Juste une image…
Après avoir collectionné, entre 1953 et 1956, trois gros succès publics et remporté nombre de récompenses avec Le salaire de la peur, Les diaboliques et le documentaire Le mystère Picasso, Henri-Georges Clouzot essuie un gros échec avec Les espions. Il reste trois années sans tourner, temps qu’il consacre à suivre plusieurs… procès d’assises. Il assure même une chronique judiciaire dans un hebdomadaire. En réalité, il a déjà une idée derrière la tête : revenir au cinéma avec un sujet sur la justice. Le cinéaste avait été choqué par la manière dont on rendait la justice dans les causes criminelles. Il a noirci, selon ses dires, quatre mille pages pour écrire La vérité…
Pour clore son cycle Clouzot, Ciné-Ried présente, le mardi 17 mai à 20h, La vérité qui est devenu célèbre à cause de la présence au générique, de Brigitte Bardot, la star française des sixties. C’est Raoul Lévy, heureux producteur des films de BB depuis Et Dieu créa la femme, qui propose à Clouzot de faire un film avec sa protégée. Aux studios de la Victorine à Nice, la star achève le tournage de Voulez-vous danser avec moi ? de Michel Boisrond lorsqu’Olga Horstig, son agent, lui apporte le script de La vérité. Jacques Charrier, le mari de BB, est contre l’idée. Il trouve que Dominique Marceau est un rôle déshonorant pour une future maman, Bardot attendant en effet un heureux événement. Mais la comédienne accepte d’emblée le rôle : « Le diable vous attire, dit-elle. Clouzot, c’est quelque part le diable. J’étais terrorisée. Je me suis jetée dans ce film comme je me serais jetée de la tour Eiffel ».
Séduisante jeune femme, Dominique Marceau est jugée en cour d’assises pour le meurtre de son ancien amant, Gilbert Tellier (Sami Frey), un jeune chef d’orchestre qui était promis à Annie, la sœur de Dominique. C’est en flash-backs depuis le procès où l’on reproche notamment à Dominique ses mœurs légères, que Clouzot va raconter leur histoire et, peu à peu, le véritable visage de l’accusée se dessine…
« Dès notre première rencontre, explique le cinéaste, j’ai vu que Brigitte Bardot avait de la bonne volonté et qu’elle se laisserait diriger. Entre nous, il s’est établi un contact immédiat. » En réalité, comme souvent chez le réalisateur de Quai des Orfèvres, le film (qui met en scène un duel entre l’accusation et l’accusée) sera un combat entre le cinéaste et sa vedette. Clouzot veut casser le mythe et faire jouer l’actrice. Sur le plateau, il la malmène. Un claque part. Mais Bardot réplique aussi sec. Cet échange va faire le bonheur de la presse people. Clouzot sort épuisé du tournage. Quelques mois plus tard, à l’instar de son personnage, BB tentera de se suicider. Mais elle dira, bien des années après, : « Je me moque de ma carrière, sauf La Vérité. S’il doit rester une seule trace de mon passage sur les écrans, je souhaite que ce soit dans ce film où, pendant et après, j’ai conscience d’avoir été une vraie comédienne. »
La vérité sera projeté le mardi 17 mai à 20h à La Grange à Riedisheim. La séance est présentée et animée par Pierre-Louis Cereja.
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