. Ces noms scandés, ce sont ceux de policiers morts dans l’exercice de leurs fonctions. Et leurs collègues, qui entonnent la Marseillaise, en ont plus que marre d’être pris pour cible et d’être montrer du doigt par la vindicte « populaire ». Parmi les manifestants, on remarque Lucie Muller, un officier de police attaché au service de police technique et scientifique.
Si elle donne le change dans son boulot (alors même que son chef la pousse à quitter la police), Lucie Muller est cependant une femme meurtrie depuis que Slimane, son compagnon, également policier, s’est suicidé un an auparavant parce qu’il n’en pouvait plus de ses mauvaises conditions de travail. Le quotidien solitaire de Lucie est troublé par l’arrivée dans sa zone pavillonnaire de Julia et Yann, un jeune couple, parents d’une petite Rose. Alors qu’elle se prend d’affection pour ses nouveaux voisins et noue des liens avec la mère, professeur de lycée et la fillette, Lucie découvre que Yann Durieux, le père, artiste peintre, est aussi un activiste anti-police au lourd casier judiciaire et assigné à résidence départementale.

"Les gens...": Nahuel Perez Biscayart et Hafsia Herzi. Photos Roger Arpajou

« Les gens… »: Nahuel Perez Biscayart
et Hafsia Herzi.
Photos Roger Arpajou

Avec Les gens d’à-coté (France – 1h25. Dans les salles le 10 juillet), André Téchiné, 81 ans, vétéran du cinéma français, signe son 25e long-métrage et propose la chronique d’un conflit moral. Car Lucie va se retrouver prise entre sa conscience professionnelle et son amitié naissante pour une sympathique famille.
Comme souvent dans ses films, le cinéaste s’attache d’abord à ses personnages qu’il saisit, ici, dans le cadre quotidien d’une cité périphérique et banale. Autour d’une intrigue minimaliste (mais qui fera pourtant vaciller en profondeur les certitudes de Lucie), Téchiné interroge, au plus près des émotions, l’articulation entre le métier et les affects. Au moment où Lucie révèle à Yann la profession qu’elle exerce, elle dit : « C’est vrai qu’on vit pas dans le même monde mais on pourrait peut-être essayer d’y parvenir. ».
Bien longtemps après Les sœurs Brontë (1979), Isabelle Huppert renoue avec le cinéma de Téchiné. Elle s’empare, avec son habituelle maîtrise, d’un personnage fragile car sa Lucie est du côté de l’ordre tout en ayant ses zones d’ombre. La rencontre avec ses voisins va l’amener à se demander quel sens donner à la place que l’on occupe. Au côté d’Isabelle Huppert, Hafsia Herzi (Julia) et Nahuel Perez Biscayart (Yann) sont, tous les deux, d’une parfaite justesse.

"To the Moon": Kelly (Scarlett Johansson) et Cole (Channing Tatum). DR

« To the Moon »: Kelly (Scarlett Johansson)
et Cole (Channing Tatum). DR

ESPACE.- Dans l’Amérique des années cinquante-soixante, la question spatiale se pose toujours sous l’angle de la Guerre froide. Surtout depuis que les Russes ont mis en orbite, en octobre 1957, leur Spoutnik 1, ouvrant ainsi le début de l’ère spatiale. Une ère que les USA vont vivre comme une tragédie lorsque l’explosion d’Apollo 1, lors d’une répétition au sol, en janvier 1967, entraîne la mort des astronautes Virgil Grissom, Edward White et Roger Chaffee. Du côté de la NASA, on sait désormais qu’on a plus le choix. En 1961, JFK avait fixé l’objectif : poser un équipage US sur la Lune avant la fin de la décennie et démontrer la supériorité des États-Unis sur l’Union soviétique. Pour ce faire, le gouvernement Nixon veut redorer l’image de l’Agence spatiale auprès du public. Un conseiller du président recrute l’étincelante Kelly Jones, experte en marketing et la colle dans les pattes de Cole Davis, le directeur de la mission. Davis exècre les méthodes de pub de Kelly mais il va s’étouffer lorsque la Maison-Blanche estime que le projet est trop important pour échouer et confie à Miss Jones un certain Projet Artemis, en l’occurrence la réalisation, dans un studio secret au coeur de Cap Canaveral, d’un faux alunissage du LEM sur la Lune. Tout cela en guise de plan B au cas où Neil Armstrong ne pourrait poser vraiment le pied sur la Lune…
Mêlant à la fois des éléments très réalistes sur la vie à la NASA à l’heure d’Apollo 11 et de la pure comédie romantique, To the Moon (USA – 2h11. Dans les salles le 10 juillet) atteint clairement son objectif même si le film aurait gagné à être plus ramassé.
On suit donc les efforts de l’expert en pub pour vendre le projet spatial américain à un marchand de montres de luxe, à une marque de tee-shirts ou à une firme de cornflakes. C’est assez savoureux d’autant que Cole Davis doit, lui, se bagarrer avec des moyens limités, tenter de convaincre des sénateurs de soutenir la mission ou répondre aux médias actionnés par Miss Jones.

"To the Moon": un alunissage mis en scène? DR

« To the Moon »: un alunissage mis en scène? DR

Bien entendu, ces deux-là, après s’être détestés, vont apprendre à se connaître et même à faire leur chemin ensemble. Connu pour avoir réalisé des comédies comme Le club des coeurs brisés (2000), Bébé mode d’emploi (2010) ou Love, Simon (2018), l’Américain Greg Berlanti se tire bien de ce projet, évidemment, formaté en jouant la carte des dialogues aiguisés, de la musique (de To Love Somebody des Bee Gees à Nothing Can Change this Love de Sam Cooke en passant bien sûr par le standard Fly me to the Moon) et, in fine, du casting.
Scarlett Johansson, parfaite en menteuse, doublée aussi d’une femme forte et Channing Tatum avec les plus beaux maxillaires d’Hollywood, la jouent sur le registre Spencer Tracy/Katharine Hepburn. Woody Harelson se régale d’un homme de l’ombre de Nixon et Jim Rash est Lance Vespertine, un réalisateur tellement diva qu’il fera dire à Kelly : « On aurait dû prendre Kubrick », allusion aux théories complotistes affirmant que l’alunissage a été tourné en studio à Hollywood par le cinéaste de 2001.

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