UN GRAND POETE, UNE REDOUTABLE INTRIGANTE ET UN ESCROC DE HAUT VOL  

Coffre tJean EustacheCOFFRET JEAN EUSTACHE
Lorsque Jean Eustache tourne en 1973, La maman et la putain, il ne sait probablement pas qu’il est en train de signer un chef d’oeuvre de la modernité et aussi une manière de testament de la Nouvelle Vague. Cette vaste saga (3h40) de la parole portée par un extraordinaire trio de comédiens (Jean-Pierre Léaud en dilettante oisif, Bernadette Lafont et Françoise Lebrun) qui brasse les aspirations libertaires de mai 68 pourrait aussi être… l’arbre qui cache la forêt dans la filmographie du natif de Pessac (Dordogne) ! Mais la chose est clairement réparée avec le magnifique coffret (soit de six Blu-ray, soit de sept DVD) qui réunit pour la première fois, dans une splendide version restaurée, une œuvre inouïe et d’une sincérité à couper le souffle. Alternant documentaires et fictions courtes comme longues, l’authenticité acharnée de Jean Eustache, cinéaste du désir et de l’intime, resplendit dans chacun de ses films : de la jeunesse solaire et écorchée de Mes petites amoureuses jusqu’au vertige bataillien d’Une sale histoire. Sous l’intitulé Les mauvaises fréquentations, on trouve Du côté de Robinson (1963/1967, N&B, 39 mn) où Daniel et Jackson, deux dragueurs sans-le-sou, «  chassent la souris » dans les rues de Montmartre… et Le père Noël a les yeux bleus (1966, N&B, 47 mn) où le jeune Daniel, pour s’offrir un duffle-coat, accepte de poser pour un photographe dans les rues de Narbonne, déguisé en père Noël. Avec La rosière de Pessac (1968, N&B, 66 mn), Eustache, au printemps 1968, suit les préparatifs et le protocole de la cérémonie, dans sa ville natale, de la cérémonie de l’élection de la jeune fille la plus vertueuse qui deviendra la 72e rosière de Pessac. Pour La Rosière de Pessac 79 (1979, couleurs, 71 mn), Jean Eustache revient, au printemps 1979, à Pessac, onze ans après son premier documentaire, pour filmer de nouveau l’élection et la cérémonie de la rosière. La jeune fille choisie cette fois a poussé au pied d’une tour HLM. Les Trente Glorieuses s’achèvent, le chômage est dans tous les discours… Dans Numéro Zéro (1971, N&B, 112 mn), le cinéaste filme sa grand-mère, Odette Robert, 70 ans, qui raconte l’histoire de sa vie : son enfance heureuse, la mort de sa mère, la cohabitation douloureuse avec sa belle-mère, sa rencontre avec son mari, bien vite volage. Elle évoque les quatre enfants qu’elle a perdus, les maladies, les déménagements, la honte et les disputes. Elle confie aussi son inquiétude pour son petit-fils et pour son arrière-petit-fils qu’elle aimerait voir grandir encore quelques années… On découvre aussi Mes petites amoureuses (1974, couleurs, 124 mn), Une sale histoire (1977, couleurs, 49 mn) et trois courts-métrages : Le jardin des délices de Jérôme Bosch (1979, couleurs, 34 mn), Les photos d’Alix (1980, couleurs, 20 mn) et Offre d’emploi (1980, couleurs, 20 mn). Chaque film est accompagné de très nombreux suppléments. Parmi eux, on garde, pour la bonne bouche, la façon dont, à Cannes 73, Gilles Jacob et Jean-Louis Bory, alors critiques, s’attaque ou encense La maman et la putain. Enfin, mêlant entretiens-fleuves avec le cinéaste, essais critiques et projets de films, Jean Eustache, envers et contre tout. Dits et écrits (160 pages) est un livre indispensable pour mieux appréhender l’œuvre de ce grand poète contemporain du septième art. (Carlotta)
Trois Mousquetaires MiladyLES TROIS MOUSQUETAIRES – MILADY
Elle cumule noirceur, traîtrise, cruauté, rancune, méchanceté, vices. Comme aurait Audiard, cette Milady-là est une synthèse. Comme le titre du second volet des Mousquetaires le précise, Milady de Winter est au centre du film et au coeur de tous les sales coups qui pleuvent sur D’Artagnan et ses amis. Pire, alors que sa chère et tendre Constance Bonacieux a été enlevée sous ses yeux, le fier bretteur est contraint de s’allier à la mystérieuse intrigante. Celle-ci parvient quasiment à lui faire perdre pied ! Car c’est bien, ici, l’amour qui est le moteur de l’action. Et quand même un peu le complot contre Louis XIII. Pour sauver Constance, D’Artagnan est prêt à tout. Et c’est bien le dramatique souvenir d’une épouse aimée, marquée au fer rouge puis pendue qui ne cesse de tourmenter Athos. C’est à cause de l’amour qu’Aramis s’inquiète pour sa sœur enceinte et entrée au couvent mais, là, une issue heureuse semble se profiler puisque Porthos, dont le premier épisode nous avait révélé la bisexualité, se propose de convoler… Si l’on excepte la grande séquence -spectaculaire et bien enlevée- du siège de La Rochelle, ordonné par le roi et commandé par le cardinal de Richelieu, l’essentiel de ce Trois mousquetaires II tourne donc autour de la sulfureuse Milady de Winter. D’Artagnan, Athos, Porthos et Aramis iront donc se battre à La Rochelle et le capitaine de Tréville pourra leur lancer un « Mousquetaires, vous êtes soldats pour mourir, je vous emmène là où on meurt » prononcé, dans la réalité historique, en 1884, pendant la guerre franco-chinoise par le général Oscar de Négrier qui, lui, parla de… légionnaires. Mais on n’en voudra pas à Martin Bourboulon et à ses scénaristes de prendre des accommodements avec l’histoire puisqu’Alexandre Dumas en faisait autant. Avec ce second volet, au ton plus tragique (le premier était, par comparaison, flamboyant) le cinéaste entre dans l’intimité des personnages et développe donc largement celui de Milady, femme bouleversée par un traumatisant évènement dans son histoire. Rongée de l’intérieur et fataliste, elle a choisi la part de l’ombre et, telle une guerrière, est capable de séduire et de porter un coup fatal dans le même mouvement… Avec une fière allure, Eva Green incarne une Milady ténébreuse et très caméléon. Derrière une dureté quasi-masculine, sa féminité, telle une arme, lui sert à manipuler ses interlocuteurs, à les séduire (D’Artagnan lutte pour ne pas succomber), les piéger, voire les tuer, parfois… Notamment, en ce qui concerne le sort (funeste?) de Milady, ce second épisode laisse, disons, la porte ouverte. Dans d’immenses écuries anglaises ravagées par les flammes d’un incendie allumé par Milady, cette dernière croise le fer avec D’Artagnan avant de disparaître dans la fournaise. (Pathé)
Messieurs SantéCES MESSIEURS DE LA SANTE
Après s’être évadé de la prison de la Santé, Jules Taffard, escroc notoire, décide de jeter son dévolu sur la famille Génissier. Sous un nom d’emprunt, il se fait embaucher comme homme à tout faire par la propriétaire d’un magasin de corsets. Une fois la confiance de toute la maisonnée gagnée, Taffard débute ses arnaques en compagnie de Zwerch, son nouvel acolyte. Amusé par ses combines et encouragé par la famille Génissier qui profite des bénéfices, l’astucieux financier multiplie les tours de passe-passe et construit un empire économique au point d’attirer l’attention des autorités. C’est un Raimu explosif et tonitruant qui domine de la tête et des épaules la distribution (Pauline Carton, Edwige Feuillère, Lucien Baroux) de cette satire sociale et… fantaisiste signée en 1934 par Pierre Colombier, un habitué des succès populaires. En 1931, Paul Armont et Léopold Marchand présentent au Théâtre de Paris une pièce de leur création, Ces Messieurs de la Santé. Cette satire féroce du monde de la finance connaît un beau succès sur scène. L’année précédente, avait éclaté en France un scandale politico-financier, l’affaire du banquier Albert Oustric impliquant un membre du gouvernement. Cet esclandre inspira considérablement les auteurs de la pièce mais lorsque Colombier l’adapte en 1934, le sujet est toujours d’actualité. Une nouvelle crise politico-économique vient en effet d’éclater en France avec la fameuse affaire Stavisky, plongeant le pays dans la crise d’un régime instable soupçonné de corruption et contribuant à la chute du gouvernement. Lorsqu’on découvre sur grand écran Gédéon, le financier malhonnête, la comparaison entre le personnage joué par Raimu et Serge Alexandre Stavisky, ne se fait pas attendre. Tous deux séducteurs et beaux parleurs, sont surtout des escrocs professionnels au sein d’une société gangrénée par la corruption et les magouilles. Sous la satire apparaît aussi la morosité de l’époque : une mauvaise conjoncture économique, la montée du chômage, l’amertume des anciens combattants qui voient les manifestations de leur victoire s’amoindrir de jour en jour. Témoignage d’un temps, Ces Messieurs de la Santé n’en reste pas moins une éclatante comédie. Il est vrai que Raimu (1883-1946) est au sommet de son talent. Il a déjà tourné Marius (1931) et Fanny (1932) et il retrouvera l’univers de Pagnol en 1936 pour César, le dernier volet de la trilogie. Orson Welles disait de lui qu’il était « le plus grand acteur du monde ». Avec son talent démesuré qui donne le véritable rythme du film, Raimu fait preuve d’un naturel et d’une puissance dramatique incroyables avec sa voix profonde, sa verve, son regard qui parle à lui seul, son cynisme aussi. Éblouissant à chaque plan, « dévorant » littéralement les autres comédiens, Raimu signe une création étincelante, maniant le compliment ou la menace avec brio. Du pur bonheur ! En supplément, À l’ère des grandes affaires : entretiens autour du film avec Jean Garrigues, Didier Griselain et Isabelle Nohain-Raimu (50 min) (Pathé)
Pendez Les Haut CourtPENDEZ-LES HAUT ET COURT
En 1889, dans l’Oklahoma, sauvé de justesse par le marshal Dave Bliss, après avoir été lynché par des habitants de Red Creek qui l’accusaient à tort d’avoir abattu un propriétaire de bétail pour le voler, Jed Cooper est reconnu innocent par le juge Fenton. Celui-ci le nomme marshal, notamment pour éviter que Jed ne se livre à une vengeance personnelle. Le juge le charge de ramener vivants les hommes responsables de son lynchage pour qu’ils soient jugés en bonne et due forme. Énergique et habile, Jed parcourt l’Oklahoma, territoire où la loi ne s’est pas encore imposée, et remplit ses fonctions avec une redoutable efficacité. En parallèle, Jed se laisse prendre aux charmes d’une jeune et séduisante veuve qui examine chaque prisonnier avec une insistance qui l’intrigue. Elle lui apprend qu’elle cherche le bandit qui a tué son mari… Après avoir été de la grande aventure du western spaghetti avec trois films de Sergio Leone (Pour une poignée de dollars en 1964, Pour quelques dollars de plus en 1965 et évidemment Le bon, la brute et le truand en 1966), Clint Eastwood est de retour aux Etats-Unis. Avec un statut de star ! Devant la caméra de Ted Post, Eastwood va, en 1968, incarner Jed Cooper dans Pendez-les haut et court, un solide western riche en rebondissements qui illustre aussi la manière dont le comédien va construire avec intelligence sa carrière d’acteur mais aussi de réalisateur et de producteur. Hang’em High (en v.o.) s’attache à un des thèmes les plus violents du western et aussi de la société américaine, en l’occurrence le lynchage et Ted Post (qui avait dirigé l’acteur dans plusieurs épisodes de la série Rawhide et qui le retrouvera, en 1973 dans Magnum Force, deuxième aventure de l’inspecteur Harry) décline les différentes formes de pendaison, de celle, sommaire, qui se situe au début du film, à la pendaison officielle qui est l’occasion de réjouissances locales sans oublier le suicide par pendaison d’un des principaux personnages du film. Le scénario lui-même invite à s’interroger sur les rapports entre la loi, la justice et ses applications. En tête d’affiche, Clint Eastwood est entouré d’une belle brochettes de comédiens chevronnés comme Ed Begley, Pat Hingle, la belle Inger Stevens ou Charles McGraw mais aussi des débutants comme Dennis Hopper ou Bruce Dern. Le film sort dans une belle édition limitée et restaurée en digibook Blu-ray/DVD avec une présentation d’Olivier Père et Jean-François Giré. Pour sa part, Patrick Brion signe un livret (68 pages) sur la carrière exemplaire du grand Clint dans le western. (Sidonis Calysta)
L'InnocenceL’INNOCENCE
Dans une ville de province au Japon, un enfant se comporte de manière étrange. Au fur et à mesure que l’histoire se déroule à travers les yeux de la mère, de l’enseignant et de l’enfant lui même, la vérité émerge progressivement. Ainsi, chaque personnage du film pourrait à un degré variable être marqué du sceau de la figure du monstre, qui apparaît dans le film comme un reflet des angoisses sociales contemporaines. Avec ce drame mâtiné de thriller dont le titre original Kaibutsu peut se traduire par « monstre », le réalisateur d’Une affaire de famille (Palme d’or à Cannes 2018) est de retour au pays. Ses deux précédents films (La vérité et Les bonnes étoiles) ayant été tournés respectivement en France et en Corée du Sud. Le film raconte l’histoire du jeune Minato, dont le comportement est de plus en plus préoccupant. Sa mère, qui l’élève seule depuis la mort de son époux, décide de confronter l’équipe éducative de l’école qui affirme que tout va bien. Tout semble pourtant désigner le professeur de Minato comme responsable des problèmes rencontrés par le jeune garçon. Mais la vérité se révèle bien plus complexe et nuancée que ce que chacun avait anticipé au départ. Kore-eda développe donc trois versions d’un même récit, commençant par le point de vue de Saori, la mère qui constate que quelque chose cloche chez son fils qui revient de classe avec des bleus ou de la terre dans sa gourde. Le second volet est centré sur le professeur que tout semble accuser. Mais, dans ce film qui a obtenu le prix du scénario l’an dernier à Cannes, les versions, évidemment, varient. Car l’enseignant pense que Minato s’en prend consciemment à un autre jeune garçon de la classe. Enfin, on trouve le point de vue de l’écolier… Kore-eda peut ainsi approfondir des thèmes aussi différents que la rumeur et le poids des réseaux sociaux mais aussi les rapports passablement compliqués en matière de pouvoir entre les parents et la communauté éducative ou encore le harcèlement scolaire. Dans cette histoire émouvante, le réalisateur de Nobody Knows (2004) ou Tel père, tel fils (2013) trouve le ton juste et une mise en scène pleine de sensibilité pour raconter le monde de l’enfant comme celui des adultes. Une histoire sur laquelle court la musique du grand Ryuichi Sakamoto, disparu en mars 2023. (Le Pacte)
Iris HommesIRIS ET LES HOMMES
Tandis qu’il la manipule vigoureusement, l’ostéopathe d’Iris l’interroge : «Comment ça va, la vie ?» Iris constate que tout va bien : un mari formidable, deux filles parfaites, un cabinet dentaire florissant. La question que l’ostéo ne pose pas : « Depuis quand n’avez-vous pas fait l’amour ? » Comme si elle lisait les pensées qui troublent Iris alors qu’elle attend son tour pour un rendez-vous parent/prof, une femme lui suggère : « Rien de plus simple que de prendre un amant ! » Deux clics sur une banale appli de rencontre et le tour est joué. C’est le bon coin du sexe sans prise de tête. Les messages bipent à tour de bras. Des hommes comme s’il en pleuvait ! La cinéaste Caroline Vignal retrouve Laure Calamy avec laquelle elle avait réussi le réjouissant Antoinette dans les Cévennes (2020). Ici, Iris part à la chasse aux hommes parce qu’elle est bien obligée de constater qu’elle s’ennuie dans son couple. Alors, elle décide de se reconnecter avec son désir. Jouer la carte du poly-amour, jouir enfin. Cette comédie de mœurs plutôt souriante permet à Caroline Vignal de concocter un rôle sur mesure pour Laure Calamy qui, à travers Iris, dévoile sa fragilité qui est aussi celle de beaucoup de femmes, à l’approche de la cinquantaine. D’une scène à l’autre, elle incarne une femme mûre, « rangée des voitures », qui aurait prématurément renoncé à l’amour, une toute jeune fille à fleur de peau, une femme adulte en pleine possession de ses moyens, de sa puissance sexuelle. Enfin et surtout, dans le regard des hommes, Iris est une femme magnifique, bouleversante, infiniment désirable. (Diaphana)
Une Affaire HonneurUNE AFFAIRE D’HONNEUR
Dans le Paris de 1887, seul le duel fait foi pour défendre son honneur. Clément Lacaze, charismatique maître d’armes, se retrouve happé dans une spirale de violence destructrice. Dans le cercle d’escrime tenu par Adolphe Tavernier, il va croiser Marie-Rose Astié de Valsayre, journaliste et militante féministe en avance sur son époque, et décide de lui enseigner l’art complexe du duel. En effet, la jeune femme a été humiliée publiquement par Ferdinand Massat. Le rédacteur en chef du Petit Journal s’est moqué de ses « vapeurs » et elle entend laver son honneur par les armes. Même si, comme le dit un bretteur, un homme ne se bat pas avec une femme. Clément et Marie-Rose vont faire face aux provocations et s’allier pour défendre leur honneur respectif. Par ailleurs, Clément Lacaze va tenter de dissuader -mais en vain- son neveu Adrien de se battre avec le colonel Berchère, un combattant très expérimenté… D’entrée de jeu, Vincent Perez (qui réalise là son quatrième long-métrage) s’installe dans un riche appartement parisien dans lequel s’affrontent deux escrimeurs dont le maître d’armes Lacaze réputé être le plus grand escrimeur de son temps… À la fin du 19e siècle à Paris, on compte un duel par jour et un mort tous les trente-cinq affrontements, sans compter les blessés. Dans l’atmosphère revanchiste à la suite de la défaite contre la Prusse en 1871 et dans la foulée de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la moitié des duellistes sont des militaires et l’autre vient du monde de la presse nouvellement démuselée et des arts et des lettres à l’honneur bafoué par cette dernière. En 1887, alors que l’histoire millénaire du duel subit ce dernier regain mortifère, les salles d’armes, véritables salles de gym de la Belle époque, pullulent, souvent attenantes des bureaux de rédaction… Vincent Perez et Michel Carliez, spécialiste des cascades, envisageaient depuis longtemps de monter un film autour du duel et de sa longue histoire. C’est donc chose faite avec Une affaire d’honneur. Un drame bien enlevé et centré sur le personnage de Clément Lacaze, bretteur sombre et taiseux hanté par les horreurs de la guerre de 1870. Roschdy Zem incarne avec justesse cet escrimeur entouré de bons comédiens comme Doria Tillier, Guillaume Gallienne, Damien Bonnard et Vincent Perez, lui, dans le rôle de Berchère, un officier qui ne supporte pas de perdre sa fiancée pour un homme plus jeune que lui. Entre un élite qui refuse la modernité et les premiers combats féministes, le cinéaste réussit une intéressante chronique d’un monde en train de complètement changer. (Gaumont)
WonkaWONKA
Aspirant magicien, inventeur et chocolatier, Willy Wonka arrive en Europe pour établir sa boutique de chocolat aux Galeries Gourmet. Ayant rapidement dépensé ses maigres économies, il est rabattu par Mr Bleacher chez Mme Scrubitt, et, malgré l’avertissement de l’orpheline et employée Noodle sur l’importance des petits caractères, il signe le contrat parce qu’il est analphabète. Pour payer les frais exigés par le contrat, Wonka présente aux Galeries Gourmet des « chocovols », des chocolats qui font voler les gens, faisant face à la moquerie des membres du cartel du chocolat : Gerald Prodnose, Félix Fickelgruber et et de son chef Arthur Slugworth. Ils appellent le chef de la police pour confisquer ses revenus pour avoir vendu du chocolat sans magasin. Le cartel du chocolat qui oeuvre en secret, exploite la faiblesse du chef en lui versant en pots-de-vin, leurs chocolats pour forcer Wonka à ne plus faire de chocolat et à quitter la ville ou carrément à le faire disparaître… On se souvient avec plaisir de Charlie et la chocolaterie que Tim Burton tira, en 2005, du roman éponyme de Roald Dahl. On y trouvait, sous les traits de Johnny Depp, le personnage de Willy Wonka. Cette fois, devant la caméra du Britannique Paul King, réalisateur, en 2014 et 2017, des deux Paddington, c’est Timothée Chalamet, vu dans le récent Dune, qui se glisse dans la peau du légendaire et extravagant confiseur dans une préquelle du film de Burton. Si l’idée d’une prequelle pouvait surprendre, le résultat est tout à fait plaisant. L’aventure gourmande et musicale est… savoureuse et Chalamet propose une composition brillante en maître chocolatier dont l’existence va prendre un tournant majeur le jour où il rencontre les fameux Oompa-Loompas, seules personnes (payées en fèves de cacao) que Willy Wonka autorise à travailler dans son usine en raison du risque d’espionnage industriel. L’un de ces Oompa-Loompas, surnommé Colosse, est incarné par Hugh Grant. En multipliant les rebondissements dans une mise en scène inventive, Paul King a concocté une belle recette sur fond de merveilleux, de bonne humeur et de générosité. Timothée Chalamet est entouré d’excellents comédiens britanniques comme Olivia Colman, Sally Hawkins ou Rowan Atkinson. Enfin la musique de Joby Talbot et les chansons de Neil Hannon sont très efficaces ! (Warner)
Batiment 5BATIMENT 5
Jeune femme très impliquée dans la vie de sa commune, Haby découvre le nouveau plan de réaménagement du quartier dans lequel elle a grandi. Mené en catimini par Pierre Forges, un jeune pédiatre propulsé maire, il prévoit la démolition de l’immeuble où Haby a grandi. Avec les siens, elle se lance dans un bras de fer contre la municipalité et ses grandes ambitions pour empêcher la destruction du bâtiment 5. Le film de Ladj Ly fait clairement allusion à des situations réelles et le cinéaste remarque : « Je suis issu de Montfermeil, j’y ai grandi, ai été nourri par les histoires de ses habitants qui imprègnent forcément mes films mais dans ce cas, j’ai voulu élargir le cadre. Ce qui se passe dans les quartiers de Montfermeil se passe dans de nombreuses autres villes, en France comme ailleurs. En inventant une ville, je me suis dit que tout le monde pourrait s’y refléter. De même pour le principe d’un film choral, qui explore des histoires dans l’histoire, de la trajectoire de ce maire à celle d’une militante associative, de son ami ou du maire adjoint. Le tout lié par un constat sur le politique. » Bâtiment 5 est une manière de dire qu’il est temps de repenser les choses en cherchant, à travers une militante qui le symbolise, des pistes, des nouveaux moyens de faire. A la différence des Misérables qui évoquait la question du comportement policier et spécialement celui de la BAC, Bâtiment 5 aborde une autre problématique, celle du logement social. Et Ladj Ly, avec le personnage d’Haby, insuffle de l’espoir dans son propos. Ses personnages sont certes désabusés, ils n’y croient plus mais Haby (Anta Diaw) représente une possible clé d’ouverture en décidant de s’impliquer jusqu’à se présenter aux élections municipales. « Rien ne dit qu’elle sera élue, souligne le cinéaste, mais au moins, la démarche est là. » Enfin cette sortie s’accompagne aussi d’un coffret qui regroupe Bâtiment 5 et Les Misérables, le premier long-métrage de fiction du cinéaste sorti en 2019 et prix du jury à Cannes. Parmi les bonus, un entretien avec Ladj Ly, le film à Cannes et des scènes coupées. (Le Pacte)
First Slam DunkTHE FIRST SLAM DUNK
Meneur de jeu de Shohoku, Ryota Miyagi joue toujours intelligemment et à la vitesse de l’éclair, contournant ses adversaires tout en gardant son sang-froid. Né et élevé à Okinawa, Ryota avait un frère aîné de trois ans de plus. Sur les traces de ce dernier, joueur local célèbre dès son plus jeune âge, Ryota est également devenu accro au basket. En deuxième année de lycée, Ryota fait partie de l’équipe de basket-ball du lycée Shohoku, aux côtés de Sakuragi, Rukawa, Akagi et Mitsui, et participe au championnat national inter-lycées. Pour l’équipe de Ryota, l’heure est venue de se mesurer aux champions en titre, les joueurs du lycée Sannoh Kogyo. Voici la première adaptation au cinéma du manga culte Slam Dunk qui s’est vendu à plus de 160 millions d’exemplaires au Japon. Véritable phénomène à sa sortie dans les salles nippones, The First Slam Dunk a conservé la première place au box-office japonais pendant huit semaines consécutives, détrônant ainsi Avatar : la voie de l’eau. Le film devient aussi le cinquième film japonais le plus rentable de tous les temps. Lui-même auteur du manga originel, le réalisateur Takehiko Inoue signe le scénario et la mise en scène de The First Slam Dunk. Mais le cinéaste a souhaité ne pas reproduire à l’identique son œuvre initiale. Il se focalise donc sur un autre personnage : Ryota Miyagi et non Hanamichi Saku, le protagoniste du manga. Mêlant une animation 3D pour les scènes de matchs de basket et d’animation 2D dessinée à la main pour celles de la vie quotidienne, le film impressionne par le soin apporté au graphisme. Certaines séquences de matchs ont également été réalisées grâce à la capture de mouvement pour reproduire les actions des joueurs avec le plus de réalisme possible. En complément, on trouve une interview (28 minutes) de Takehiko Inoue. (Wild Side)
Pour Amour CielPOUR L’AMOUR DU CIEL
Alors qu’il vient de conclure un juteux marché avec des Américains, le riche industriel romain Carlo Bacchi est, le jour même de son anniversaire, mortellement renversé par un camion. Las, il se voit refuser l’entrée au paradis. Le juge céleste lui octroie alors douze heures pour racheter ses fautes en faisant, en particulier, le bonheur d’Amedeo Santini, un de ses ouvriers qui a tenté de se suicider. Il se relève donc indemne et rentre chez lui. Au grand dam de sa famille, Bacchi va commencer à régler ses affaires. Il se met à la recherche de Santini, convoque les délégués de son usine pour leur en donner les clés. Mais satisfaire Santini (Julien Carette) ne va pas être une mince affaire. En 1950, le cinéaste italien Luigi Zampa (1905-1991) porte à l’écran un scénario de Cesare Zavattini, souvent considéré comme le père du néoréalisme italien, et signe l’un des premiers films officiellement coproduit par la France et l’Italie dans une tentative commun de défier le cinéma hollywoodien. Etiquetté « film néoréaliste rose », Pour l’amour du ciel, avec des dialogues du grand Henri Jeanson, mêle la critique sociale et la comédie avec une touche de fantastique et une réflexion « chrétienne » sur les humains comme en atteste la dernière réplique : « Heureux ceux qui se perdent car ils seront sauvés ». En tête d’affiche, coproduction oblige, on trouve un « nouveau » Jean Gabin. Avant la guerre, il était un jeune premier romantique (Gueule d’amour de Grémillon) ou un ouvrier engagé (La belle équipe de Duvivier). La star française est revenu de la guerre, les cheveux blanchis. C’est un autre homme qui retourne au cinéma. Il a troqué la salopette pour le costume-cravate et son personnage porte le poids de ses erreurs passées. Gabin est toujours juste mais il lui faudra attendre 1954 et Touchez pas au grisbi de Jacques Becker pour revenir définitivement tout en haut de l’affiche… (Pathé)
Chasse GardéeCHASSE GARDEE
Charmant jeune couple parisien, Adelaïde et Simon ne supportent plus la vie dans leur capitale sauvage et surpeuplée. Avec leurs deux enfants, ils trouvent leur bonheur dans une vaste propriété, située dans la commune très rurale de Saint-Hubert. Mais ce qu’ils ignorent, c’est qu’ils viennent de s’installer sur le terrain de chasse favori des habitants du village, bien décidés à perpétuer leur mode de vie… Antonin Fourlon et Frédéric Forestier n’innovent pas vraiment en confrontant l’existence urbaine à la vie rurale. D’un côté, l’enfer de la grande ville, de l’autre le charme (réel) de la campagne. De quoi alimenter, sans trop se casser la tête, le scénario d’une comédie française. Parce que vivre dans la capitale, c’est se prendre la tête avec les tenants de la trottinette électrique alors que les « ruraux » sont des gens agréables qui n’oublient pas de se dire bonjour quand ils se rencontrent. Mais il y a les… chasseurs. Et là, l’existence de la famille d’Adelaïde et de Simon devient moins idyllique. Le couple parisien (Hakim Jemili et Camille Lou) va tout tenter pour éloigner les chasseurs de leur propriété. Adelaïde fera même appel à son avocat de père (Thierry Lhermitte) pour arriver à ses fins. Mais les chasseurs, emmenés par Bernard (Didier Bourdon qui se souvient qu’il fut Dédé lorsque Les Inconnus chassaient la galinette cendrée) ne sont pas les viandards bas du front qu’on imagine… Où comment atteindre -peut-être- le vivre ensemble. (Seven 7)

 

UN COUPLE QUI S’INVENTE A DEUX ET UN TERRIFIANT AUTO-STOPPEUR  

Temps AimerLE TEMPS D’AIMER
Un gamin sur la plage… Belle image de vacances bretonnes. Mais le petit Daniel s’approche de la mer. Sa mère crie mais il n’entend pas. Un homme qui passe, attrape le bambin et le ramène… Entre François et Madeleine, quelque chose se passe. Silencieusement. Nous sommes en 1947. Serveuse au Beaurivage, un grand restaurant donnant sur la grève, Madeleine est une taiseuse qui élève Daniel mais sans l’aimer. Avec François Delambre, l’étudiant parisien dont la famille possède une belle maison là-haut sur les rochers dominant la mer, Madeleine se dit qu’elle pourrait enfin laisser derrière elle un traumatisant passé. La séquence d’ouverture du Temps d’aimer est sans équivoque. Des images d’archives déroulent l’un des temps les plus sinistres de la Libération, celui des femmes tondues pour cause de « collaboration horizontale » avec l’occupant nazi. Parce qu’elle fut humiliée et traitée comme une « poule à boches », Madeleine, aussi, fut tondue. Sur son ventre déjà, elle tente d’effacer les traces, non de sa future maternité, mais de l’offense faite par la soldatesque. Katell Quillévéré (révélée en 2013 par l’émouvant Suzanne) a puisé son film dans l’histoire de sa grand-mère qui a toujours fait sentir qu’elle avait un secret. Elle explique : « Pendant l’Occupation, elle a eu une relation avec un soldat allemand dont elle est tombée enceinte. Elle s’est retrouvée mère célibataire à 17 ans. » Le scénario du Temps d’aimer intègre également la suite de l’existence de cette grand-mère. Puisqu’elle rencontra son mari, quatre ans plus tard, sur une plage de Bretagne. C’était un homme d’un milieu beaucoup plus aisé que le sien et il l’épousa contre l’avis de sa famille et adopta son enfant. Au-delà de ce point de départ très personnel, la fiction et l’imagination se chargent de la suite de cette chronique intime placée sous le sceau du silence et des non-dits et centrée sur un couple qui décide de s’inventer à deux et qui va devenir le récit romanesque des jours et des heures d’un couple que tout oppose et qui s’unit, alors que la menace constante d’une catastrophe est là… Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste composent brillamment un couple qui souffre silencieusement d’une durable frustration et qui ne s’épanouit que dans le sexe. François tombe éperdument amoureux de Madeleine tout en aimant les hommes. Et Madeleine, dans une remarquable séquence de sexe très chorégraphiée et érotiquement forte, va prendre le risque de sublimer leur complicité dans une rencontre charnelle partagée avec un GI’s américain… Sans que Le temps d’aimer soit réellement un mélodrame, la cinéaste fait cependant référence au grand Douglas Sirk, maître américain du mélodrame flamboyant, et notamment à son film de 1958, A Time to Love and a Time to Die. Il y est aussi question de guerre, d’amour, de mariage, de maternité… (Gaumont)
HitcherTHE HITCHER
Alors que la nuit tombe et qu’une pluie torrentielle s’abat sur une autoroute déserte du Texas, Jim Halsey roule en direction de la Californie… Le jeune homme prend en stop un voyageur solitaire et sourit : « Ma mère m’interdit de faire ça ! » Et sa mère avait bien raison car le nommé John Ryder s’avère être un véritable psychopathe doublé d’un tueur. Promenant son couteau sur le visage de Jim, Ryder l’oblige à dire : « Je veux mourir ». Terrorisé, Halsey parvient pourtant d’un brutal coup de volant, à projeter le tueur hors du véhicule. Ravi d’avoir échappé à une mort certaine, Halsey poursuit sa route. Mais lorsqu’il s’apprête à dépasser la voiture d’une famille en vacances, il aperçoit Ryder installé à l’arrière en compagnie de la fillette du couple. Pour Halsey, c’est le début d’un long voyage vers l’horreur, constamment traqué par le tueur . Car Ryder réapparaît régulièrement pour assassiner des policiers tandis que les responsables de la police sont désormais convaincus que Halsey est responsable des meurtres commis par Ryder. Le jeune homme n’a d’autres issue que de suivre les traces sanglantes que le tueur sème derrière lui et d’essayer de l’empêcher de nuire. En 1986, avec The Hitcher, le premier long-métrage d’une carrière qui n’en comptera que cinq, Robert Harmon est rapidement remarqué et il obtiendra d’ailleurs le Grand prix du jury et le prix de la critique au Festival du film policier de Cognac. Il est vrai que The Hitcher s’impose comme un film-culte et aussi comme un sommet du thriller flippant. Au point de départ du film, se trouve le scénariste Eric Red qui, un jour, sur une route du Texas, prend dans sa voiture un auto-stoppeur à l’air un peu louche. Il tient alors le début du scénario du film… Dans The Hitcher ou l’apprentissage de la violence, le livre d’Olivier Père qui accompagne le film, l’auteur note : « Même s’il se déroule entièrement dans le désert texan et n’est pas avare en fusillades, duels et poursuites, The Hitcher est moins un western moderne qu’un film fantastique mâtiné d’horreur et d’action. » Et ce fantastique mâtiné de gore doit quasiment tout au personnage de Ryder dont le grand Rutger Hauer (dans son meilleur film américain avec Blade Runner) fait une lancinante incarnation du Mal. Le blond comédien hollandais aux yeux bleus est bien entouré par C.Thomas Howell (qui avait débuté, en 1982, dans le rôle de Tyler de l’E.T. de Spielberg) en jeune homme très traumatisé par ce cauchemar en plein jour et aussi Jennifer Jason-Leigh dans le rôle de Nash. Rutger Hauer qui venait de tourner avec Jennifer Jason-Leigh dans La chair et le sang, lui inflige ici un sort encore plus violent que dans le film de Paul Verhoeven. Un bijou terrifiant ! (Sidonis Calysta)
Amour FouL’AMOUR FOU – VA SAVOIRVa Savoir
De L’amour fou, qu’il tourna en 1969, Jacques Rivette disait qu’il s’agit d’un film « sur la jalousie » tout en ajoutant que cela ne permet pas d’en donner une idée tout à fait exacte… Autour de la dissolution du mariage entre Claire, une actrice (Bulle Ogier), et Sébastien, son metteur en scène (Jean-Pierre Kalfon), Rivette construit un parallèle entre la jalousie d’Hermione dans Andromaque de Racine, et la jalousie de Claire, toutes deux suscitées par l’infidélité d’un homme aimé. Le film alterne en effet des scènes de répétition de l’Andromaque, filmées par une équipe de télévision, et des scènes de la vie de couple de Sébastien et Claire, à l’extérieur du théâtre. Avec cette œuvre-fleuve (4h12), l’un des fondateurs de la Nouvelle vague donne l’une des meilleures variations autour du théâtre qu’ait pu proposer le 7e art. Autour de la complexité et de l’instabilité des rapports d’un couple, Jacques Rivette se souvient : « On l’a tourné en cinq semaines, dans des conditions très serrées. Le film était marqué par ce que je découvrais à l’époque au théâtre, notamment les spectacles de Marc’O, et ses comédiens… Jean Eustache avait fait le montage des Idoles, mais aussi du documentaire Jean Renoir le patron, que je réalisais en 67 pour la série Cinéastes de notre temps. Je me souviens de longues discussions que nous avions sur la question du vrai et du faux. Il soutenait que le principe de base du cinéma devait être la réalité, et plus encore, la vérité. Ce à quoi je lui opposais qu’il n’y avait pas d’autre vérité que la fiction. D’une certaine façon, L’amour fou est un film de fiction par rapport auquel il a proposé le film de vérité : La maman et la putain. Le film est une autobiographie directe, tous les personnages à l’écran étaient littéralement des personnes que je connaissais à l’époque… » Si L’amour fou est une œuvre majeure sur le théâtre au cinéma, on peut ajouter dans cette liste, une autre œuvre de Jacques Rivette, Va savoir qu’il tourne en 2001 avec, en tête d’affiche, Jeanne Balibar et Sergio Castellitto. A travers les représentations de Comme tu me veux de Luigi Pirandello, en italien, et les correspondances entre théâtre et réalité, le film se décompose en une série d’histoires tendres et drôles. Les retrouvailles improbables de deux amants séparés, la quête d’un manuscrit perdu de Goldoni, une thèse sur les fibules croise le destin d’êtres aux limites des amours incestueuses ou de comportements délictueux… (Potemkine)
Hiruko GoblinHIRUKO THE GOBLIN
Un professeur de lycée et son élève disparaissent mystérieusement pendant les vacances d’été. Avant de s’évaporer dans la nature, M. Yabe avait contacté Reijiro Hieda, archéologue aux méthodes excentriques, pour lui faire part d’une étrange découverte qu’il venait de faire. Le scientifique débarque alors dans le village et part à la recherche de son ami aux côtés du jeune Masao, le fils du professeur. Ensemble, l’improbable duo va découvrir que le lycée se trouve au-dessus d’un ancien tumulus qui pourrait bien être une porte souterraine de l’enfer… Deux ans après la bombe cyberpunk Tetsuo, le cinéaste japonais Shinya Tsukamoto est de retour, en 1991, avec ce deuxième film adapté de l’œuvre du mangaka Daijiro Morohoshi. Relecture singulière et ludique du cinéma de fantômes japonais, Hiruko the Goblin mêle, quelque part entre Les Goonies et Evil Dead, terreur gore et humour surréaliste à grand renfort d’effets spéciaux inventifs. Le réalisateur dépeint ici une nature magnifiée, presque contemplative, à la manière d’une épouvante pastorale. Un film à découvrir pour la première fois en Blu-ray dans sa version restaurée et dont son auteur a dit : « J’ai voulu entraîner les spectateurs sur des montagnes russes. » De nombreux suppléments complètent cette sortie. On y trouve une présentation du film par Jean-Pierre Dionnet, deux entretiens avec le cinéaste qui parle, d’une part, de son expérience avec les studios et évoque, d’autre part, cette œuvre à part dans sa filmographie, influencée par les séries shonen de sa jeunesse. Responsable des effets spéciaux et du maquillage, Takashi Oda discute de sa collaboration avec Shinya Tsukamoto et de la fabrication des robots. Enfin, on voit Takashi Oda à l’œuvre sur les créatures Hiruko-qui-marche et Hiruko-poisson. (Carlotta)
Alberto ExpressALBERTO EXPRESS
Alors que son épouse Juliette est sur le point d’accoucher, Alberto Capuano, Parisien originaire d’Italie, se souvient subitement qu’il a l’obligation d’éponger une dette colossale, contractée auprès de son père le jour de ses 15 ans. Suivant la tradition familiale, le jeune homme doit impérativement rembourser son géniteur de tout l’argent dépensé pour lui depuis sa naissance, sous peine de courir un grand danger. Contraint par l’arrivée imminente du bébé, Alberto saute dans le dernier train en partance pour Rome. Commence alors une course contre la montre… Après l’ambitieuse aventure de Harem (1985), son premier long-métrage avec Nastassja Kinski et Ben Kingsley, le réalisateur français Arthur Joffé se lance, pour sa seconde mise en scène, dans une exaltante relecture de la comédie à l’italienne. Avec une fougue délirante, le comédien italien Sergio Castellitto se lance à vive allure, entre Paris et Rome, sur la voie de son destin, comme pour contrer une malédiction insaisissable. Mélange rare d’audace et de fantaisie, à mi-chemin du réalisme et de l’absurde, Alberto Express est une fable onirique, dont la logique folle rappelle à la fois celle des cartoons et l’univers magique d’un Fellini sans oublier Charlie Chaplin auquel, au détour d’un plan, une affiche rend hommage. Un film à découvrir pour la première fois en Blu-ray dans une splendide restauration 4K. Avec une belle liberté et même une joyeuse immoralité, Sergio Castellitto mène cette farandole absurde et drôle, entouré de Nino Manfredi, Marie Trintignant, Jeanne Moreau, Michel Aumont, Dominique Pinon et Thomas Langmann en Alberto adolescent. Le film est accompagné, dans les suppléments, de deux courts-métrages restaurés 4K d’Arthur Joffé : La découverte (1980, 17 mn) qui met en scène un peintre en bâtiment qui se lance à la poursuite d’une immense photo de New York à travers tout Paris et Merlin ou le cours de l’or (1982, 18 mn. Palme d’or du court-métrage à Cannes 1982 ) qui raconte l’histoire de deux passions qui cohabitent et s’opposent. Celle que nourrit une vieille dame pour Merlin, un enchanteur à la queue noire, et celle que nourrit un petit bonhomme pour le précieux métal… (Carlotta)
Classe Tous RisquesCLASSE TOUS RISQUES
Condamné à mort par contumace et recherché par la police, le gangster Abel Davos s’est réfugié en Italie avec sa femme Thérèse et leurs deux enfants. Il réussit, avec son complice Raymond, un hold-up à Milan mais les deux compères sont vite pourchassés, et décident de rentrer clandestinement en France. Le petit groupe débarque sur une plage déserte de Menton, mais deux douaniers les surprennent. S’ensuit une fusillade, au cours de laquelle Thérèse et Raymond sont tués. Resté seul avec ses enfants, Abel fait appel à ses amis de Paris, Riton et Fargier, et leur demande de venir les chercher à Nice. Ceux-ci ne pouvant venir eux-mêmes, lui envoient un homme sûr, Éric Stark, au volant d’une ambulance. Davos se lie d’amitié avec Éric qui le cache dans une chambre de bonne dans son immeuble. En 1960, Claude Sautet réalise, avec l’adaptation du roman éponyme de José Giovanni, son premier long-métrage qui s’inspire des dernières années de la cavale d’Abel Danos, devenu Abel Davos dans le film. Né en 1904, Abel Danos, gangster et membre du Milieu parisien, fut l’un des plus sauvages tortionnaires de la Carlingue, la Gestapo française pendant la dernière guerre. Classe tous risques est né de la rencontre entre Lino Ventura et Claude Sautet. En 1955, Sautet a tourné Bonjour sourire mais il ne le considère pas comme son premier film personnel. Il retourne alors à son travail d’assistant réalisateur tout en oeuvrant comme script doctor. Il travaille sur Le fauve est lâché de Maurice Labro. De fréquents désaccords entre le cinéaste et Lino Ventura pousse Labro à quitter le tournage. Sautet, qui s’est rapproché de Ventura, achèvera le film. Jacques Becker qui a signé Touchez pas au grisbi (1954) dans lequel débute Ventura, conseille à l’acteur de poursuivre sa collaboration avec Sautet. Lino Ventura fera du gangster traqué qui tient à rester un bon père de famille, un beau personnage tragique. A ses côtés, dans le rôle du sympathique et généreux Eric Stark, apparaît un quasi-débutant : Jean-Paul Belmondo. (Coin de mire Cinéma)
Dumb MoneyDUMB MONEY
Créée en 1991, la chaîne de magasins américains GameStop est en grande difficulté à la fin des années 2010. En raison d’importantes pertes financières, de nombreux points de vente ferment. L’année 2020 marque un tournant et l’entreprise fonce vers la faillite. Les fonds d’investissements prévoient alors une banqueroute de l’enseigne. Wall Street panique. Les banques tremblent. L’élite de la finance a des sueurs froides. Alors qu’il est annoncé par des experts boursiers que l’action GameStop va chuter à 20 dollars, de nombreux jeunes opérateurs de marché décident de soutenir GameStop et de contrer cette chute. Via le forum WallStreetBets, ils s’unissent et lancent une liquidation forcée des positions courtes. Connu pour avoir réalisé, en 2017, Moi, Tonya, faux documentaire sur l’histoire vraie de l’affaire Harding-Kerrigan qui a opposé deux patineuses artistiques américaines en 1994, Craig Gillepsie raconte, ici, une histoire vraie qui a affolé Wall Street, faisant s’arracher les cheveux aux dirigeants des Hedge Funds qui voyaient leurs milliards fondre comme neige au soleil. Tout cela parce que de petits actionnaires, emmenés par un geek surnommé Roaring Kitty, ont misé sur des magasins de jeux vidéo en chute libre. Avec un rythme soutenu et un ton volontiers grinçant, ce « thriller » boursier se présente comme une manière d’affrontement entre David et Goliath dans l’univers de la grande finance. Robin des Bois à Wall Street ! (Metropolitan)
Peur PrimalePEUR PRIMALE
Ancien procureur de Chicago, Martin Vail est devenu un avocat très médiatisé. Pour assurer la défense de ses clients, l’avocat vedette du barreau de la ville est aidé par son assistante Naomi Chance et par le détective Tommy Goodman, un ancien policier. Après une grosse affaire où il a travaillé pour le criminel Joey Pinero, il décide de prendre gratuitement la défense d’Aaron Stampler. Ce jeune homme venu du Kentucky est accusé d’avoir sauvagement assassiné à coups de couteau l’archevêque Rushman, une éminente personnalité de la ville. Stampler l’aurait tué après lui avoir tranché la main et écorché les paupières. Arrêté par la police après avoir fui le lieu du crime, Stampler explique à Vail qu’il a de fréquentes « absences » et ne se souvient que de s’être trouvé auprès du cadavre, le couteau ensanglanté à la main, et d’avoir aperçu un homme prendre la fuite. Sous la présidence de la juge Miriam Shoat, le procès débute, et l’avocat affronte la procureure Janet Venable, qui fut autrefois son assistante et sa petite amie… Producteur de séries TV comme New York police blues ou Hill street blues, Gregory Hoblit démarre sa carrière sur le grand écran en réalisant ce Primal Fear, très efficace thriller qui s’appuie sur un best-seller de l’ancien journaliste William Diehl qui ouvre la trilogie Martin Vail. Entouré de Richard Gere (Martin Vail), Laura Linney (Janet Venable), Frances McDormand (la psychiatre Molly Arrington), Edward Norton, déjà acteur confirmé au théâtre, fait ses grands débuts au cinéma avec un jeune schizophrène bègue atteint du trouble de la personnalité multiple… (Paramount)
Pistolet RingoUN PISTOLET POUR RINGO
Dans la ville de Quemado, après avoir cambriolé une banque, des hors-la-loi mexicains, commandés par le sinistre Sancho, se réfugient dans une hacienda. Les notables de la ville font appel à Ringo, tueur d’élite sans scrupules, pour régler le problème. Ringo parvient à gagner la confiance des bandits, et à s’introduire dans leur repaire où ils tiennent en otage, le major Clyde et sa fille Ruby. Par mille ruses, Ringo viendra à bout de sa mission. Après quelques timides films espagnols ou allemands, Sergio Leone lance le phénomène du western européen en 1964. Les meilleurs artisans du cinéma bis, dont, ici, l’Italien Duccio Tessari, puisent alors dans leur mythologie, l’héritage du baroque ou de l’opéra pour réaliser pas moins de 700 films du genre avec des pistoleros pouilleux, des péons révolutionnaires, des justiciers idéalistes et des belles de l’Ouest… Avec Un pistolet pour Ringo -que Quentin Tarantino a classé 12e dans sa liste des vingt meilleurs westerns spaghetti- Tessari (1926-1994) mêle un brin de comédie au western et donne le rôle de Ringo à Giuliano Gemma qui venait d’incarner le bandit Calembredaine dans Angélique, marquise des anges. Enfin, c’est Ennio Morricone qui signe la musique. La même année 1965, le cinéaste génois donnera une suite à son film avec Le retour de Ringo. Dans les bonus, on trouve un entretien avec Giuliano Gemma et Lorella De Luca, l’interprète de Ruby et épouse du réalisateur à la ville… (Artus Films)
Saints SinnersSAINTS & SINNERS
L’Irlande de 1974 est un pays embourbé dans une guerre civile aux conséquences funestes. Bien loin de ce conflit sanglant dans un village côtier isolé du nord, Finbar Murphy, un tueur à gages tout juste retraité, se voit pourchassé par un trio de terroristes en quête de vengeance. Commence un redoutable jeu du chat et de la souris au cours duquel Murphy va devoir faire face à ces démons pour pouvoir enfin tourner la page sur ce chapitre de sa vie. Après une carrière marquée par une suite de films d’action et d’aventures, le Britannique Liam Neeson atteint son sommet en incarnant Oskar Schindler devant la caméra de Steven Spielberg dans La liste de Schindler (1993). On le voit ensuite aussi bien dans Michael Collins que dans Gangs of New York de Scorsese, dans Stars Wars, épisode 1 : La menace fantôme ou encore dans la comédie sentimentale Love Actually. C’est avec Taken (2008) que Neeson s’engage dans la voie du type revenu de tout qui, en quête de rédemption, fait sévèrement le ménage chez les pires malfrats. Revenu sur sa terre natale (il est né en 1952 à Ballymena en Irlande du Nord) , Liam Neeson se glisse à nouveau dans la peau d’un ancien tueur qui s’est forgé une nouvelle identité et s’occupe paisiblement de son pub. Dans les superbes décors champêtres de l’Irlande, Neeson se sort sans peine d’affaire, entouré d’excellents comédiens irlandais comme Ciarán Hinds, Jack Gleeson, Colm Meaney ou Kerry Condon en terroriste froide et violente. (Metropolitan)
Rats AttaquentLES RATS ATTAQUENT
A Toronto, après avoir mangé du maïs contaminé, des rats se transforment en prédateurs féroces et se mettent à attaquer les humains, tout d’abord des personnes isolées, puis les spectateurs d’une salle de cinéma et les passagers d’une rame de métro. Kelly Leonard, inspectrice au département de la santé, et Paul Harris, professeur, vont tenter d’arrêter cette invasion sans précédent. Dans l’imaginaire collectif, les rats ont toujours fait peur parce que ces mal-aimés sont vécus comme vecteurs de dangereuses maladies, nuisibles, envahissants… On peut imaginer alors la panique si ces rongeurs prenaient la taille de petits chiens et se mettaient à attaquer tous les humains sur leur passage ? Suite à l’immense succès des Dents de la mer en 1975, les films d’agressions animales vont proliférer sur les écrans des années 80. Ainsi, en 1981, Robert Clouse (réalisateur d’Opération Dragon, l’inoubliable chef-d’œuvre d’arts martiaux avec Bruce Lee) met en scène, en adaptant le best-seller de James Herbert et sur un scénario de Chales Eglee, futur scénariste et producteur de la série The Walking Dead, des rats géants boostés aux stéroïdes. Film gore à souhait, avec une belle créativité dans les trucages et les effets et n’hésitant pas à aller dans le politiquement incorrect (les bestioles s’en prennent à un bébé), Les rats attaquent alterne aussi les scènes de romance et les scènes de terreur avec ses mutants dévoreurs de chair fraîche. Présenté dans un combo Blu-ray + dvd, le film est accompagné du livret (24 pages) Dents dures et poings serrés conçu par Marc Toullec. (Rimini éditions)

DE RARES OZU, UNE ROMANCE POLITIQUE ET LE MALAISE DE TARA  

Coffret OzuOZU – 6 FILMS RARES OU INEDITS
Cinéaste de la famille et du temps qui passe (Gilles Deleuze note que le réalisateur « réussit à rendre visibles et sonores le temps et la pensée »), Yasujiro Ozu raconta le vingtième siècle de manière à la fois minimaliste et spectaculaire, apportant sa contribution au septième art pour l’éternité. L’œuvre d’Ozu reste cependant inconnue en France jusqu’en 1978, soit quinze ans après sa mort. Trois films sortent alors sur les écrans français : Voyage à Tokyo, Le Goût du saké et Fin d’automne. À l’occasion des 120 ans de sa naissance et des 60 ans de sa disparition, six films rares ou inédits sont présentés pour la première fois dans un coffret de quatre Blu-ray dans leur nouvelle restauration 4K. Trois de ces films sont incarnés par la grande actrice, et bientôt réalisatrice, Kinuyo Tanaka dont on a pu découvrir l’oeuvre, l’an dernier, dans un beau coffret, déjà chez Carlotta. Du polar muet à la comédie nostalgique en passant par le drame conjugal, voici six œuvres qui permettent de comprendre la portée universelle du cinéaste japonais le plus intemporel. Femmes et voyous (1933) raconte la double vie de Tokiko, dactylographe le jour, qui traîne avec une bande de gangsters le soir. Il était un père (1942) met en scène les tourments du professeur Horikawa dont l’un des étudiants s’est noyé lors d’un voyage de classe. Récit d’un propriétaire (1947) suit un jeune sans-logis dans le Tokyo de l’immédiat après-guerre, Il sera confié à une veuve acariâtre qui n’a jamais aimé les enfants… Dans Une femme dans le vent (1948), Tokiko vit seule avec son jeune fils en attendant le retour de son mari sous les drapeaux. Elle survit tant bien que mal. Mais son enfant tombe gravement malade, elle est contrainte de se prostituer… Les sœurs Munakata (1950) gravite autour de la famille tiraillée entre tradition et modernité à travers deux sœurs que tout sépare… Enfin, avec Dernier Caprice (1961), son avant-dernier film, Ozu suit Manbei Kohayagawa, patron d’une petite brasserie de saké au bord de la faillite. Le vieil homme vit entouré de ses trois filles. Manbei trouve du réconfort auprès de son ancienne maîtresse chez qui il se rend en cachette. Mais la santé du patriarche commence à décliner… Parmi les multiples suppléments, outre une livret (80 p.) rédigé par Pascal-Alex Vincent, on trouve Quand la cloche de la jeunesse a sonné (1963), un film TV inédit réalisé par Tsuneo Hatanaka et coscénarisé par Ton Satomi et Yasujiro Ozu. M. Yamaguchi et M. Ogawa apprécient beaucoup la compagnie de Chizuru, la fille de leur amour de jeunesse. Rétive à l’idée de se marier, la jeune femme décide de partir quelques jours à Tokyo en compagnie de ses deux pères de substitution… « Si l’œuvre du cinéaste japonais nous accompagne comme une présence familière, elle reste toujours à découvrir » écrivent Les Cahiers du cinéma. On ne saurait mieux dire. (Carlotta)
Fete ContinueET LA FETE CONTINUE !
« Il faut affirmer sans cesse que rien n’est fini. Que tout commence… » Ce sont les derniers mots du 23e et dernier film en date de Robert Guédiguian. Ces mots prononcés face à la mer, à Marseille, ce sont ceux de Rosa, infirmière à l’hôpital de la Timone et proche de la retraite. Une militante qui se démène pour regrouper les militants de gauche et écologistes pour les prochaines élections municipales. Tout en s’occupant sans cesse de sa tribu, en l’occurrence ses fils Sarkis et Minas, Tonio son frère, chauffeur de taxi communiste mais aussi d’Alice, le bel amour de Sarkis, une comédienne qui milite avec les personnes du quartier qui ont été touchées par l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne… De fait, le réalisateur de Marius et Jeannette a donné, pour toile de fond de son film, le drame de la rue d’Aubagne qui a vu, le 5 novembre 2018, deux immeubles vétustes et insalubres s’effondrer, tuant huit personnes et provoquant l’indignation, la honte, la colère et la rage de la population. A travers ce film choral porté par six personnages principaux dont deux de femmes militantes appartenant à deux générations, Guédiguian poursuit tout à la fois sa célébration de sa ville natale (en filmant d’autres lieux marseillais que l’emblématique Estaque) et sa glorification des valeurs de générosité et d’humanisme. Comme il le fit, notamment dans Le voyage en Arménie (2006), le cinéaste installe son récit dans le cadre de l’importante diaspora arménienne de la cité phocéenne. Ainsi Minas et Sarkis, profondément attachés à leurs racines, veulent soutenir l’Arménie en guerre contre l’Azerbaïdjan. Le second rêve d’ailleurs d’une famille nombreuse, qu’il voit comme une revanche sur le génocide arménien. Et la fête continue ! vogue, aux accents de Schubert, Mozart et du Emmenez-moi de Charles Aznavour, entre une réflexion politique avec l’investissement à gauche d’une Rosa qui pourrait se retrouver tête de liste aux élections municipales et une douce chronique amoureuse. Rosa tombe en effet follement amoureuse d’Henri, le père d’Alice, venu vivre au bord de la Méditerranée pour se rapprocher de sa fille. Evidemment, on retrouve ici toute la bande de Guédiguian avec, en tête, Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin et Gérard Meylan entourés de Robinson Stevenin, Lola Naymark ou Grégoire Leprince-Ringuet. (Diaphana)
How To Have SexHOW TO HAVE SEX
Afin de célébrer la fin de leurs années lycée, Tara, Skye et Em, trois amies anglaises, décident de s’offrir leur première escapade entre copines dans la station balnéaire prisée d’Heraklion en Grèce. Leur plan ? Enchaîner les fêtes, les soirées bien arrosées et les nuits blanches en compagnie de colocs anglais rencontrés dès leur arrivée. Pour la jeune Tara, ce voyage de tous les excès a la saveur des premières fois, mais elle se retrouve rapidement dépassée. Confrontée à l’effervescence collective, elle se demande si elle est réellement libre d’accepter ou de refuser chaque nouvelle expérience qui se présente à elle… Pour son premier long-métrage en tant que réalisatrice, la Britannique Molly Manning Walker, également directrice de la photographie, emporte le spectateur dans l’univers de ce que les Américains nomment le Spring Break (relâchement de printemps en v.f.), cette semaine de vacances accordée aux étudiants nord-américains qui la passent, souvent à Cancun au Mexique, à se mettre la tête à l’envers entre alcool à gogo, drogue et filles dénudées. De Nightmare Beach à Piranha 3D en passant par le trash Spring Breakers d’Harmony Korine, le cinéma a souvent tourné sa caméra sur ces débordements festifs. How to have Sex (primé à Un Certain regard à Cannes) semble s’inscrire aussi dans cette débauche étudiante sur fond de piscine bondée, de sable chaud la nuit sur la plage et de picole sans discontinuer, jusqu’à en vomir tripes et boyaux. Mais la cinéaste retourne habilement le propos. L’aventure des trois copines délurées prend, peu à peu, un tour plus glauque à l’image de ces plans larges et vides sur une cité balnéaire dévastée et jonchée de déchets. Car ce qui intéresse Molly Manning Walker, sous les faux airs de teen movie de son film, c’est ce que deviennent ses jeunes personnages et essentiellement Tara (Mia McKenna-Bruce) dans cet univers. Car Tara est bien venue en Grèce avec l’idée d’en finir avec sa virginité et ses copines ne se privent pas de la charrier là-dessus. Et si Badger, le voisin de chambre à l’hôtel, allait être celui-là. En fait, ce sera son copain Paddy qui entraînera Tara sur la plage. Mais voilà la jeune fille n’a pas envie de se mettre du sable partout. Qu’importe. Et Paddy récidivera le lendemain en se glissant dans le lit d’une Tara qui cuve plus son malaise que la vodka. Sous ses dehors colorés et sonores, How to have Sex est un regard grave sur la question du consentement. A Em qui lui demande comment c’était, Tara répondra, tristement, « J’étais endormie ». (Condor)
Tokyo-GaTOKYO-GA
Printemps 1983. Vingt ans après la disparition du grand réalisateur Yasujiro Ozu (1903-1963), Wim Wenders décide de partir à Tokyo sur les traces de son maître de cinéma. Alors que ce dernier a documenté à travers ses films les métamorphoses de la vie au Japon de la fin des années 1920 au début de la décennie 1960, reste-t-il encore dans la capitale des images de son univers cinématographique ? Quarante ans avant Perfect Days, sa nouvelle aventure tokyoïte, Wim Wenders déambule de jour comme de nuit à travers une ville frénétique, s’aventure dans des salles de pachinko, dans des stands d’entrainement de golf, dans une fabrique de faux aliments en cire, plus vrais que nature, dans des cimetières où les enfants jouent au base-ball ou dans des parcs où des adolescents dansent le rock. Sur son chemin, il croise aussi la route de deux fidèles de l’univers d’Ozu, l’acteur Chishu Ryu (il dit « J’étais devenu un couleur sur sa palette ») et le directeur de la photographie Yuharu Atsuta. Éclairé par les réflexions et impressions de son réalisateur, Tokyo-Ga, qui s’ouvre et s’achève sur un extrait de Voyage à Tokyo (1953), pose un regard nostalgique sur le caractère éphémère des choses et la beauté si fragile du cinéma. Dans ce «  journal filmé » aussi passionnant que sensible (pour la première fois en Blu-ray dans sa nouvelle restauration 2K), le réalisateur de Paris Texas s’intéresse aux traces d’Ozu dans le Japon du début des années 80 et constate que sa mémoire est partout. Dans les suppléments, on trouve un entretien avec Wenders (43 mn) dans lequel le réalisateur, après être revenu en détail sur le tournage de son documentaire sorti en 1985, raconte sa rencontre manquée avec l’actrice Setsuko Hara, son nouveau film Perfect Days et sa filiation avec Ozu, ainsi que le lien particulier qu’entretient le cinéma avec les lieux. (Carlotta)
Notre CorpsNOTRE CORPS
Comment une femme vit-elle une IVG, l’annonce d’un cancer du sein, le recours à la PMA ? Claire Simon plonge, ici, avec un regard intense dans le quotidien d’un service de gynécologie-obstétrique d’un hôpital parisien, où les destins de femmes se croisent. Premières consultations gynécologiques, interventions chirurgicales, soins palliatifs, transitions de genre, accouchements… La réalisatrice filme les patientes et leur intimité, et recueille leurs histoires, leurs espoirs, leurs désirs mais aussi leurs peurs. Avec pour objectif de filmer le corps des femmes, de mettre en avant ce qu’elles traversent tout au long de leur vie gynécologique et de montrer que leurs corps souffrent davantage que celui des hommes. « J’ai eu l’occasion, dit Claire Simon, de filmer à l’hôpital l’épopée des corps féminins, dans leur diversité, leur singularité, leur beauté tout au long des étapes sur le chemin de la vie. Un parcours de désirs, de peurs, de luttes et d’histoires uniques que chacune est seule à éprouver. Un jour j’ai dû passer devant la caméra. » En effet, ce documentaire intimiste plein d’empathie et de dignité devient d’autant plus émouvant lorsque la réalisatrice elle-même se retrouve soudainement propulsée dans son film : alors qu’elle est en plein tournage, Claire Simon apprend en effet qu’elle a un cancer du sein. De visiteuse, elle devient patiente et son combat victorieux contre la maladie ajoute un supplément d’âme à un film déjà bouleversant d’humanité. La cinéaste parle des femmes comme de « combattantes » et souligne combien ces pathologies gynécologiques pèsent sur les vies, les amours, les désirs, les espoirs… (Blaq Out)
Vincent Doit MourirVINCENT DOIT MOURIR
La vie tranquille de Vincent Borel bascule lorsqu’il devient la cible d’attaques meurtrières, sans motif apparent. Contraint de fuir et de réinventer sa vie à mesure que ces agressions s’intensifient, cet homme ordinaire est plongé dans une lutte pour sa survie. Présenté avec succès en séance spéciale à la Semaine de la critique au Festival de Cannes 2023, le premier long-métrage de Stéphane Castang (coécrit avec Mathieu Naert) est un film qui frappe immédiatement par la force de son point de départ. Au spectateur, le cinéaste suggère la question : Que se passerait-il si vous étiez soudain victime de la violence la plus extrême ? Or le personnage de Vincent est justement victime de cette violence à la fois banale et inexplicable. Stéphane Castang, qui ne lésine pas sur les scènes d’action, donne un vrai film de genre, pas dépourvu de quelques scories propres au premier film, qui associe le thriller et le fantastique autour d’un parfait anti-héros auquel on peut sans peine s’identifier. C’est le toujours excellent Karim Leklou (vu dans BAC Nord, Goutte d’Or ou Pour la France) qui se glisse brillamment dans la peau de ce monsieur-tout-le-monde qui se met à déclencher bien malgré lui des crises de folie meurtrière chez les gens qu’il croise. Heureusement pour lui, il croisera bientôt la route de Margaux, interprétée par Vimala Pons, qui semble immunisée contre ce mal étrange. Sur un monde en proie à une violence folle, un film solide et efficace où tout est dans le regard… (Capricci)
Smith TaciturneSMITH LE TACITURNE
Employé par une puissante compagnie de chemin de fer, le détective Luke Smith poursuit les trois frères Barton, des pilleurs de train. Si ceux-ci lui échappent une première fois, il parvient à leur tendre un piège et à en abattre deux. Lui-même blessé, Smith bénéficie des soins de Murray Sinclair, un ami d’enfance marié à la douce Marian, la femme qu’il aima bien des années plus tôt. A peine s’est-il débarrassé du dernier des frères Barton, que Smith soupçonne Sinclair de tremper dans des affaires louches, probablement en lien avec Rebstock, le puissant protecteur des Barton et l’instigateur des attaques des convois ferroviaires… Le déraillement d’un train et l’éviction de Murray, accusé de pillage du fret, retardent son départ. Luke est une nouvelle fois habilité à résoudre le mystère du déraillement et, dans le même temps, va essayer de faire réintégrer son ami à son poste… Le Britannique Leslie Fenton (1902-1978) n’est sans doute pas le plus fameux réalisateur de westerns mais il mérite la reconnaissance, ne serait-ce que pour avoir réussi, en 1948, avec Whispering Smith, une vraie perle du genre portée par des extérieurs bien filmés, une solide interprétation (Robert Preston, Brenda Marshall, Donald Crisp) et une action rapidement menée. Et puis, il y a évidemment, dans le rôle de Luke Smith, le policier du rail, surnommé Whispering Smith pour la manière qu’il a de s’exprimer toujours calmement, le westernien Alan Ladd dans le rôle d’un homme droit tiraillé entre son devoir et son amitié pour Murray. A noter que le personnage du détective privé Luke Smith a réellement existé… Dans les suppléments, on trouve un documentaire sur Alan Ladd et une portrait de l’acteur par Jean-Claude Missiaen. (Sidonis Calysta)
La TresseLA TRESSE
Dans un village de l’Uttar Pradesh en Inde, Smita, une Intouchable, rêve de voir sa fille Lalita échapper à sa condition misérable et entrer à l’école. A Palerme, Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée. A Montréal, Sarah, avocate réputée et grande travailleuse, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est malade. Trois vies, trois femmes, trois continents. Trois combats à mener. Si elles ne se connaissent pas, Smita, Giulia et Sarah sont liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier. Comédienne, récemment, chez Cédric Kahn et Yvan Attal, Laetitia Colombani réalise, ici, son troisième long-métrage après A la folie… pas du tout (2002) et Mes stars et moi (2008) et adapte avec grand bonheur, son (premier) roman éponyme paru en 2017 chez Grasset et lu par plus de cinq millions de lecteurs. La cinéaste raconte tour à tour les parcours de ces trois femmes qui ne se rencontrent jamais tout en étant attentive à ce qui va pouvoir les relier. Si la mise en scène est dynamique, le ton est plutôt du côté du conte allégorique dans cette histoire de rapports humains traversés par la détresse, les combats, la solidarité et l’espérance. L’Américaine Kim Raver (pour l’épisode canadien), l’Italienne Fotini Peluso et l’Indienne Mia Maelzer participent de la réussite du film. (M6)
Comme Par MagieCOMME PAR MAGIE
Jeune magicien en pleine ascension, Victor, devenu père et veuf le même jour, élève, depuis, seul sa fille Lison. C’est sans compter Jacques, son fantasque beau-père, qui se mêle contre son avis de l’éducation de la petite. Un tandem improbable qui aura pour arbitre Nina, l’amie d’enfance de Victor, une jeune femme au caractère bien trempé. Mais Victor est décidé à ne pas laisser sa profession de magicien prendre le dessus sur son rôle de père qui l’emmène dans une tournée lointaine… En 2004, Christophe Barratier signe, avec Les choristes, son premier long-métrage et frappe très fort puisque le film réunit 8,5 millions de spectateurs dans les salles françaises. Autour des thèmes de la filiation et de l’éducation, déjà des ingrédients des Choristes, le cinéaste s’applique à mettre en scène de jolies émotions même si les ficelles du scénario sont un peu épaisses et les effets sonores trop appuyés. Si Kev Adams (Victor) fait le job, on note plus volontiers la prestation de Claire Chust (Nina) et, évidemment, Gérard Jugnot. Celui qui fut Clément, le surveillant passionné de chant choral dans Les choristes, est, ici, un grand-père aussi fantasque que touchant. (Orange Studio)
Nuits Blanches PetersbourgLES NUITS BLANCHES DE SAINT-PETERSBOURG
Au début du 20e siècle, à Saint-Pétersbourg, le haut fonctionnaire Borowsky recueille son ami Serge Pozdnycheff, jeune fêtard ruiné pour avoir mené une vie de débauche. Serge séduit Sonia, l’épouse de Borowsky, ce qui pousse ce dernier au suicide. Traumatisé par ce drame et pris de remords, Serge s’installe dans le domaine familial avec sa mère, à la campagne. Il fait la connaissance d’Hélène Voronine et l’épouse. Quelques années plus tard, le couple est installé à Saint-Pétersbourg avec Vassia, leur jeune fils. Par l’intermédiaire de Katia, sa jeune sœur, Hélène fréquente les salons mondains et rencontre ainsi le violoniste virtuose Toukatchewsky… En proie à une jalousie maladive, Serge tente d’assassiner sa femme et le musicien qu’il croit être l’amant d’Hélène. Il sera condamné mais sa femme, qui l’a toujours aimé, l’attendra à son retour de prison. En 1944, Jean Dréville fut récompensé du prestigieux prix Louis Delluc pour Les casse-pieds avec Noël-Noël. Juste avant la guerre, en 1938, il mettait en scène, dans les studios de Joinville, cette adaptation de La sonate à Kreutzer de Léon Tolstoï, considérée comme l’une des meilleures parmi la dizaine consacrée au roman de l’écrivain russe. Ce film, qui sort dans une bonne édition Blu-ray, est interprété par Pierre Renoir (Borowsky) mais surtout Jean Yonnel, sociétaire du Français, dans le rôle de Pozdnycheff et Gaby Morlay en Hélène Voronine. Celle qui fit, pendant l’Occupation, pleurer la France avec le dramatique Voile bleu (1942) est un peu mal à l’aise avec son personnage de jeune fille, elle qui a alors déjà 45 ans… (Gaumont)
Moi Hommes 40 ansMOI ET LES HOMMES DE QUARANTE ANS
Lassée des garçons de son âge, Caroline, une jeune et ravissante manucure décide de ne fréquenter que des hommes âgés de quarante ans. La charmante donzelle veut s’amuser, connaître d’autres choses qu’avec des garçons de son âge, qu’elle juge évidemment immatures… Mais, évidemment, les hommes qu’elle considère comme adultes, ont, eux, des idées peu catholiques derrière la tête… Bien sûr, Caroline renoncera à la frivolité et rentrera dans le rang. En 1965, Jack Pinoteau, connu pour avoir mis en scène Le triporteur (1957) d’après René Fallet et avec Darry Cowl, réalise son dernier film pour le grand écran avant de travailler pour la télévision. Il signe une comédie légère sur des dialogues de Philippe Bouvard et une musique de Claude Bolling dont la structure ressemble un peu à celle d’un film à sketches puisque la pétillante Caroline va rencontrer différents personnages masculins. En l’occurrence Paul Meurisse, Michel Galabru et Michel Serrault qui tournent autour de la blonde et souriante Dany Saval. Ce film qui sort dans une nouvelle présentation Blu-ray est léger à souhait dans sa manière de brocarder les relations hommes-femmes. On est alors au mitan des années soixante et MeToo est encore bien loin. (Gaumont)
Temps PaysansLE TEMPS DES PAYSANS
L’histoire de la paysannerie européenne débute dans les ruines de Rome. Avec la disparition de l’empire et des grandes villes, la majorité de la population se retrouve paysanne. Libérés de l’impôt, ces nouveaux paysans, plus autonomes qu’ils ne le seront jamais, ne produisent qu’à la mesure de leurs besoins. Mais à partir du IXe siècle, les élites guerrières imposent le retour de la domination, des taxes et des corvées, tandis que l’Église traque les anciens cultes ruraux. Voici venu le temps de la féodalité et de l’oppression. Privés de récits, les paysans européens, écrasés, déconsidérés, ont longtemps vécu dans le silence et l’obscurité, ne laissant, durant des siècles, aucun témoignage direct. Après Le temps des ouvriers (2020), le documentariste français Stan Neumann retrace, en quatre volets, l’histoire longue d’une catégorie méprisée et exploitée à l’heure où nous réalisons la fragilité de notre civilisation urbaine. Ce documentaire fleuve, narré par Catherine Ringer, s’appuie sur une myriade d’illustrations : iconographie religieuse, gravures, toiles, cartes postales, fables ancestrales, affiches politiques, chansons populaires, perles du cinéma en noir et blanc… Jouant avec les codes narratifs, Neumann opère, tout au long de ces quatre volets (Age d’or, âge de fer – Désastres et révoltes – Vers l’émancipation et Paysans, envers et contre tout) des allers-retours réguliers entre la grande histoire de la paysannerie et des interviews d’agriculteurs en activité, qu’ils soient bretons, italiens, roumains… Mêlant archives et séquences d’animation, ce voyage dans le temps et sur l’ensemble du continent offre aussi une plongée dans l’histoire politique, économique et coloniale de l’Europe. (Arte)
Maitre IlesLE MAITRE DES ILES
L’archipel d’Hawaï dans les années 1880. Descendant d’une riche famille américaine de planteurs, Whip Hoxworth hérite de terres après la mort de son père. Il va découvrir de l’eau et développer la culture de l’ananas. Avant de devenir le plus gros planteur d’Hawaï, Whip faisait du commerce avec des Chinois. Alors qu’il transportait, en tant que capitaine du cargo de commerce Le Carthaginois, de la main d’oeuvre chinoise jusqu’à Hawaï, cet aventurier avait découvert qu’une femme, Nyuk Tsin, voyageait clandestinement avec son mari et devait être vendue à une maison close d’Honolulu. Afin de les sauver, Hoxworth les engage comme domestiques dans sa demeure. Les années passant, Nyuk et son mari Mun deviennent parents de cinq enfants, tandis que leur patron développe, grâce au travail acharné de ses ouvriers chinois, un empire commercial. Descendante d’une famille noble de Hawaï, Purity, le femme de Whip, lui donne Noël, un fils qui sera élevé par Nyuk Tsin et Mun. Noël travaille au côté de son père et tombe amoureux de Mei Li, l’une des filles du couple chinois. Sachant son activité menacée par l’indépendance des îles, Hoxworth fomente une révolution de manière à ce que son territoire bénéficie du protectorat américain… En s’appuyant sur Hawaï, le roman de James Michener, l’Américain Tom Gries tourne, en 1970, cette aventure exotique dont le scénario se situe peu avant l’annexion pure et simple des îles Hawaï par les États-Unis. Charlton Heston qui venait d’être la vedette de La planète des singes (1968) et qui avait aussi été le héros du western Will Penny le solitaire du même Tom Gries, incarne ce parfait héros. Il est entouré par Géraldine Chaplin et John Phillip Law. Pour la première fois en dvd et Blu-ray. (Sidonis Calysta)
Chat CanariLE CHAT ET LE CANARI
À Glendiff, en Grande-Bretagne, le 27 septembre 1914, le riche et excentrique Cyrus West meurt dans son grand manoir. Vingt ans plus tard, Me Allison Crosby, notaire, est chargée de l’ouverture et de la divulgation du testament. Soudain une horloge se met à sonner. Miss Pleasant, la vieille gouvernante de West, s’inquiète. L’horloge était silencieuse depuis 20 ans… La notaire a donc convoqué les héritiers du défunt. Tout ce petit monde est réuni dans la grande salle à manger du château, à l’heure du dîner et Madame Crosby annonce que Cyrus West a laissé un message sous la forme d’un… film. Dans lequel le défunt salue une « bande de petites canailles ». Il s’avère que la jeune Annabelle, charmante créatrice de mode, est légataire universelle. Peu à peu, les invités disparaissent l’un après l’autre, froidement assassinés… Une atmosphère à la Agatha Christie, un petite touche de Cluedo pour cette histoire qui mêle le policier et le suspense. D’autant que l’inquiétant Hendricks les met en garde contre un malade qui se prend pour un chat. C’est Radley Metzger qui réalise en 1978 ce polar qui a, aujourd’hui, pris un petit coup de vieux mais qui se regarde encore avec le sourire. Metzger est connu pour être l’un des premiers réalisateurs de films de sexploitation puis de porno chic avec notamment, sous le pseudonyme d’Henry Paris, The Private Afternoon of Pamela Mann (1975) ou The Opening of Misty Beethoven (1976). Ici, c’est du cinéma classique qui fait la part belle à des comédiens anglo-saxons comme Edward Fox, Olivia Hussey, Peter McEnery, Wendy Hiller ou Honor Blackman qui fut, en 1964, la belle Pussy Galore dans Goldfinger ! (Rimini éditions)
Tiger CageTIGER CAGE – LA TRILOGIE
En quatre années, le cinéaste hongkongais Yen Woo-ping, spécialiste de la chorégraphie des scènes d’action au cinéma, notamment pour Matrix, Tigre et Dragon ou Kill Bill, mettait en scène trois Tiger Cage, désormais réunis dans un beau coffret. Une trilogie avec laquelle il introduit les arts martiaux dans le polar urbain. Dans Tiger Cage (La rançon des traitres – 1988), les policiers des Stups, sous la direction de l’inspecteur Hsiu, mettent sous les verrous un gang de de dealers. Mais leur chef Swatow réussit à s’échapper. Le lendemain, Hsiu est retrouvé mort. Ses collègues veulent le venger mais des flics sont également impliqués dans l’affaire… Dans Tiger Cage 2 (1990), l’inspecteur Dragon Yau, fraîchement divorcé, est blessé quand il tente de mettre fin à un hold-up. Accusé du crime avec Mandy Chang, l’avocate de son divorce, il se retrouve alors pourchassé par la police et les triades qui veulent mettre la main sur la main sur une mallette contenant des millions de dollars blanchis provenant du trafic de drogue. Enfin, avec Tiger Cage 3 (1991), on suit l’enquête de l’inspecteur James de la brigade financiière qui enquête sur Lee Siu-pong, soupçonné d’activités criminelles. Quand ce dernier se sent surveillé, il kidnappe Suki, la fiancée de James et tente d’assassiner le policier. Mais James survit et décide de se venger… Pas besoin de chercher midi à quatorze heures, voici du cinéma qui déménage avec du voyou à gogo, des flics à cran et du flingage à tous les coins de l’écran. Ce n’est pas du 7e art mais c’est bigrement efficace. (Metropolitan)

UN CAPITAINE AMOUREUX, UN PATRON DE PUB ET UN ATOMISTE PARANOIAQUE  

RemorquesREMORQUES
Capitaine du remorqueur Le Cyclone, André Laurent assiste avec son équipage à la noce d’un de ses marins, avant d’être appelé en urgence pour secourir les passagers d’un cargo en détresse. A bord, se trouve notamment Catherine, l’épouse du commandant. Alors que sa femme Yvonne lui dissimule sa maladie et le supplie de prendre sa retraite, André tombe follement amoureux de Catherine, avec laquelle il débute une liaison… Réalisateur de Remorques, Jean Grémillon est reconnu, par les historiens comme par la critique, comme l’un des maîtres du cinéma français entre le milieu des années 20 et les années soixante. Mis en chantier en juillet 1939, Remorques connut une production très accidentée. Le tournage commence en Bretagne pour une quinzaine de jours d’extérieurs. De retour à Paris, l’équipe reprend le travail en août 1939 aux studios de Billancourt pour des scènes d’intérieurs. Las, le 3 septembre 1939, tout s’arrête. La France entre en guerre. Grémillon est mobilisé. Tout comme Jean Gabin, l’interprète du capitaine Laurent. Le tournage reprendra brièvement en avril 1940 grâce à une permission exceptionnelle accordée au cinéaste et à l’acteur. A nouveau interrompu en juin 40, la dernière image de Remorques sera enregistrée début septembre 1941. Le film sort finalement fin septembre 1941 dans les salles françaises et connaît le succès ! Pourtant, malgré ces films et ces réussites, Grémillon fait figure de cinéaste « maudit », probablement victime de classifications hâtives et de malentendus tenaces. En fait, ce cinéaste contemporain de Jean Renoir, Marcel Carné ou Julien Duvivier, n’eut, entre 1937 et 1943, qu’une seule période faste où il réalisa cinq films : Gueule d’amour, Lumière d’été, Le ciel est à vous, L’étrange Monsieur Victor et évidemment Remorques que le cinéma français classa tout de même parmi ses chefs-d’œuvre. Dans un témoignage retrouvé par Bertrand Tavernier alors qu’il préparait son magnifique Voyage à travers le cinéma français, Charles Spaak, scénariste attitré et ami de Grémillon, disait : « Il était intelligent, cultivé, il savait écrire, peindre, composer de la musique. Il était beau, généreux, faisait très bien la cuisine, adorait la vie. Il avait tout pour réussir et il a eu une existence contrariée, sans arrêt marquée d’échecs. Cela venait un peu de son caractère : il aimait travailler avec les scénaristes, avec les acteurs, il était passionné par le montage. Malheureusement, il n’aimait pas les producteurs, et ils le lui ont toujours bien rendu ! » Avec Remorques, Grémillon donne une symphonie sur les thèmes du destin et de l’amour fou. Pour cela, il reforme le couple du Quai des brumes avec Jean Gabin (qui retrouve le réalisateur après Gueule d’amour) et Michèle Morgan, de nouveau amants tragiques. Et Grémillon excelle à mettre en scène avec la même intensité la violence des éléments naturels et celle des sentiments humains… (Carlotta)
The Old OakTHE OLD OAK
Sur la côte nord-est de l’Angleterre, des réfugiés syriens, notamment des femmes et des enfants, descendent d’un bus. Dans les rues de cette cité modeste où s’alignent les maisons de briques rouges, la présence de ces étrangers n’augure rien de bon… Un grand type aviné arrache un appareil photo des mains de Yara, l’une des réfugiées, qui le prenait en photo… L’appareil est brisé. C’est une catastrophe parce que Yara n’a pas les moyens de le faire réparer mais plus encore parce l’objet est lié à la mémoire de son père, emprisonné dans les geôles syriennes et dont elle n’a aucune nouvelle. Après Moi, Daniel Blake (2016) puis Sorry, we missed you (2019), Ken Loach, 87 ans, est revenu tourner dans le nord-est de l’Angleterre mais, après ces deux films qui se terminaient tragiquement, il montre des gens forts et généreux qui réagissaient avec courage et détermination face à l’adversité actuelle. Au coeur du village, The Old Oak, le pub tenu par Tommy Joe Ballantyne, dernier lieu public encore ouvert et menacé de fermeture, est seulement fréquenté par une dernière poignée d’habitués. Yara en pousse la porte. Le pub va devenir le lieu de tous les débats et même d’une forme de réconciliation… Chantre d’un cinéma du réalisme social, Ken Loach s’est souvent penché sur les situations difficiles de la classe ouvrière britannique, créant un immédiat lien d’empathie du spectateur pour ses personnages… Avec The Old Oak, on s’attend à voir « du Loach » et c’est bien « du Loach » qui se déroule sur l’écran. Notamment à cause de beaux personnages comme Yara (Ebla Mari dans ses débuts au cinéma) mais aussi de Dave Turner, le syndicaliste retraité, qui incarne TJ, un type au bout du rouleau. Par son enthousiasme douloureux, Yara lui donne un coup de pied aux fesses. Alors TJ pense qu’il peut y avoir de l’espoir. Un espoir que Loach réussit à faire partager au spectateur qui, à l’instar de Yara, peut aussi dire: « Choukrane, Mister Ballantyne »  (Le Pacte)
Inconnu ShandigorL’INCONNU DE SHANDIGOR
« Je n’aime pas l’humanité. Je l’aime dans un bocal d’arsenic ! » Herbert Von Krantz a inventé l’Annulator, un procédé révolutionnaire capable de désamorcer les armes nucléaires, ce qui ne manque pas de susciter la convoitise des services secrets de puissants États comme d’étranges groupuscules terroristes. Savant infirme et à demi fou, Von Krantz s’est enfermé dans sa demeure, véritable bunker protégé par un terrifiant système anti intrusion. Une maison bientôt cernée par des espions de tout poil. Sylvaine, la fille (probablement le seul être humain de l’aventure) du savant et son assistant Yvan sont enlevés pour servir de monnaies d’échange aux assaillants prêts à tout pour récupérer les plans du fantastique Annulator. Chaînon manquant entre Docteur Folamour, Alphaville et la saga James Bond, L’inconnu de Shandigor est le premier long-métrage de Jean-Louis Roy, cinéaste et membre du Groupe 5, l’équivalent suisse de la Nouvelle Vague, aux côtés de Claude Goretta, Michel Soutter ou Alain Tanner. Avec humour, Jean-Louis Roy (1938-2020) affirme ainsi qu’il n’a aucune envie de faire un cinéma suisse « avec des vaches et des petites fleurs ». C’est donc dans un film d’espionnage avant- gardiste, véritable ovni cinématographique mâtiné de science-fiction et de bande dessinée, qu’il se lance en 1967. En jouant allègrement sur les poncifs et les clichés du genre, Roy exploite à merveille et avec un sens aïgu de la parodie, un univers qui pourrait être celui, comme l’a dit un critique, de 007 revisité par Durrenmatt ! Dans cette mosaïque d’intrigues où se croisent des espions à chapeau mou et lunettes sombres, Jean-Louis Roy met en scène de bons comédiens comme l’admirable Daniel Emilfork, grand habitué des méchants fous (et qui sera, en 1995, le savant Krank dans La cité des enfants perdus de Jeunet) mais aussi Jacques Dufilho, Howard Vernon, Marie-France Boyer ou Serge Gainsbourg, qui composa et interpréta pour l’occasion la chanson Bye, Bye Mister Spy. Disponible pour la première fois en Blu-ray dans une belle restauration 4K, L’inconnu de Shandigor est accompagné, en supplément, d’un extrait de l’émission suisse Cinéma-Vif dans laquelle le cinéaste parle de la genèse de son film. (Carlotta)
OnibabaKuronekoKANETO SHINDO
D’abord assistant-décorateur à la compagnie Shochiku dans les années trente puis assistant de Mizoguchi pour lequel il écrit plusieurs scénarios parmi plus d’une centaine, Kaneto Shindõ (1912-2012) est également un théoricien du 7e art et surtout un cinéaste majeur. Il fut découvert en Occident au début des années soixante grâce à L’île nue, film sans dialogue qui raconte l’histoire d’un couple d’agriculteurs qui cultive difficilement sa petite île aride, contraint à de fastidieux voyages sur le continent pour chercher, en barque, de l’eau douce… Au fil d’une oeuvre indépendante, audacieuse et variée, on trouve aussi deux perles fantastiques, désormais réunies dans un beau coffret. Dans Onibaba (1964) et Kuroneko (1968), le fantastique se mêle à une humanité crue, le surréalisme s’ancre dans des décors sobres et uniques, tandis qu’une sublime photographie noir et blanc achève d’emporter le spectateur dans ces mondes hybrides. Avec Onibaba, Shindo plonge dans le 14e siècle japonais et une guerre entre samouraïs qui ruine le pays. Alors que les hommes ont été pris par la guerre, deux femmes, belle-mère et belle-fille, se terrent dans une petite hutte au milieu des hautes herbes. Elles survivent en traquant les samouraïs blessés pour les achever et vendre leurs effets au marché noir. Expertes dans ce jeu de massacre, elles jettent les dépouilles de leurs victimes dans un trou dont les toutes premières images du film nous disent qu’il est «profond et noir », véritable bouche de l’enfer cachée par les hautes herbes. Mais Hashi, un voisin, revient des batailles. Il fait des avances pressantes à la jeune femme qui, contre les avertissements de sa belle-mère, finit par lui céder. Chaque nuit, quand la vieille dort, la bru court à corps perdu dans les herbes retrouver son amant. Pour tenter de séparer les amants, la vieille se transforme en véritable démon… Dans Kuroneko (initialement sorti sous le titre Les vampires), Gnitoki, un samouraï engagé dans l’armée, découvre les corps de sa mère et de son épouse violées et assassinées. Il rencontre deux femmes qui leur ressemble étrangement. Il s’avère bientôt que ces deux créatures sont les fantômes des défuntes qui cherchent à se venger. Dans les suppléments du coffret, on trouve l’analyse des deux films par Stéphane du Mesnildot, spécialiste du cinéma japonais, un portrait du cinéaste par Clement Rauger et enfin un portrait par Pascal-Alex Vincent de la comédienne Nobuko Otowa, présente dans les deux films et muse de Shindo pour lequel elle tourne plus de quarante films. (Potemkine)
Dieu Noir Diable BlondLE DIEU NOIR ET LE DIABLE BLOND
Manuel et Rosa sont un couple qui vit dans la misère sur les plaines arides du Sertão. Désirant s’émanciper de leur situation accablante, Manuel tente de revendre deux vaches à son propriétaire, qui, profitant de la toute-puissance de sa condition, use de contraintes qui amènent le paysan à commettre un meurtre. Ils s’en remettent alors à deux personnages exaltés, violents et mystiques symbolisant la révolte : Sebastião, l’incarnation de Dieu, qui promet une île, terre de paradis où règnerait la justice lorsque « la terre et la mer se réuniront » et Corisco, un « cangaceiro », bandit, pilleur et violeur, celle du diable. Le Brésilien Glauber Rocha (1939-1981) devient, dès les années 1960, un pilier du mouvement Cinema Novo, qui puise son inspiration dans le néoréalisme italien et la Nouvelle Vague française. « Le cinéma novo existe, dit le réalisateur, il est une réponse créatrice, une pratique active dans un pays riche en possibilité et en équivoques. » En 1964, Le dieu noir et le diable blond, véritable date dans le cinéma brésilien, est projeté au Festival de Cannes alors qu’un coup d’état militaire instaure la dictature au Brésil. En novembre 2015, Deus e o Diabo na Terra do Sol figure à la secponde place de la liste établie par l’Association brésilienne des critiques de cinéma des cent meilleurs films brésiliens de tous les temps. Le film qui sort pour la première fois en Blu-ray, dans une version restaurée, est accompagné de différents suppléments dont des analyses par le réalisateur Jean-Pierre Thorn et l’écrivain et historienne Gabriela Trujillo ainsi qu’une rencontre avec Paloma Rocha, la fille aînée du réalisateur et le producteur Lino Meireles. (Capricci).
Smooth TalkSMOOTH TALK
Connie Wyatt, une jeune fille de quinze ans, passe l’été en Californie du nord dans la maison de campagne familiale avec ses parents, Katherine et Harry, et June, sa sœur. Horrifiée à l’idée de passer du temps en famille, la lycéenne en pleine crise d’adolescence passe son temps libre à traîner dans le centre commercial avec ses deux meilleures amies et à flirter avec les garçons. Elle finit par éveiller la curiosité d’Arnold Friend, jeune homme charismatique et enjôleur aux desseins ambigus qui a adopté le look et les manières de James Dean. Arnold se montre tour à tour séducteur et menaçant. Avant d’inspirer de nombreux cinéastes comme Laurent Cantet (Foxfire, confessions d’un gang de filles) ou Andrew Dominik (Blonde), l’univers singulièrement torturé de la romancière américaine Joyce Carol Oates avait déjà fait, en 1985, l’objet d’une remarquable adaptation par la réalisatrice américaine Joyce Chopra. Cette dernière ne tournera ensuite plus qu’un seul film pour le cinéma (The Lemon Sisters en 1989 avec Diane Keaton et Carol Kane) avant de se consacrer à la télévision. Dans cette chronique sensible sur l’adolescence qui passe du doux fantasme à la menace sourde, pour aboutir à un final troublant d’ambiguïté, on remarque dans le rôle de Connie la comédienne Laura Dern, âlors âgée de 18 ans et qui deviendra bientôt l’actrice fétiche de David Lynch avec Blue Velvet puis Sailor et Lula mais aussi le professeur Sattler dans la saga Jurassic Park. Arnold Friend est, lui, incarné par Treat Williams, disparu l’an dernier. L’acteur avait alors déjà son actif de beaux personnages dans Hair et 1941 en 1979 mais aussi le policier Daniel Ciello dans Le prince de New York (1981) de Sidney Lumet ou le syndicaliste O’Donnell dans Il était une fois en Amérique (1984) de Sergio Leone. Grand Prix du Jury au Festival de Sundance 1986, Smooth Talk est à découvrir pour la première fois en Blu-ray dans sa nouvelle restauration 4K. (Carlotta)
Cité MagiqueLA CITE MAGIQUE
Ancien joueur de baseball, Rip Smith dirige désormais un institut de sondage d’opinions. Au bord de la faillite, il doit en renflouer les caisses et en dynamiser la réputation en mettant ses méthodes de travail à l’épreuve du terrain. Pour y parvenir, il décide de sélectionner une ville dont l’opinion publique est en tout point conforme à celle du reste des États-Unis. Cet endroit, c’est Grandview, une petit localité tranquille. Dans le plus strict anonymat, il s’y installe avec son équipe. Mais, très vite, il va se heurter à Mary Peterman, la rédactrice en chef du journal local. Car celle-ci milite pour un Grandview autrement plus progressiste et moderne que l’image figée dans le temps que Rip Smith voudrait en donner… Célèbre pour Wings (Les ailes) qu’il réalise en 1927, William A. Wellman connut une carrière qui s’étendit sur quatre décennies. C’est en 1947 qu’il dirige James Stewart en sondeur dans une ville-test où il va affronter la pugnace Marie bien décidée à réveiller la cité assoupie. Le scénario est signé Robert Riskin, un collaborateur de longue date de Frank Capra et Stewart vient de tourne La vie est belle du même Capra. On ne peut donc s’empêcher de songer à l’univers de Capra mais Wellman, plus porté sur un cinéma sobre et réaliste, n’a pas la fantaisie caractéristique de l’auteur de New York Miami. Le film fut un échec commercial car, après guerre, l’optimisme d’un film comme M. Smith au Sénat avait fait place à un certain désenchantement. Il n’est reste pas moins que le duo (évidemment promis à une romance) entre Stewart et Jane Wyman (qui allait rejoindre Hitchcock pour Le grand alibi) fonctionne bien au coeur d’une comédie romantique nostalgique. Enfin le thème de la fiabilité des instituts de sondage demeure d’actualité. (Sidonis Calysta)
Linda PouletLINDA VEUT DU POULET
Non, ce n’est pas Linda qui a pris la bague de sa mère Paulette ! Cette punition est parfaitement injuste ! Et maintenant Paulette ferait tout pour se faire pardonner, même un poulet aux poivrons, elle qui ne sait pas cuisiner. Mais comment trouver un poulet un jour de grève générale ? De poulailler en camion de pastèques, de flicaille zélée en routier allergique, de mémé en inondation, Paulette et sa fille partiront en quête du poulet, entraînant toute la « bande à Linda » et finalement tout le quartier. Mais Linda ne sait pas que ce poulet, jadis si bien cuisiné par son père, est la clef de son souvenir perdu… Au fait, quelqu’un sait tuer un poulet ? « Ça a existé quand on ne se souvient pas ? » demande Linda, 8 ans, à sa maman. Récompensé du Cristal du long-métrage au Festival du film d’animation d’Annecy et désormais César 2024 du meilleur film d’animation, l’oeuvre de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach est joyeusement décalée, follement inventive avec un rythme effréné et une animation virevoltante. Ses graphismes atypiques, avec des dessins esquissés volontairement inachevés, intriguent au début puis laissent place à l’imagination grâce à leur fluidité. Chaque protagoniste a sa couleur, et tandis que Linda entraîne une pléiade de personnages attachants dans une folle farandole existentielle, c’est toute une joyeuse palette de couleurs acidulées qui s’anime. Belle pépite de l’animation française, Linda veut du poulet est une comédie tendre et loufoque sur le deuil, l’absence et le souvenir mais aussi une ode à la vie, à la liberté, au désordre et à l’entraide. En bonus : le making of et une interview des cinéastes ! (Blaq Out)
Eaux ProfondesEAUX PROFONDES
À Jersey, Mélanie et Vic forment un couple psingulier, même s’ils sont bien intégrés dans la population locale. Mélanie séduit d’autres hommes et Vic regarde son épouse dans les bras des autres, sans manifester extérieurement la moindre jalousie. Il s’arrange toutefois pour faire peur aux prétendants et les éloigner de sa femme. Un jour, celle-ci s’éprend du pianiste Carlo. Lors d’une soirée, Vic le tuera en faisant croire à une mort accidentelle dans une piscine. L’enquête conclut à l’accident, mais Mélanie accuse son mari. Arrive alors un Canadien, que Mélanie séduit à nouveau. Vic le tue également, faisant disparaître le corps. Mélanie accuse à nouveau son époux, mais l’enquête est close, faute de cadavre. Mélanie se remet alors à aimer son mari et ils forment à nouveau un couple idéal. Disparu l’an dernier à l’âge de 91 ans, Michel Deville distillait un cinéma mêlant la poésie et l’humour. Ici, en 1981, il donne au thriller psychologique avec une forme d’élégance sobre qui était sa marque de fabrique. Il permet aussi à Jean-Louis Trintignant (Vic) de construire un personnage impassible et grave en même temps qu’il est « diabolique ». Isabelle Huppert est une séductrice et une femme-enfant incapable de s’assumer. Une partie de cache-cache mortelle (adaptée de Patricia Highsmith) autour de la vérité et du mensonge où le cinéaste distille ses informations avec parcimonie pour créer le trouble. Une réussite. (Gaumont)
Passion Dodin BouffantLA PASSION DE DODIN BOUFFANT
Dans la France de 1885, Eugénie travaille depuis vingt ans comme cuisinière pour le célèbre gastronome Dodin. Elle est considérée comme excellente dans son domaine. Cela s’explique notamment par le temps qu’Eugénie a passé en cuisine avec Dodin, gastronome réputé dans la France du XIXe siècle. Au fil des années, une passion affectueuse s’est développée entre eux. De leur amour commun pour la gastronomie naissent des plats uniques, savoureux et délicats. Femme éprise de liberté, Eugénie n’a cependant jamais voulu épouser Dodin. Elle tombe malade. Il décide alors de cuisiner lui-même pour la première fois pour sa bien-aimée… Pour écrire le scénario de son septième long-métrage (parmi lesquels L’odeur de la papaye verte en 1993), le cinéaste Tran Anh Hung s’est inspiré du roman éponyme de l’auteur suisse Marcel Rouff, paru en 1924, et de l’écrivain français en gastrosophie Brillat-Savarin (1755-1826). Tourner un film sur la cuisine, les goûts et les saveurs est souvent l’occasion de séduire le spectateur en vantant la beauté des saveurs ou en chantant le bonheur des papilles. D’ailleurs, c’est un maître, le chef français Pierre Gagnaire (récompensé par quatorze étoiles au Michelin) qui a servi de conseiller technique pour les plats présentés dans le film… Entre casseroles et marmites, voici donc un beau voyage dans les gestes méthodiques et précis qui font le mystère de la grande table. Le cinéaste s’appuie, ici, sur un duo en verve : Juliette Binoche et Benoît Magimel, tous deux brillants et pudiques sur fond d’amour et de délices. Choisi par la France pour la représenter à l’Oscar du meilleur film étranger (pour lequel il n’a pas été retenu), le film a été l’objet de lazzis, beaucoup s’attendant à voir Anatomie d’une chute être en lice. (Gaumont)
Abbe PierreL’ABBE PIERRE : UNE VIE DE COMBATS
Élevé dans le catholicisme dans une famille bourgeoise, Henri Grouès, né en août 1912 à Lyon, est déterminé à devenir prêtre malgré son renvoi du couvent des Capucins de Crest. La Seconde Guerre mondiale va l’en empêcher. À la tête d’un régiment, il est longuement hospitalisé durant la guerre. Il entre ensuite dans la Résistance tout d’abord en aidant les réfractaires au Service du travail obligatoire (STO). Il y fait la connaissance de Lucie Coutaz, qui lui donne le nom d’Abbé Pierre et qui fondera avec lui en 1949 le mouvement Emmaüs. Pendant la guerre, il voit l’horreur de la guerre et perd un ami au front. Jusqu’à sa mort en 2007, il va mener de nombreux combats, comme s’il avait de nombreuses vies. Grande figure de la lutte contre la pauvreté et les injustices, l’abbé Pierre est aussi un homme engagé dans de multiples combats, qu’il s’agisse de résister au nazis, de se battre, comme député, à l’Assemblée nationale, voire même se se battre avec sa santé fragile qui le fit échouer dans la vie contemplative des Capucins… Réalisateur de L’affaire SK1 (2014), Sauver ou périr (2018) et Goliath (2022), Frédéric Tellier s’attelle à un gros morceau avec ce biopic sur l’abbé Pierre tant la vie de cet homme de bien a été riche dans un cheminement autant spirituel que politique et social. Même si certains événements sont seulement esquissés, l’essentiel est de faire la part belle à tous les combats menés. Et le film contient des scènes fortes comme, bien sûr, le fameux appel sur Radio-Luxembourg en février 1954 lorsqu’il s’écrie sur les ondes : « Mes amis, au secours… Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant hier, on l’avait expulsée… » Ceux qui connaissent mal l’abbé Pierre, le découvriront dans ce film honnête. Les autres se diront qu’il méritait bien ce portrait. Avec à ses côtés Emmanuelle Bercot dans le rôle de Lucie Coutaz, Benjamin Lavernhe offre une émouvante composition. (M6)
Theoreme MargueriteLE THEOREME DE MARGUERITE
Seule fille de sa promo parmi les garçons de Normale Sup’, Marguerite Hoffmann est une brillante matheuse dont l’avenir semble tout tracé. Elle termine une thèse sur la conjecture de Goldbach qu’elle doit exposer devant un parterre de chercheurs lors d’un séminaire. Son directeur de thèse, Laurent Werner (Jean-Pierre Darroussin) l’informe alors qu’il vient d’accepter de superviser un autre doctorant, Lucas Savelli, brillant étudiant venu de l’université d’Oxford., Le jour J, une erreur bouscule toutes ses certitudes et l’édifice s’effondre. Marguerite décide de tout quitter pour tout recommencer… Anna Novion, la réalisatrice dit : « Les gens qui ont une rapidité d’esprit hors du commun veulent être en permanence à la hauteur de leurs capacités ». Fascinée par les maths depuis sa plus tendre enfance, Marguerite est une forte personnalité peu à peu obsédée par ses recherches mathématiques qui menacent sa santé mentale. Il est nul besoin d’être doué en maths pour apprécier cette aventure intellectuelle mais aussi sensible puisque le film suit au plus une jeune femme qui va entièrement se remettre en cause. Elle s’installe en colocation avec Noa, très différente d’elle. Avec cette nouvelle complice, Marguerite va trouver, dans des parties clandestines de mahjong, l’occasion d’exercer son sens des chiffres et d’arrondir ses fins de mois. Et si le jeu chinois allait lui redonner l’envie de résoudre la conjecture de Goldbach, ce célèbre problème non résolu de la théorie des nombres et des mathématiques ? Belle interprète de Marguerite, la comédienne franco-suisse Ella Rumpf a obtenu récemment le César 2024 de la meilleure révélation féminine. Et c’est justice. (Pyramide)
ContagionCONTAGION
Peu après son retour d’un voyage d’affaires à Hongkong, Beth Emhoff (Gwyneth Paltrow) meurt subitement d’une forme inconnue de la grippe. Son jeune fils décède quelques jours plus tard. Mitch, leur mari et père (Matt Damon), semble immunisé contre cette maladie, qui a frappé les siens et semble se répandre à une vitesse effrayante. Pourtant, il faut plusieurs jours aux autorités sanitaires pour prendre la mesure de la gravité de la situation. C’est en 2011, donc bien après l’épidémie de SRAS et deux ans après celle du H1N1, que Steven Soderbergh met en scène Contagion dont l’écriture précise et sans lyrisme donne le sentiment de voir un documentaire avec l’émergence d’un virus mystérieux, le MEV-1 et la pandémie qui s’ensuit. A l’évidence, Contagion a été vu avec un regard neuf (et volontiers inquiet) lors du Covid-19 et le cinéaste américain a fait courir des frissons dans l’échine des spectateurs. On assiste en effet à la progression rapide d’un virus mortel qui tue les personnes contaminées en quelques jours. Dès les premières minutes, des gros plans sur des poignées de portes, des verres échangés, des boutons d’ascenseurs ou des cartes de crédit, suggèrent les supports de cette transmission. On mesure, par la mobilité des personnes, l’usage des transports publics, comment l’épidémie cesse d’être locale pour devenir pandémie. Et puis un complotiste (Jude Law) lance une campagne de désinformation à partir de la vidéo d’un homme s’effondrant dans le métro de Hongkong. Avec une intrigue qui ne laisse pas le spectateur le temps de souffler, un casting « deluxe » (Gwyneth Paltrow, Matt Damon, Jude Law, Kate Winslet, Laurence Fischburne, Marion Cotillard) voici un film-catastrophe terrifiant. (Warner)
Autre femmeL’AUTRE FEMME
Jeune décoratrice parisienne, Agnès Denis débarque sur une île espagnole à la suite d’une déception sentimentale. Sur le chemin qui mène du car à la villa de bord de mer prêtée par des amis, un inconnu l’aide à se protéger de l’orage et l’accompagne à sa demeure. Agnès voudrait savoir pourquoi tout le monde semble se défier de cet homme. Bientôt Agnès, obsédée par ce Daniel, n’aura de cesse de l’avoir revu. Autour de la Parisienne, gravitent différents comme Ricardo dont la femme, Léna, a disparu, assassinée par son mari disent les uns, conquise par une aventure amoureuse, disent les autres. Comme Daniel prétend que Léna est partie avec un autre homme, Agnès va mener son enquête. Elle connaîtra bien des rebondissements avant de la laisser, seule avec ses larmes, face à la mer. En 1964, François Villiers tourne son avant-dernier film et met en scène un drame que la critique de l’époque massacrera allègrement, parlant de film fade, sans vie, de scénario quelconque. Mais la presse note néanmoins que le film doit beaucoup à Annie Girardot, sa principale interprète, qui trouve, quatre ans après Rocco et ses frères de Visconti, un beau personnage fait d’amertume et de douceur. (Gaumont)
Monsieur Le MaireMONSIEUR LE MAIRE
Maire de Cordon, un petit village de montagne au pied du Mont-Blanc dans les Alpes, Paul Barral subit la désertification et le vieillissement de la population et doit se battre contre la fermeture des commerces et des salles de classe. Alors qu’il cherche désespérément comment attirer de nouveaux habitants, l’arrivée de mères célibataires en situation difficile constitue peut-être la clé pour ramener de la vie dans ce village peu habitué au changement et à l’agitation. Chanteuse au franc-parler, Joe-Lynn (Eye Haïdara), avec ses deux enfants, va vite faire des étincelles dans ce bourg paisible. Les réalisateurs Karine Blanc et Michel Tavares se sont inspirés de l’histoire vraie d’Arnaud Diaz, maire de L’Hospitalet-près-l’Andorre en Ariège, qui avait créé la Maison des Cimes, un centre d’accueil pour les familles monoparentales dont l’objectif est d’attirer de nouveaux habitants dans le village et de maintenir l’école locale en y scolarisant les enfants des familles. Avec Clovis Cornillac dans le rôle de Paul Barral, patron de scierie et maire surbooké, voici une comédie sympathique autour du thème de la désertification rurale. Et cela même si les non-natifs sont un peu caricaturaux. Mais, tout va bien se passer et tout finira bien. (UGC)
Pas Pitié CavesPAS DE PITIE POUR LES CAVES
À Montmartre, prostituées et proxénètes du quartier se retrouvent dans le bar de Victor. L’un d’eux, Charly, ancien musicien devenu un homme du milieu, s’éprend un jour de la belle Laurence, chanteuse de cabaret au Moulin de Montmartre. Mais Fernand, caïd revenant de Chicago pour mener ses activités de drogue et de traite des blanches, voit d’un mauvais œil son ancien acolyte quitter le milieu pour mener une vie honnête en compagnie de sa dulcinée, qu’il voudrait lui-même mettre sur le trottoir. Il exploite la jalousie de Jessy, maîtresse et gagne-pain de Charly, et place un revolver dans son sac. Cette dernière, piquée au vif, n’entend pas laisser sans lutter son homme prendre la tangente. Elle vient faire une scène chez Laurence et, folle de désespoir, finit par tirer sur Charly… Réalisateur de films comme Le collège en folie ou Pas de souris dans le bizness, Henri Lepage signe, en 1955, ce petit polar de série B en noir et blanc. Si tout cela ne vole pas bien haut, on a quand même le plaisir de retrouver des comédiens de ces années-là comme Dora Doll (Jessy), Colette Ripert (Laurence), Robert Berri (Fernand), Michel Ardan (Charly) ou encore Jean Tissier, Jacques Dynam, Max Amyl, Bernard Musson ou Sacha Briquet dont on connaît bien les têtes sans connaître leurs noms ! (Gaumont)

 

UN DROLE DE CANDIDAT, LES MENSONGES DE LYDIA ET LE VISITEUR PASOLINIEN  

SecondTourSECOND TOUR
Devant une salle comble, un chauffeur de meeting s’égosille : « Voici celui que tout le pays attend ! Pierre-Henri Mercier ! Notre futur président ! » Dans le véhicule qui l’emporte après le meeting, le candidat voit s’afficher sur son téléphone des messages aussi sybillins qu’inquiétants : « Se doute de quelque chose », « Attention à vous », « Gardez votre sang froid ». Soudain une violente explosion souffle la voiture. Difficilement, le candidat s’extrait du véhicule sur le toit. Une explosion de gaz, d’après les premiers éléments relayés par les médias… Dans la rédaction d’une chaîne de télévision, Mademoiselle Pove, grande bringue frisée à lunettes, est à mille lieux de l’actualité politique. Une bêtise lui a valu d’être mutée au foot. Faute de journalistes disponibles, la chaîne a décidé de mettre la journaliste sur les derniers jours de la campagne présidentielle. Toujours flanquée de son fidèle Gus, cameraman, preneur de son et monteur, la reporter n’arrive pas à croire vraiment au côté bien trop lisse du candidat. Entre chronique politique, thriller et fable écologique, voici un réjouissant réseau d’histoires qui se croisent et s’enrichissent au fur et à mesure dans une sorte de bande dessinée très rythmée sur la politique avec ses discours formatés, ses hommes politiques passés dans le même moule, ses hommes de main, ses meetings, son grand débat. Ce n’est pas tant un « univers impitoyable » qu’un immense foutoir. Le cinéaste d’Adieu les cons se régale avec le savoureux duo Mlle Pove/Gus peu à peu embarqué dans une aventure de plus en plus loufoque, voire délirante où les coups de feu pleuvent, où passent deux agents du Mossad, un garde du corps mutique, un geek encapuchonné mais aussi un étrange et doux apiculteur… Avec Dupontel qui incarne le candidat, Cécile de France et Nicolas Marié, Second tour (dédié à Bertrand Tavernier, Jean-Paul Belmondo et Michel Deville), sans avoir la prétention d’être un film à message, se penche avec un humour grinçant, sur les maux et les dysfonctionnements de notre société mais en imaginant cependant un plan B. Ainsi Dupontel cite Hannah Arendt : « Je me prépare au pire en espérant le meilleur ». (Pathé)
RavissementLE RAVISSEMENT
Sale coup pour Lydia… Alors qu’elle ne s’y attend pas, son copain lui laisse entendre qu’il a eu une aventure amoureuse avec une autre fille. Blessée, Lydia coupe les ponts et trouve soutien et refuge chez sa meilleure amie Salomé. Celle-ci lui apprend qu’elle est enceinte. Les femmes enceintes, c’est le quotidien de Lydia, sage-femme dans un hôpital de la région parisienne et très investie dans son travail… Dans un état vague, Lydia traîne la nuit dans la ville et y rencontre Milos, machiniste de la RATP d’origine serbe. Lorsque Salomé (Nina Meurisse) accouche dans le service de Lydia, celle-ci est bouleversée par le nourrisson. C’est même Lydia qui va proposer un prénom pour la fillette : Esmée, autrement dit celle qui est aimée. Mais qui aime le plus la petite Esmée ? Ses parents ou Lydia ? Cette dernière va alors s’enfermer dans une dramatique spirale de mensonges… A propos du Ravissement, son premier long-métrage, Iris Kaltenbäck note : « Ce qui m’a tout de suite interpellée, c’est l’amitié qu’on devine entre ces deux femmes. J’ai moi-même vécu ce décalage étrange quand, il y a quelques années, une amie très proche est devenue mère à un moment où je ne me sentais moi-même pas du tout concernée par cela. On parle beaucoup de ce que provoque l’arrivée d’un enfant dans un couple, mais moins de ce que ça déclenche dans une amitié.» La cinéaste suit au plus près cette Lydia qui fuit devant ce qui la fragilise pour s’enfermer dans la solitude et le mensonge. Très seule et avec un besoin fou d’être aimée, Lydia se perd alors dans le regard des autres. Ainsi le regard de Milos (Alex Manenti) change au moment où il la voit comme une mère. Malheureusement pour elle, Lydia se laisse happer par ce regard et la redoutable spirale des affabulations va l’emporter. Un beau récit porté par la brillant Hafsia Herzi. Elle donne corps, douloureusement, à une Lydia qui s’enlise dans le faux avant de voir naître, dans le mensonge, une vérité. Et de la mystification initiale vont surgir de vrais sentiments. (Diaphana)
TheoremeTHEOREME
« Dans une famille bourgeoise, dit Pier Paolo Paslini, arrive un personnage mystérieux qui est l’amour divin. C’est l’intrusion du métaphysique, de l’authentique, qui vient détruire, bouleverser une vie, qui est entièrement inauthentique, même si elle peut faire pitié, si elle peut même avoir des instants d’authenticité dans les sentiments, par exemple, dans ses aspects physiques aussi » et le cinéaste italien d’ajouter, à propos du départ de l’étrange visiteur : « Et chacun, dans l’attente, dans le souvenir, comme apôtre d’un Christ non crucifié mais perdu, a son destin. C’est un théorème et chaque destin est son corollaire ». En 1968, Pasolini, cinéaste, dramaturge et poète (1922-1975) signe l’un de ses films les plus fameux où un étrange et séduisant « Visiteur » fait irruption dans la vie d’une famille milanaise de la grande bourgeoisie. L’énigmatique étranger produit aussitôt une étrange attraction sur tous les membres de la maison qui finissent par avoir des rapports sexuels avec lui: la bonne très pieuse, le fils sensible, la mère sexuellement refoulée, la fille timide et, enfin, le père, un industriel tourmenté. Les spécialistes du cinéma considèrent que le film est un commentaire sur la société bourgeoise et l’émergence du consumérisme, d’autres observent que Pasolini se penche, ici, sur l’incapacité de l’homme moderne — bourgeois — à percevoir, écouter, absorber et vivre le sacré. Comme beaucoup d’oeuvres de PPP qui la considère comme « symbolique », Théorème a fait scandale et a été jugé obscène par une partie de l’Église catholique. Malgré le temps qui a passé, ce faux drame bourgeois demeure toujours troublant. Dans les suppléments de ce film en format digibook avec un livre (60 pages) d’Hervé Joubert, on trouve un documentaire sur Pasolini par Laura Betti et des entretiens avec Henri Chapier et Pierre Kalfon. (Sidonis Calysta)
Annee DifficileUNE ANNEE DIFFICILE
Albert et Bruno sont surendettés et en bout de course, c’est dans le chemin associatif qu’ils empruntent ensemble qu’ils croisent des jeunes militants écolos. Plus attirés par la bière et les chips gratuites que par leurs arguments, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans conviction… On avait applaudi largement le duo Eric Toledano/Olivier Nakache avec Intouchables (2011), leur hit qui atteint 19,4 millions d’entrées dans les salles françaises. Ils ont ensuite tourné Samba (2014) sur les sans-papiers ou encore Hors normes (2019) qui se penchait, à travers la comédie dramatique, sur les autistes. Ici, ils abordent un nouveau registre avec la surconsommation. Dans un centre commercial, le matin du Black Friday 2019, des activistes écologistes essayent d’empêcher la foule des clients de rentrer dans un magasin, afin de dénoncer la surconsommation. Leur discours passe mal auprès des nombreux clients bloqués, parmi lesquels se trouve Albert Laprade, venu acheter une télévision. La police intervient, le magasin peut ouvrir, et la ruée des clients en quête de prix bradés tourne au pugilat grotesque, avec  La valse à mille temps de Jacques Brel en fond musical. En se reposant sur le duo Pio Marmai – Jonathan Cohen, dans un exercice de losers magnifiques, le duo de cinéastes joue sur du velours même si le ton est quand même un peu trop à la caricature et aux clichés. Un film qui souhaite dénoncer un peu… Pourquoi pas ? (Gaumont)
Ciel RougeLE CIEL ROUGE
Leon et Felix se rendent dans une maison située sur la côte allemande de la mer Baltique et appartenant à la famille de Felix. En chemin, leur voiture tombe en panne, et ils doivent terminer le chemin à pied en portant leurs bagages. Lorsqu’ils arrivent, ils se rendent compte que la maison est déjà occupée, par une certaine Nadja, nièce d’une collègue de travail de la mère de Felix. Ils vont devoir se serrer, et l’humeur de Leon devient encore plus exécrable. Pour Leon et Felix, il s’agit de vacances studieuses : Leon, écrivain, veut travailler à son nouveau roman. Felix doit quant à lui préparer un dossier pour le concours d’entrée d’une école d’art. Mais cela ne l’empêche pas de profiter de la plage… Les relations des deux amis avec Nadja sont inexistantes les premiers jours, et celle-ci se signale surtout par ses ébats amoureux assez bruyants avec son ami Devid. La région est ravagée par des incendies hors contrôle. Mais Devid se veut rassurant : ils sont à quelques dizaines de kilomètres, et le vent souffle de la mer vers la côte. Le ciel rouge qu’ils aperçoivent la nuit au loin est tout de même angoissant. Auteur de films remarquables comme Barbara (2012), Phoenix (2014), Transit (2018) ou Ondine (2020) dans lequel on trouvait déjà Paul Beer, interprète, ici, de Nadja, Christian Petzold signe un conte sur le désir mais aussi sur tous les dérèglements, y compris climatiques. En s’appuyant sur un épatant quatuor de comédiens (outre Paula Beer, Thomas Schubert, Langston Uibel et Enno Trebs), le cinéaste allemand organise un récit fluide avec des dialogues brillants dans un été où rien n’est vraiment grave mais où l’air se charge de l’âcre fumée de feux de forêt. (Blaq Out)
Lune FroideLUNE FROIDE
Simon et Dédé, deux amis paumés et soudés l’un à l’autre par une quête d’oubli et d’exaltation, traînent dans la vie. La nuit, désinhibés par l’alcool et électrisés par Jimi Hendrix et le rock des années 1960, ces deux noctambules aigris enchaînent les rencontres insolites et déjantées jusqu’à un soir de pleine lune… Tiré de deux nouvelles de Charles Bukowski, Lune froide a été au départ un court-métrage puis a donné suite à un « long » (90 mn) étrange, dérangeant mais aussi terriblement drôle et jubilatoire, ne refusant pas certaines incursions poétiques, voire fantastiques. Ce film, dans un très beau noir et blanc, bouscula quelque peu les festivaliers cannois en 1991. De fait, Patrick Bouchitey (qui incarne aussi Dédé) a imaginé un film (dédié à Patrick Dewaere et à Xavier Saint-Macary) qui fait rire le spectateur et le captive tout en développant un récit où il est question du thème tabou de la nécrophilie. Dès le générique, les deux zonards montent à bord d’une vieille 404 et s’en vont aux accents de la musique de Jimi Hendrix pour une déambulation corrosive et transgressive. Dans le rôle de Simon, Jean-François Stévenin trouve, ici, l’un des plus beaux personnages de sa carrière. Un diamant sombre porté aussi par la musique originale de Didier Lockwood ou de grands groupes classiques des années soixante comme Procol Harum ou The Kinks. (Gaumont)
Fiancee PoeteLA FIANCEE DU POETE
Amoureuse de peinture et de poésie, Mireille Stockaert s’accommode de son travail de serveuse à la cafétéria des Beaux-Arts de Charleville tout en vivant de petits larcins et de trafic de cartouches de cigarettes. N’ayant pas les moyens d’entretenir la grande maison familiale des bords de Meuse dont elle a hérité, Mireille décide de prendre trois locataires. Trois hommes qui vont bouleverser sa routine et la préparer, sans le savoir, au retour du quatrième : son grand amour de jeunesse, le poète… Comédienne formidablement poétique, Yolande Moreau est passée, pour la troisième fois derrière la caméra avec cette Fiancée… qui vient donc après Quand la mer monte… (coréalisé en 2004 avec Gilles Porte) et Henri (2013). C’est une photo de Shaun Greenhalgh parue dans une revue d’art qui est à l’origine de ce projet. Shaun Greenhalgh est un faussaire qui a dupé les musées du monde entier. L’hebdomadaire Newsweek le décrit comme « un homme trapu, blafard, qui n’a jamais eu d’emploi et avait échoué à entrer dans le corps des Royal Marines parce qu’il ne savait pas nager ». Plus loin, des œuvres qu’il avait copiées… Les œuvres de Shaun Greenhalgh vont de la peinture à la sculpture antique et ce travail est surprenant de beauté, de finesse, de talent et de savoir-faire… Yolande Moreau (qui incarne Mireille) ne voulait pas faire un film sur un faussaire : « J’avais plutôt envie de parler de notre besoin de rêver, de sublimer la réalité souvent pas très excitante ! Pas seulement à travers la peinture ou la sculpture, mais dans nos vies, au quotidien. Nous faisons tous des mensonges… Et si nos mensonges étaient de petits arrangements avec la réalité pour la sublimer ? » (Le Pacte)
Fille Roi MaraisLA FILLE DU ROI DES MARAIS
Aujourd’hui mariée à Stephen et maman d’une petite fille, Helena Pelletier apprend que son père, Jacob Holbrook, s’est évadé lors de son transfert en prison. L’homme, surnommé « le roi des marais » par la presse, avait jadis enlevée sa mère et Helena était née durant la captivité. Après avoir grandi dans les marais aux côtés de son géniteur, elle était parvenue à s’échapper avec sa mère. Aujourd’hui, Helena voit ressurgir ses vieux démons. Persuadée qu’il a l’intention de lui prendre sa fille, Helena décide de le retrouver et de l’éliminer elle-même. Réalisateur en 2016 du remake hollywoodien d’Intouchables de Toledano/Nakache, l’Américain Neil Burger adapte le roman éponyme de Karen Dionne et plonge le spectateur dans une forêt aussi belle qu’angoissante, devenue pour Helena, l’antre de l’horreur. Un labyrinthe dans lequel elle était prisonnière, sans espoir, face au regard avide de Jacob, monstre pervers. Connue pour avoir été Rey dans Star Wars, épisode VII : Le Réveil de la Force (2015) puis dans Star Wars, épisode VIII : Les Derniers Jedi (2017) et enfin dans le dernier épisode de cette nouvelle trilogie, L’Ascension de Skywalker (2019), Daisy Ridley est Helena, cette enfant devenue adulte, qui découvre sa vérité à travers tous les journaux télévisés… L’excellent Ben Mendelsohn est parfaitement crédible dans le rôle du monstrueux Jacob Holbrook. Lorsque famille ne rime pas avec amour. (Metropolitan)
Pont Entre Deux RivesUN PONT ENTRE DEUX RIVES
Quinze ans après avoir épousé Georges, un homme dont la vitalité la fascinait alors qu’elle n’était encore qu’une jeune fille romantique et sentimentale, Mina est maintenant désillusionnée et prête à vivre l’aventure qui se présente à elle en la personne de Mathias, un ingénieur séduisant qui parcourt le monde en construisant des ponts. En 1984, entre Fort Saganne de Corneau et Police de Pialat, Gérard Depardieu passe pour la première fois derrière la caméra pour Le Tartuffe (dont il interprète aussi le rôle-titre) d’après la pièce de Molière montée par Jacques Lassalle au TNS de Strasbourg. Bien des années plus tard, en 1999, il réalise son second film (et dernier à ce jour) en filmant, du côté de Pont-Audemer et Gonneville-sur-Honfleur, en Normandie et avec la complicité de Frédéric Auburtin, une aventure sentimentale qui aura pu figurer dans la filmographie de François Truffaut. Carole Bouquet incarne une femme, mal dans sa peau, mal dans son couple, soudain bouleversée par un autre homme (Charles Berling)… Par ailleurs, son fils commence à faire sa crise d’adolescence, avec la rencontre d’une jeune fille (Mélanie Laurent, remarquée par Depardieu alors qu’elle accompagnait une amie sur le tournage d’Astérix et Obélix contre César) . Alors compagne de Depardieu, Carole Bouquet est radieuse en épouse qui choisit soudainement, quasiment telle une adolescente, de donner une nouvelle direction à son existence… Comme un cri d’amour de Depardieu à Carole Bouquet. (Gaumont)
Maison AssassinéeLA MAISON ASSASSINEE
En 1896, dans les hautes terres sauvages de la Haute-Provence, la famille Monge est sauvagement assassinée en pleine nuit par trois inconnus. Seul survivant de ce massacre alors qu’il n’était qu’un nourrisson, Séraphin Monge revient sur les lieux deux décennies ans plus tard, à sa démobilisation après la fin de la Grande Guerre. Séraphin est hanté par l’image de sa mère morte en essayant de l’atteindre une dernière fois. Pour tenter de retrouver la paix tout en cherchant à identifier les meurtriers pour venger sa mère, il entreprend de détruire sa maison. À sa grande surprise, un inconnu le devance sur le chemin de sa vengeance et massacre tous ceux qui semblent posséder une partie du puzzle de la sombre histoire des Monge. Revoici, dans un Blu-ray de qualité, ce film de 1988 qui s’inscrit dans la dernière partie de la carrière de Georges Lautner, durant laquelle le réalisateur des Tontons flingueurs n’a pas tourné beaucoup de succès. Ici, il adapte le roman éponyme de l’écrivain provençal Pierre Magnan. Si la mise en scène n’a rien de particulier, on apprécie, ici une atmosphère lourde sur fond de malédictions et de superstitions villageoises. Autour de jeunes comédiens comme Patrick Bruel dans le rôle de Séraphin Monge, Anne Brochet ou Ingrid Held (nommée aux César 1989 du meilleur espoir féminin), on retrouve avec plaisir nombre de visages connus du cinéma français des années 80, ainsi Yann Collette, Christian Barbier, Roger Jendly, Jean-Pierre Sentier, Martine Sarcey ou Jenny Clève… (Gaumont)
Expendables 4EXPENDABLES 4
L’histoire serait-elle un éternel recommencement ? Voilà 25 ans, Barney Ross n’avait pas réussi à mettre hors d’état de nuire un mystérieux terroriste nommé Ocelot. Revoilà donc les Expendables envoyés en Libye pour empêcher le mercenaire Suarto Rahmat de voler des têtes nucléaires pour le compte du redoutable Ocelot qui prévoit de provoquer la Troisième Guerre mondiale en laissant exploser les têtes nucléaires dans l’Extrême-Orient russe. Barney retourne donc au taf avec son habituelle équipe (Lee Christmas, Toll Road et Gunner Jensen) mais aussi quelques nouveaux venus… Cependant, ils sont mis hors d’état de nuire lorsque tous leurs véhicules sont détruits. Lorsque Rahmat abat leur avion, l’équipe trouve le corps brûlé de Barney dans les décombres, identifié par sa bague. Aux funérailles de Barney à La Nouvelle-Orléans, la team est rejointe par Marsh, nouvel agent de liaison de la CIA auprès des Expendables… Mais est-on bien certain que Barney est mort ? Le réalisateur Scott Waugh remet donc le couvert avec cette aventure dont on sait d’entrée où elle va nous mener. Mais les scènes d’action s’enchaînent et pour peu qu’on ne soit pas attentif à des transparences un peu indigentes ou des effets numériques « modestes », on peut jeter un œil. D’autant que ces Expendables sont l’occasion de retrouver Sylvester Stallone (Barney), Jason Statham (Lee Christmas), Dolph Lundgren (Gunnar Jensen), Randy Couture (Toll Road) avec de petits nouveaux comme Curtis « 50 Cent » Jackson, Megan Fox ou Andy Garcia. (Metropolitan)
24H NewYork24 HEURES A NEW YORK
Jeune homme trans, Feña mène une existence trépidante à New York. Au cours d’une seule journée, son père chilien, son ex-petit ami et sa demi-sœur de 13 ans refont surface dans sa vie. Ayant perdu contact avec eux depuis sa transition, Feña (l’acteur trans Lio Mehiel) va être contraint de réinventer ces anciennes relations, tout en gérant, au fil de 24 heures pleines de galères, les défis quotidiens liés à sa nouvelle identité… Dans son premier film, Vuk Lungulov-Klotz, réalisateur américain de 28 ans, retrace, à travers cette œuvre, son parcours d’homme trans. Une fiction très personnelle pour le cinéaste qui souhaite rendre cette histoire accessible à toutes et tous, y compris aux personnes non-trans. C’est ce qui fait la particularité du film puisqu’il se construit au fil des rencontres de Feña avec ses proches. Ainsi, on dispose du point de vue de chacun, mettant en lumière la complexité que le protagoniste peut vivre face aux regards des autres, cela de l’incompréhension au rejet en passant par des jugements violents. Autour de l’identité de genre -un sujet très présent aujourd’hui dans les débats de société- voici une œuvre attachante et même souvent bouleversante qui aborde, dans un récit fort, la question avec justesse et finesse. Mieux, avec une approche volontiers minimaliste mais très efficace, le cinéaste soigne une mise en scène reposant sur une belle photographie à la lumière veloutée. 24 heures riches en émotions et en tendresse pour faire vivre un message profondément humain. (Blaq Out)
Comme LouveCOMME UNE LOUVE
Lili est effondrée… Cette mère précaire et isolée de trois enfants, âgée de 26 ans, est accusée à tort de mauvais traitements envers ses petits. Les services sociaux lui retirent ses gamins. Complètement cassée, elle va heureusement pouvoir compter sur d’autres femmes qui la soutiendront dans sa bataille pour reconstruire sa famille… Grand reporter (pour les magazines Résistances ou Envoyé spécial) et documentariste, Caroline Glorion choisit, ici, la fiction pour mettre en lumière la difficile vie quotidienne de cette Lili qui n’arrive pas à se contrôler, ni prendre les meilleures décisions pour le bien des siens. Pourtant cette mère en détresse professe un amour sincère et inconditionnel pour des gamins qui sont le moteur de son existence et on ne peut s’empêcher de crisper les poings devant ce qui lui arrive même si on voit bien qu’elle a du mal à assurer le bien-être de ses petits. Entourée d’acteurs et actrices chevronnés (Sandrine Bonnaire, Laurence Côte, Naidra Ayadi, François Morel), Mathilde La Musse incarne impeccablement cette Lili pathétique. Enfin, on prête attention au personnage de l’avocate (Sarah Suco) qui observe qu’en France, les deux tiers des enfants placés le sont en raison de la situation sociale et économique de leurs parents. (Blaq Out)
Nuit CometeLA NUIT DE LA COMETE
À la suite du passage d’une comète à proximité de la Terre, presque toute la population de la planète est décimée. Regina et sa jeune sœur Samantha survivent et trouvent refuge dans le studio d’une radio locale. Elles y trouvent un chauffeur-routier qui, lui aussi, a survécu. Dans un monde désormais sans règles, les jeunes filles décident d’aller refaire leur garde-robe dans les centres commerciaux. Mais certains survivants, en partie irradiés, ont été transformés en zombies devenus agressifs… Dans la foulée du fameux Madmax (1979), s’ouvre, dans le cinéma, une vogue pour les sujets post-apocalyptiques dans laquelle s’inscrit la série B signée, en 1984, par Thom Eberhardt. Avec une mise en scène enlevée qui joue, avec un certain brio, sur les couleurs, le cinéaste américain s’intéresse, entre horreur et science-fiction, à deux sœurs qui n’ont rien de victimes puisqu’elles savent se défendre et tirer au pistolet mitrailleur Uzi. A la fois angoissant et léger mais sans tomber dans le parodique, Night of the Comet (en v.o.) a connu un joli succès dans les salles outre-Atlantique… En supplément, un livret (24 pages) de Marc Toullec décrypte la genèse du film. (Rimini Editions)

L’OPTIMISME (MESURÉ) DE KAURISMAKI ET LA VÉRITÉ DE GOLDMAN  

Feuilles MortesLES FEUILLES MORTES
Diantre que la vie est triste en Finlande ! D’entrée, la caméra de Kaurismaki se plante dans un supermarché sans âme et elle glisse sur un chariot encombré de viande sous vide. Pas follement appétissant. Dans le vestiaire, une employée enfile un petit imper bleu pâle. « A demain ! » lance une collègue. Ansa rentre chez elle. La ville, la nuit. Un petit appartement aux murs bleus avec un canapé rouge. La radio raconte la guerre en Ukraine, les frappes russes, les morts, les blessés, la maison de Serguei détruite et les larmes de Tatiana. La femme éteint la radio. Sur un chantier, un homme en combinaison et casque intégral nettoie des pièces de métal. Il s’interrompt pour boire discrètement de l’alcool dans une petite fiasque. Plus tard, allongé sur son lit dans le dortoir de son usine, Holappa lit une bande dessinée. Deux personnes solitaires se rencontrent par hasard une nuit à Helsinki et chacun tente de trouver en l’autre son premier, unique et dernier amour. Mais la vie a tendance à mettre des obstacles sur la route de ceux qui cherchent le bonheur. Le 19e opus d’Aki Kaurismaki est une pépite de plus. Le Finlandais avait annoncé sa retraite en 2017 à Cannes. Pour notre plus grand bonheur, il a choisi d’en sortir pour donner le dernier volet de sa trilogie du prolétariat entamée en 1986 avec Ombres au paradis et poursuivie en 1990 avec La fille aux allumettes. Comme à son habitude, le cinéaste semble se tenir, non pas à bonne distance mais à une distance pudique, comme pour ne pas empiéter sur l’existence de ses deux prolétaires qu’il observe avec un soin d’entomologiste. Ainsi, ces êtres fragiles nous deviennent complètement familiers. Ansa sera virée sans préavis, de son supermarché. Holappa le sera parce qu’il est surpris en train de boire sur les chantiers. Ansa et Holappa se sont croisés dans un bar-karaoké. Ils se sont regardés. L’une et l’autre ont pensé que, peut-être, un avenir pouvait s’ouvrir à eux. Au sortir d’une séance de cinéma, Ansa (Alma Pöysti) a confié son numéro de téléphone à Holappa. Mais celui-ci perd le bout de papier sur lequel était griffonné le précieux sésame. Ansa attendra un appel qui ne viendra pas. Et Holappa (Jussi Vatanen) reviendra régulièrement attendre devant le cinéma Ritz. Mais ces deux solitudes réussiront cependant à se reconnecter… Presque optimiste, Kaurismaki signe, avec de multiples références à ses passions cinéphiliques, une œuvre où deux êtres semblent seuls, voire étrangers au monde, filmés en plan fixe, frontalement, dans des décors souvent composés de grands à-plats colorés. Avec de la musique et un (indispensable) chien pour atténuer la solitude des humains. La fin est un bijou d’émotion. Rescapé d’un accident de train, Holappa retrouve Ansa. Sur une vaste esplanade, on les voit, de dos, s’éloignant vers la lumière… Chaplin-Kaurismaki, même combat. Celui des opprimés contre le monde. (Diaphana)
Procès GoldmanLE PROCES GOLDMAN
Extraordinaire parcours que celui de Pierre Goldman ! Né le 22 juin 1944 à Lyon, il est le fils de deux héros de la résistance juive communiste en France. Etudiant à la Sorbonne, il milite contre la guerre d’Algérie. Lorsqu’arrive mai 68, Goldman file en Amérique latine rejoindre Che Guevara. C’est un type amer, déprimé, déboussolé et démuni qui rentre en France en 1969. Le guérillero vire au gangster. Il commet plusieurs braquages, vole des sommes parfois dérisoires. Le 19 décembre 1969, son existence bascule… Il attaque une pharmacie du boulevard Richard Lenoir à Paris. Le hold-up finit dans le sang. Deux pharmaciennes sont tuées et un policier en civil, alors en repos mais qui se précipite sur les lieux, est sérieusement blessé. Arrêté en 1974, Pierre Goldman est condamné, pour ces faits, à la réclusion criminelle à perpétuité par la cour d’assises de Paris. En novembre 1975, débute le deuxième procès de Pierre Goldman. Il continue à clamer son innocence dans le dossier du double meurtre de la pharmacie du boulevard Richard Lenoir. C’est un véritable huis-clos judiciaire que propose Cédric Kahn avec cette plongée dans les arcanes d’un procès d’assises qui prend souvent une forme très houleuse… Le cinéaste découvre Goldman par son livre, Souvenirs obscurs d’un Juif polonais né en France et est frappé par sa langue, son style, sa pensée. Kahn estime que le film à faire, ce n’est pas le biopic mais le procès. On plonge ainsi dans une œuvre âpre, grave, sèche mais puissante qui s’en va chercher, si faire se peut, la vérité « à l’os ». Pas de flash-backs, pas d’images de braquage, pas de musique, pas de comédiens célèbres. Mais une mise en scène qui installe constamment la tension. Le cinéaste n’entend pas créer de point de vue ou de l’empathie mais placer le spectateur dans la position du juré. Sans fioritures. Dans ce théâtre de la justice, montent quasiment en scène les acteurs professionnels que sont le président, le procureur de la République ou encore les avocats de la partie civile ou de la défense. A l’audience, tous joueront leur rôle. Et puis, évidemment, il y a Goldman, accusé hors normes, qui donne à ce procès des accents impressionnants. Car ce militant d’extrême gauche, qui devint en quelques semaines l’icône de la gauche intellectuelle, est installé dans une posture de combat. Insaisissable et provocateur, vif et brillant dans ses répliques, Goldman lance aussi « Je suis innocent parce que je suis innocent ». Surtout Goldman (remarquablement incarné par Arieh Worthalter) est une « star » au charisme remarquable qui réussit à prendre, avec éloquence et verve, la main sur son procès. Un homme qui affirme « Je suis né et mort le 22 juin 1944 ». Car le film pose aussi la question de la judéité à travers un Goldman qui se définissait comme « un enfant de la Shoah ». L’aventure s’achèvera le 20 septembre 1979 lorsque Pierre Goldman est abattu en plein Paris. (Ad Vitam)
BernadetteBERNADETTE
Nous sommes le 7 mai 1995 et Jacques Chirac remporte, avec 52,64 % des suffrages, l’élection présidentielle face à Lionel Jospin. La droite a reconquis le pouvoir et s’ouvre, après deux mandats de François Mitterrand, les portes de l’Elysée. Chirac goûte pleinement son succès, reçoit longuement les vivats de la foule… A deux pas du président, Bernadette Chirac savoure, elle aussi, l’instant. Parce qu’elle sait quelle fut sa part dans l’accession de son mari à l’Elysée, parce qu’elle pense aussi obtenir enfin la place qu’elle mérite. Mais Jacques Chirac va plutôt la refroidir lorsqu’il lance « Souvenez-vous de la chance de m’avoir épousé ! » Bernadette avale une couleuvre de plus. Il est vrai que Bernadette, née Chodron de Courcel, élevée dans une famille catholique pratiquante, a reçu une éducation stricte et sévère. Chez les Chodron, une fille, ça se tait et ça écoute. Elle rencontre son Jacques en 1951 lorsqu’ils sont, tous les deux, étudiants à Sciences Po. Ils se marient en mars 1956 malgré les réticences de la famille de la mariée. Bien des années plus tard, Bernadette dira que ce n’était « pas qu’un mariage d’amour mais un mariage d’ambition ». C’est une femme effacée, cantonnée à un rôle qui ne lui convient pas, à laquelle s’attache, pour son premier long-métrage de fiction, Léa Domenach. En choisissant la comédie pour garder une bonne distance par rapport aux faits et à la vraie histoire, la cinéaste se concentre sur un personnage qu’elle ne perd jamais de vue. Bernadette Chirac est toujours au centre de ce récit où elle apparaît d’abord écrasée par son entourage, délaissée aussi, toujours reléguée dans l’ombre avant d’entamer une véritable éclosion. Elle va trouver, en Bernard Niquet (Denis Podalydès), un allié qui va favoriser une véritable révélation. La première dame sort du bois, prend le taureau par les cornes et s’impose comme une personnalité incontournable dans la galaxie Chirac. Bernie n’a pas sa langue dans la poche et Claude (Sara Giraudeau) tance sa mère : « Tu ne peux plus dire tout ce que tu penses ! » En jouant habilement sur le look et les sons des années 90 et 2000, Bernadette se déguste comme une satire bienveillante et volontiers attachante. S’étant rendue compte sur le tard qu’on ne la prenait pas au sérieux parce qu’elle était une femme, Bernadette Chirac, en montrant ses crocs, va affirmer un certain féminisme… Et le film ne pouvait trouver meilleure interprète que Catherine Deneuve. On suit avec bonheur la manière dont la brillante comédienne « réveille » littéralement sa Bernadette. Au passage, Léa Domenach étrille tant Chirac (Michel Vuillermoz) qu’une classe politique triviale et suffisante. Après la vision du film, on se réconcilie (quasiment) avec cette femme forte. (Warner)
Fleur Pale GonzaCOFFRET MASAHIDO SHINODA
Révélé au même moment que Nagisa Oshima ou Kiju Yoshida, le cinéaste japonais Masahiro Shinoda (qui avait été assistant de Yasujiri Ozu dans les années cinquante) fait partie de ces cinéastes exaltés et fiévreux qui éclosent au début des années 1960. Considéré comme l’un des meilleurs représentants de la nouvelle vague nippone, le réalisateur de Silence (1972) et L’étang du démon (1979) aime filmer la marge, les minorités, et le prouve de la plus belle des façons avec ces deux longs-métrages tournés à plus de vingt ans d’écart : Fleur pâle (1964), film noir flamboyant, et Gonza, le lancier (1986), sublime drame sur fond de code d’honneur, lauréat de l’Ours d’argent de la meilleure contribution artistique à la Berlinale de 1986. Dans Fleur pâle, Muraki, après avoir purgé une peine de trois ans pour homicide, réintègre son clan de yakuzas à Tokyo. En reprenant ses activités clandestines, il fait la connaissance de Saeko, qui fréquente son cercle de jeux. Il est bientôt fasciné par cette énigmatique jeune femme, elle-même irrésistiblement attirée par le monde de la nuit… Avec Gonza, le lancier, on suit les aventures de ce lancier de renom qui affronte Bannojo, un membre de son clan, pour avoir l’honneur d’accomplir la cérémonie du thé célébrant la naissance d’un héritier de leur seigneur. Pour voir les rouleaux sacrés détaillant les secrets de la cérémonie, Gonza promet d’épouser la fille de la famille qui les possède, bien qu’il soit déjà fiancé à une autre. Alors qu’il étudie les rouleaux avec Osai, la mère de la maison, Bannojo les espionne puis court proclamer dans toute la ville qu’ils ont commis un adultère… Un beau coffret regroupe ces deux œuvres fulgurantes et radicales à découvrir pour la première fois dans leur restauration 4K ! Dans les suppléments, on trouve Esthétique de la clandestinité (16 mn), un entretien filmé en 2006 où Shinoda évoque pêle-mêle l’esthétique des cartes hanafuda, l’influence des yakuzas sur la société et le monde politique japonais, ainsi que la réception de Fleur pâle, jugé « immoral » par la censure. Enfin Fleur du mal (24 mn) est un entretien avec Stéphane du Mesnildot, essayiste, spécialiste du cinéma asiatique. (Carlotta)
Visage EcritVISAGE ECRIT
A l’instar de ses confrères romands Soutter, Tanner ou Goretta, le cinéaste alémanique Daniel Schmid (1941-2006) est l’une des figures marquantes du nouveau cinéma suisse. Il donna des œuvres majeures comme La Paloma (1974), L’ombre des anges (1976), Violanta (1977) ou Hécate, maîtresse de la nuit (1982). Avant d’achever sa carrière en 1999 avec Beresina ou les derniers jours de la Suisse, une virulente comédie noire sur une call-girl russe débarquant dans un pays montagneux et féérique, Schmid avait signé, en 1995, Visage écrit, un documentaire qui constate l’agonie du monde des geishas et présente le portrait d’un acteur de kabuki ainsi que d’inoubliables moments de mime au crépuscule. Il y a bientôt quatre siècles, une loi impériale japonaise imposa que les rôles de femmes dans le théâtre kabuki soient tenus par des hommes, appelés onnagata. Visage écrit de Daniel Schmid est une tentative d’approche de Tamasaburo Bando, le plus prestigieux onnagata contemporain. Ce grand acteur de kabuki, qui a également tourné pour le cinéma (L’étang du démon de Masahiro Shinoda dont Carlotta sort par ailleurs deux perles rares), est considéré comme un véritable « trésor vivant », acclamé aussi bien par Rudolf Noureev que par Yukio Mishima. Dans ce film conçu en quatre parties, le réalisateur suisse livre une œuvre hybride qui abolit les genres et les codes, naviguant allègrement entre fiction et documentaire, Japon moderne et traditionnel. À travers les portraits croisés de Tamasaburo Bando et de ses illustres aînés, comme l’actrice Haruko Sugimura ou le danseur Kazuo Ohno, Visage écrit sonde l’âme de cet art en voie de disparition et rend hommage à ces figures éternelles de la culture nippone. À découvrir pour la première fois dans sa nouvelle restauration 4K. (Carlotta)
Air Mer Rend LibreL’AIR DE LA MER REND LIBRE
Rennes, de nos jours. Saïd habite encore chez ses parents. Le quasi-trentenaire vit une liaison secrète avec Vincent, un musicien de jazz. Incapable d’affronter sa famille, il accepte un mariage arrangé avec Hadjira. « Alors, les tourtereaux, ça va ? » La question de l’invitée à la noce n’est pas bien méchante mais pour les tourtereaux, elle résonne étrangement. Après une histoire d’amour malheureuse et quelques démêlés avec la justice, Hadjira aussi s’est résignée à obéir à sa mère. Piégés par leurs familles, les « tourtereaux » s’unissent malgré eux, pour retrouver, chacun de son côté, leur liberté. Après des films très remarqués comme Le harem de Madame Ousmane (2000), Viva Laldjérie (2004), Délice Paloma (2007) ou Lola Pater (2017), le cinéaste franco-algérien Nadir Moknèche signe une douloureuse chronique où il en va, in fine, de l’honneur des familles. Pour Saïd, sa famille, avec en tête Zineb, sa mère, et Mahmoud, son père, ne comprend pas qu’il soit toujours célibataire. Et ils trouvent même la chose anormale. Pour Rabia, la mère d’Hadjira, il importe de sauver la face. Car sa fille a eu le malheur de tomber amoureuse d’un dealer qui l’a entraînée dans ses embrouilles. Avec beaucoup d’humanité et de finesse, le cinéaste se penche sur Saïd et Hajira et observe comment ils tentent d’organiser, sans être franchement dupes l’un et l’autre, leur situation d’époux et d’épouse. Et il peut ainsi lutter contre les clichés, les à-priori et toutes les « bonnes raisons ». Face à des comédiens chevronnés comme Zinedine Soualem ou Lubna Azabal, Youssouf Abi-Ayad et Kenza Fortas (César du meilleur espoir féminin 2018 pour Shéhérazade) campent avec beaucoup de délicatesse deux personnages ballottés par les événements. (Pyramide)
Lost NightLOST IN THE NIGHT
Dans une petite ville minière du Mexique, Emiliano recherche les responsables de la disparition de sa mère. Activiste écologique, elle s’opposait à l’industrie minière locale. Ne recevant aucune aide de la police ou du système judiciaire, ses recherches le mènent à la riche famille Aldama. Au-delà des parents, le père est artiste, la mère actrice, il rencontre leur ravissante fille qui joue les influenceuses. Engagé par les Aldama, Emiliano (Juan Daniel Garcia Trevino) n’entend pas s’éloigner du but qu’il s’est fixé… Peut-être moins connu que ses confrères Cuaron, Del Toro ou Inarittu, le Mexicain Amat Escalante est cependant un cinéaste reconnu et apprécié des cinéphiles qui a été pas moins de quatre fois sur la Croisette, notamment en 2013 avec Heli, violente évocation du trafic de drogue, couronné d’un prix de la mise en scène. Du côté de la Mostra de Venise en 2016, Escalante avait surpris, cette fois, avec un conte fantastique (La région sauvage) sur fond de sexualité et de bête étrange. Avec Perdidos en la noche (en v.o.), Escalante était de retour au festival de Cannes avec un thriller social palpitant, qui emporte le spectateur au cœur d’un pays gangréné par la violence et les inégalités. Tour à tour satire noire de la société mexicaine, dénonçant les fléaux que sont la corruption, la violence policière, les narco-trafiquants, ou encore l’exploitation des pauvres par les riches, le scénario de Lost in the night s’élargit à des thèmes plus universels tels que les dérives liées aux réseaux sociaux, le profit avant l’écologie, voire même les excès de l’art contemporain. Bien photographiée, bien interprétée, voici une chronique criminelle sèche et brutale sur la noirceur de la société mexicaine. (Blaq Out)
Ete DernierL’ETE DERNIER
Avocate pénaliste renommée et spécialisée dans les violences sexuelles faites aux mineurs, Anne s’occupe d’un dossier qui finira aux assises où « souvent les victimes passent pour des accusés ». A sa cliente, elle donne un conseil : « Toujours dire la vérité ». Anne vit en harmonie avec son mari Pierre et leurs deux jeunes fillettes. Un jour, Théo, 17 ans, fils de Pierre (Olivier Rabourdin) d’un précédent mariage, emménage chez eux. Odieux, Théo s’adoucit au contact d’Anne. Un jour, au gré d’une histoire de tatouages, s’installe entre les deux, un jeu de séduction qui les amène à une puissante relation charnelle… La réalisatrice de films jugés sulfureux (Breillat déteste le mot) comme Romance (1999) ou Anatomie de l’enfer (2004), reprend (librement) le thème d’un film danois (Queen of Hearts en 2019) et propose la chronique d’un amour « interdit » dans le contexte d’un milieu de nantis sans problème. Si on peut trouver que le drame bourgeois prend parfois des accents chabroliens, il faut dire que Catherine Breillat s’y entend pour filmer le désir et le plaisir dans de longs plans qui dilatent la sensation. En cédant à son beau-fils, Anne se précipite dans une liaison à laquelle elle voudra vite mettre fin. Mais Théo ne l’entend pas de cette oreille et il intrigue auprès de son père, flairant qu’Anne demeure bouleversée par leur liaison. La cinéaste se repose sur un fin duo d’acteurs avec Samuel Kircher en grand ado à la gueule d’ange et Léa Drucker brillante en executive woman énigmatique mais dévastée par une divine extase… (Pyramide)
Regne AnimalLE REGNE ANIMAL
Alors que le monde s’est déjà habitué à une épidémie de mutations qui transforment les humains en animaux, François doit déménager dans le sud de la France pour se rapprocher de sa femme Lana, touchée par ce mal mystérieux et envoyée dans un centre spécialisé. Sur place, lui et son fils Émile doivent se réinventer dans un monde qui se peuple de créatures d’un nouveau genre. Dans leur voiture, le père tente de dialoguer avec son fils qui regarde par la fenêtre et soupire. Il est question de la mère d’Emile… Sur l’autoroute, ils sont coincés dans un embouteillage. Banal et agaçant. Mais soudain, François et Emile observent, à deux pas d’eux, une ambulance violemment secouée de l’intérieur. La porte s’arrache. Une créature mi-homme, mi-oiseau s’enfuit… Les monstres sont (déjà) là ! Après Les combattants (2014) couronné d’un César du meilleur premier film, Thomas Cailley, qui s’appuie sur une idée de Pauline Munier, fait un retour en force avec un thriller réaliste doublé d’une touche de teen-movie mais surtout d’une fable fantastique impressionnante où les « humains » se métamorphosent inexplicablement en bêtes sauvages… Avec un excellent tandem de comédiens (Romain Duris et le jeune Paul Kircher), le cinéaste aligne les moments de bravoure au service d’un conte audacieux qui va suivre l’épopée d’un adolescent qui va se métamorphoser aussi… (Studiocanal)
Entre LignesENTRE LES LIGNES
Au printemps 1924, Jane Fairchild, jeune domestique au sein d’une famille anglaise endeuillée, devient la maîtresse de Paul Niven, un jeune homme de la haute bourgeoisie, fils des voisins de ses patrons. Des années plus tard, devenue écrivaine, Jane se remémore ce jour de fête des mères où pendant que les propriétaires partaient à un pique-nique, elle retrouvait secrètement cet amant… Remarquée avec Les filles du soleil sélectionné en compétition officielle au festival de Cannes 2018, la réalisatrice française Eva Husson a signé ensuite Mothering Sunday (en v.o.) qui met en scène, un peu dans l’esprit de Downton Abbey, l’aventure amoureuse d’une bonne et d’un jeune de la haute, lui-même promis à une autre femme de son rang. En adaptant un roman de Graham Swift, la cinéaste s’attache à une relation ténébreuse entre deux amoureux qui bravent les interdits d’une société organisée en classes. Déjà, dans Bang Gang (une histoire d’amour moderne), son premier long-métrage, en 2015, Eva Husson s’attachait à explorer la sexualité et les relations amoureuses chez de grands adolescents. Ici, encore, en travaillant de belles lumières, elle maîtrise les scènes intimistes en s’appuyant sur deux jeunes comédiens Odessa Young (Jane) et Josh O’Connor (Paul) dont la spontanéité de jeu, avec de nombreuses scènes de nudité, est remarquable. Enfin, la cinéaste peut se reposer sur un casting british de qualité avec notamment Colin Firth (le père de Paul), Glenda Jackson (Jane Fairchild âgée) et surtout l’excellente Olivia Colman (Oscar de la meilleure actrice pour La favorite en 2018), épatante en mère cynique et meurtrie à l’idée de perdre son fils unique… (Condor)
Mystere VeniseMYSTERE A VENISE
Dans la Venise de 1947, Hercule Poirot a choisi de prendre une retraite paisible. Le célèbre détective belge repousse fermement tous ceux qui sollicitent ses services. Pourtant, il prête l’oreille à Ariadne Oliver, la plus grande écrivaine de romans policiers au monde. Mais sa visite n’a rien à voir, dit-elle, avec un crime… Après Le crime de l’Orient-Express (2017) et Mort sur le Nil (2022), Kenneth Branagh s’attaque à nouveau à Agatha Christie en adaptant Hallowe’en Party, un roman tardif publié en 1969. Le film transpose l’action d’un manoir anglais à un palazzo vénitien mais le scénario de Michael Green s’appuie volontiers sur le goût de la romancière pour le surnaturel. Par une sombre nuit de tempête, Poirot se retrouve dans une maison (soit-disant) hantée mais, avec la mort violente d’une voyante, l’enquête prend une vilaine tournure. Il fait boucler toutes les portes. Le piège est refermé. L’assassin est dans les lieux… Bientôt une seconde mort brutale survient… Avec un récit soigné et des images léchées, Branagh réussit un agréable huis-clos où, comme à son habitude, il réunit un large casting (Kelly Reilly, Michelle Yeoh, Riccardo Scamarcio, Camille Cottin, Jamie Dornan, Tina Fey) et s’offre, avec une évidente gourmandise, un Poirot à l’accent français appuyé. Ah oui, Poirot va résoudre l’énigme ! (Fox)
Nouveau DepartNOUVEAU DEPART
« A l’éternelle jeunesse de la femme que j’aime ! » Alain lève son verre à Diane dont il est amoureux comme au premier jour. Lui a traversé la crise de la cinquantaine sans coup férir. Pour Diane, c’est moins évident. « Après trente ans ensemble, on n’est plus amoureux. On est un couple… » Et elle nie la réalité quand son généraliste lui parle de ménopause. Diane a la sensation de s’ennuyer dans son couple comme dans son travail dans le journalisme. Pour attirer l’attention de ses collègues, elle prétend avoir une liaison avec Stéphane, son jeune et nouveau supérieur. Alain, qui voit pour la première fois son couple vaciller, estime qu’il faut se poser les questions essentielles. Et s’il prenait le risque, après trente ans de vie commune, de quitter Diane pour réveiller la flamme et l’envie de se retrouver. Quitte ou double ? En s’inspirant du film argentin Retour de flamme de Juan Vera, Philippe Lefebvre (Le siffleur, Faites des gosses) orchestre une rencontre inattendue entre Karin Viard et Franck Dubosc qui partagent l’écran pour la première fois. En s’appuyant sur des comédiens qui semblent manifestement s’amuser, le cinéaste réussit des situations cocasses et des dialogues enlevés. Une bonne comédie agréable avec un propos dans l’air du temps. (Orange Sudio)

 

DES PROFS SOLIDAIRES ET LE VIEIL EBENISTE EN DEUIL  

Metier SerieuxUN METIER SERIEUX
« Y’en a beaucoup qui bloquent ? » C’est le prof de maths qui pose la question à sa classe. Benjamin débute dans le métier, lui qui se destinait à des études de médecine pour faire plaisir à son père, se retrouve maintenant à embrasser le boulot de sa mère tout en menant, tant bien que mal, une thèse de physique. Comme sa classe est bruyante, son voisin, Pierre, vient restaurer le calme, non sans prendre Benjamin pour un surveillant. Pierre est un vieux de la vieille. Il a tout vu, tout bu, tout lu. Mais aujourd’hui, il s’inquiète. Et si son cours de français était ennuyeux ? Avec Meriem, Fouad, Sophie, Sandrine, Alix et Sofiane, Pierre forme un groupe d’enseignants engagés et soudés. Ils seront présents pour aider Benjamin, rapidement confronté aux affres du métier. A leur contact, le petit nouveau va découvrir combien la passion de l’enseignement demeure vivante au sein d’une institution pourtant fragilisée… Thomas Lilti s’est fait remarquer avec Hippocrate (2014), Médecin de campagne (2016) et Première année (2018), trois films de cinéma (il a aussi signé trois saisons d’Hippocrate en série télé) qui traitent de la médecine. On est donc aussi surpris que ravi de le retrouver avec Un métier sérieux qui aborde l’univers des profs et de l’enseignement. Ravi parce que, comme pour ses précédentes œuvres, Lilti traite une nouvelle fois la fiction par le réel. Mais aussi par sa volonté de continuer à interroger la question de l’engagement à travers un (beau) métier. De fait, on sent dans Un métier sérieux une attention particulière à rendre le monde scolaire et la vie d’un collège les plus réalistes possibles. « L’école, dit le réalisateur, reste au cœur de nos vies que l’on soit enfant, adultes, parents, au fil des générations. Chacun y trouve une madeleine de Proust nous rappelant combien l’école est au centre de nos vies. » Sur la chanson de Sam Cooke, What A Wonderful World, le générique, avec ses images d’antan, nous le rappelle avec un soupçon de nostalgie. Voici, dans un récit éclaté, des portraits qui sonnent juste. Ses profs ne sont pas des saints mais des êtres qui ont la passion d’enseigner chevillée au corps. Ils ont la grandeur de ceux qui permettent de partager le savoir. Ils ont des faiblesses simplement humaines quand ils craquent devant des élèves assez paumés pour devenir insultants ou agressifs. On se plonge agréablement dans cette histoire d’autant plus qu’elle est défendue par de chouettes comédiens : Vincent Lacoste, François Cluzet, Adèle Exarchopoulos, Louise Bourgoin, William Lebghil, Lucie Chang, Théo Navarro-Mussy, Léo Chalié. On est prêt à retourner en classe avec eux. (Le Pacte)
La PetiteLA PETITE
Joseph Siprien est un taiseux. Veuf, ce solitaire de 68 ans ne sort guère de son atelier où il apporte toute son attention à de beaux meubles anciens. Sa vie organisée prend un terrible coup lorsqu’il apprend soudainement la mort de son fils, Manuel, et du compagnon de celui-ci, dans un accident d’avion. Même s’il n’était pas en bons termes avec son fils, Joseph gardait toujours espoir de pouvoir se réconcilier avec lui un jour. En découvrant que Manuel et son conjoint attendaient un enfant d’une mère porteuse en Belgique, le sexagénaire décidera de partir à la recherche de la jeune femme dans l’espoir de pouvoir prolonger l’existence de son fils à travers cet enfant. Mais, pour cela, il devra convaincre la mère, une jeune femme méfiante, peu accueillante et persuadée qu’elle s’est fait « avoir ». « Je ne suis qu’une mule », dit-elle. Plus de père à l’horizon, un enfant sur les bras et sans doute plus moyen de récupérer le reste de la somme due pour la mise à disposition de son ventre. Guillaume Nicloux est un cinéaste qui aime à s’aventurer sur les terrains les plus variés notamment dans le domaine du thriller. La tour (2023), son précédent film, était un drame fantastique autour d’habitants coincés dans leur immeuble par un inquiétant brouillard opaque. Cette fois, il adapte Le berceau (2018), le roman de Fanny Chesnel (qui collabore au scénario) pour mettre en scène une attachante comédie dramatique avec deux personnages qui ne devaient évidemment jamais se rencontrer. Car Joseph, contre l’avis de sa fille (Maud Wyler) mais aussi des parents du compagnon de Manuel, est décidé à retrouver la mère porteuse puis de jouer son rôle de grand-père. Pour cela, il s’en va à Gand où vit Rita Vandewaele, apparemment employée chez un loueur de vélos… Mais la rencontre avec Rita ne part pas sur de bons rails. Pour porter cette histoire intime, à laquelle il imprime quelques touches d’humour mais sans entrer dans un débat sur la GPA, le cinéaste peut compter sur deux excellents comédiens. En mère porteuse, la comédienne belge Mara Taquin (vue dans La syndicaliste de Jean-Paul Salomé) compose un beau personnage fragile et attachant. Dans le rôle de Joseph, Fabrice Luchini incarne un homme face au deuil. Le comédien est constamment dans la nuance. Et il n’est jamais aussi bon que lorsqu’il œuvre dans ce registre. (M6)
AcideACIDE
Selma, adolescente de 15 ans, grandit dans le Nord de la France, entre ses deux parents séparés, Michal et Elise. Alors que des nuages de pluies acides dévastatrices s’abattent sur leur région, cette famille fracturée va devoir s’unir pour affronter une catastrophe climatique et tenter de survivre dans un monde qui va bientôt sombrer. Avec La nuée (et ses inquiétants criquets), son premier long-métrage en 2020, Just Philippot s’impose comme chef de file du nouveau cinéma de genre français. Ici, autour de pluies si corrosives qu’elles dévorent les chairs, le cinéaste entraîne le spectateur, à la fois captivé et terrifié, dans une ambiance cauchemardesque de fin du monde où Michal et Elise se retrouvent emportés dans une course haletante contre la mort. Tandis que le ciel se charge d’énormes nuages menaçants, comme beaucoup d’autres, père, mère et fille sont jetés sur les routes, traversant des forêts au coeur desquelles galopent des chevaux blessés et fous de douleur, pour atteindre un lieu peut-être sûr… Entre le road-movie apocalyptique, le drame domestique et le film d’horreur, Acide distille, surtout dans sa première partie, une angoisse qui met les nerfs à vif. Guillaume Carnet incarne, avec une remarquable intensité, ce Michal qui n’en plus d’entendre annoncer, « la fin du monde tous les jours » mais qui va se grandir dans l’épreuve. A ses côtés, Patience Munchenbach (Selma) et Laetitia Dosch (Elise) participent bien à ce cauchemar éveillé. Un film-catastrophe qui interroge sur le vrai monde en proie au dérèglement climatique. (Pathé)
Coup ChanceCOUP DE CHANCE
Mariée à un richissime homme d’affaires qui la dorlote comme une femme trophée, l’épouse qui se veut rebelle et libérée s’ennuie ferme dans le monde chic et clinquant des beaux quartiers. Pour mieux s’intégrer, Fanny travaille dans une galerie de l’avenue Montaigne. C’est dans cette rue qu’elle se fait apostropher par Alain, écrivain bohème qui s’était follement entiché d’elle au lycée. Ces retrouvailles proustiennes se font sous le signe de l’insouciance et du désir. Bientôt inséparables, ces deux-là flirtent au Jardin des Plantes, déjeunent et flânent dans les rues d’un Paris aux teintes mordorées filmées par le maître Vittorio Storaro. Ils finiront par consommer un adultère presque innocent. Bien sûr, Fanny continue de jouer à l’épouse modèle dans les réceptions mondaines et les week-ends de chasse à la perdrix organisés par son mari. Pour son 50e long-métrage, Woody Allen tourne, pour la première fois, en français et il retrouve aussi la France où il avait mis en scène, dix ans auparavant, son Minuit à Paris. A 87 ans, le maître new-yorkais n’a rien perdu de sa verve et il orchestre une comédie de mœurs où l’humour, voire le sarcasme, s’insinue dans l’intrigue avant qu’elle ne tourne quasiment au thriller. On retrouve, ici, un beau casting français avec Lou de Laâge, Melvil Poupaud, épatant en mari possessif, bientôt manipulateur et vengeur, Valérie Lemercier, Niels Schneider, Gregory Gadebois ou Elsa Zylberstein. Coup de chance a été ovationné à la Mostra de Venise même si la projection a été perturbée par des manifestantes. On ne sait si ce conte agréablement féroce est le dernier Allen. Mais il laisse la porte ouverte « au cas où l’on viendrait le trouver avec un nouveau financement ». (Metropolitan)
Traitre TexasLE TRAITRE DU TEXAS
La guerre de Sécession a pris fin. Cavaliers sudistes démobilisés, les frères Hammond reviennent au Texas dans le ranch familial. Si le cadet Neil envisage de continuer l’exploitation avec son père Ira, l’ainé Dan est plus ambitieux et veut faire fortune le plus rapidement possible, sans s’embarrasser de scrupules. Lors d’une partie de poker en ville, il se heurte à Cord Hardin, l’homme le plus riche d’Austin qui n’apprécie pas qu’il fasse les yeux doux à son épouse Lorna. Hardin force Dan à s’endetter au jeu et l’humilie publiquement. Dan quitte la ville et prend le commandement d’un groupe de réprouvés, mêlant anciens déserteurs et délinquants. Il organise avec eux un trafic de bêtes volées qu’il revend dans une zone franche contrôlée par un général mexicain, puis s’enrichit par diverses spéculations et entreprend de spolier les petits propriétaires de la région pour rivaliser avec la domination territoriale d’Hardin… Considéré comme l’un des grands du western américain avec Ford, Hawks, Mann, Sturges et Daves, Budd Boeticher signe, en 1952, une remarquable variation autour du difficile retour des soldats à la vie civile mais aussi sur les conflits familiaux qui les opposent. Dans un technicolor flamboyant et en s’appuyant sur un solide scénario de Louis Stevens, Boetticher est aussi à l’aise avec des scènes intimistes sur de forts liens familiaux qu’avec des séquences d’action. Par ailleurs, il peut compter sur d’excellents comédiens, Robert Ryan en tête dans le rôle de Dan, personnage torturé qui affirme : « Cruauté et ambition sont ancrées en moi ». A ses côtés, on trouve Rock Hudson (Neil Hammond) et aussi la belle Julie Adams qui incarne Lorna, une femme libre. Les seconds rôles (Raymond Burr, John McIntire, Dennis Weaver) sont excellents aussi. (Sidonis Calysta)
VisionsVISIONS
Pilote de ligne expérimentée, Estelle alterne les vols long-courriers et sa vie de couple avec son mari Guillaume. Malgré le jet lag et quelques troubles du sommeil, Estelle a une vie parfaite et bien organisée. Tout cela va être chamboulé du jour au lendemain quand, à l’aéroport de Nice-Côte d’Azur, Estelle retrouve par hasard Ana, une photographe avec laquelle elle était en couple il y a plus de 20 ans… Dans son précédent film, Boîte noire (2021), Yann Gozlan plongeait déjà dans l’univers de l’aéronautique avec l’enquête d’un agent du BEA (Pierre Niney) sur la chute mystérieuse et suspecte d’un vol Dubaï-Paris en Haute-Savoie. Le cinéaste retrouve donc ce monde à travers un thriller qui débute dans le cockpit d’un long-courrier. Mais cette fois, pas d’Emergency, emergency ! Le vol commandé par le commandant Estelle Vasseur se déroule sans anicroches. Mais le poste de pilotage finira, au gré de l’état psychologique d’Estelle, par devenir quasiment un personnage de l’intrigue. Yann Gozlan maîtrise sa mise en scène et, en cinéphile, parsème son propos de références à ses maîtres (Brian de Palma, notamment pour son goût du voyeurisme) et forcément à Sir Alfred. Estelle n’est pas grande, blonde et un peu glacée par hasard. Visions est un thriller fantastique de belle tenue. Mathieu Kassovitz incarne Guillaume, le mari tandis qu’Estelle (Diane Kruger) et Ana (Marta Nieto, vue, excellente, dans Madre de Sorogoyen) sont emportées dans la tourmente des sens. (M6)
Livre SolutionsLE LIVRE DES SOLUTIONS
Rude journée pour Marc Becker ! En réunion avec ses financiers, le cinéaste s’entend dire, tout de go, que son film est un pur navet. Et qu’on arrête les frais. Bien sûr, il accuse le coup mais Becker n’est pas prêt à se laisser abattre. Avec ses deux collaboratrices, il embarque le banc de montage, le charge dans une camionnette et en route pour la campagne française, entre Lozère et Gard. Le voilà dans le petit village cévenol où vit sa tante Denise (la merveilleuse Françoise Lebrun). Notre artiste, qui décide de noter ses pensées dans son livre des solutions, est alors assailli par un million d’idées, toutes plus baroques les uns que les autres qui le plongent dans un absolu chaos ! C’est dans la maison de sa tante Suzette, sa plus inconditionnelle admiratrice, que Michel Gondry a tourné Le livre des solutions. Avec son douzième long-métrage, le réalisateur de Eternal Sunshine of the Spotless Mind (2004) ou Soyez sympas, rembobinez (2008) évoque un épisode lors de la post-production de L’écume des jours (2013) où il était sous médicaments et assailli d’obsessions intenses l’empêchant carrément de vivre. Lorsqu’il entreprend le montage du film, il arrête son traitement. Et son esprit explose dans un mélange de mégalomanie et de terreur. Par moments, il se sent faire partie de l’Histoire et capable de créer des choses totalement innovantes. Peu après, un psychiatre le diagnostique bipolaire. Tout cela figure en longueur dans cette comédie bien barrée (qui aurait sans doute gagné à être plus rythmée) dans laquelle Pierre Niney, le regard halluciné, s’en donne à coeur joie dans le délire créatif. C’est déroutant, burlesque, loufoque, poétique, parfois un peu pathétique… (The Jokers)
RealityREALITY
Le 9 mai 2017, Reality Winner, linguiste spécialiste du persan et du pachto pour le compte de la NSA, ancien membre de l’US Air Force, regarde les actualités, qui parlent du renvoi de James Comey, directeur du FBI, par Donald Trump. Le 3 juin, à Augusta, des agents du FBI se présentent chez elle, perquisitionnent sa maison et la soumettent ensuite à un interrogatoire courtois, mais serré, au sujet de la fuite de documents classifiés liés à un rapport concernant des accusations d’ingérences russes dans l’élection présidentielle américaine de 2016, dont ils savent qu’elle l’a consulté et imprimé au début du mois de mai. Avec Reality, Tina Satter se penche sur le cas de Reality, une jeune lanceuse d’alerte âgée de 25 ans. La cinéaste américaine utilise, pour ses dialogues (elle l’indique dès le générique) la transcription précise et exacte de l’enregistrement audio réalisé par le FBI, installant ainsi le spectateur dans une fiction qui n’échappe jamais à la réalité qu’elle veut remettre en scène. Reposant sur une réelle étrangeté et distillant une atmosphère particulièrement anxiogène, Reality -qui documente brillamment les méthodes psychologiques du FBI- montre les agents amenant doucement la jeune femme à se livrer. On parle, de façon tout à fait badine, des animaux domestiques de Reality ou des courses qu’elle doit mettre au frigo. Et puis, lentement, les policiers vont faire émerger la vérité cachée de Realty soupçonnée d’avoir violé le fameux Espionage Act en faisant fuiter un document classifié, révélant une tentative de piratage russe du système de vote électronique lors de l’élection qui a sacré Donald Trump, un an plus tôt… La comédienne Sydney Sweeney (vue dans les séries Sharp Object, Euphoria, The White Lotus) est impressionnante en personnage bousculée qui finit par lâcher : « Est-ce que j’irai en prison ce soir ? » (Metropolitan)
Toni FamilleTONI EN FAMILLE
Dans la voiture où s’empilent littéralement ses cinq enfants (qui va prendre place dans le -vaste- coffre?), Toni craque devant les « Ouais ! » et les « Mais j’ai rien fait ». Elle crie qu’elle ne veut plus les entendre et menace : « Je vais changer de famille ». Mots en l’air ! Parce qu’Antonia, dite Toni, les aime trop. Même si Mathilde, Marcus, Camille, Timothée et Olivia lui donnent bien du fil à retordre. Parce que ce sont simplement (?) de petits et de grands adolescents. Alors Toni fait face. Elle occupe tous les jobs de mère au foyer, tâche de joindre les deux bouts et, le soir, chante dans le bar d’une amie. Mais Toni est épuisée. Ses deux grands s’apprêtent à quitter la maison, l’une pour une compagnie de danse à Budapest, l’autre pour l’université. Alors Toni s’interroge : que fera-t-elle quand toute sa progéniture aura quitté le foyer ? A 43 ans, est-il encore temps de reprendre sa vie en main ? A 18 ans, Nathan Ambrosiani signait son premier long-métrage (Les drapeaux de papier en 2018) et il enchaîne avec une très belle chronique familiale portée par le personnage, à la fois drôle et pathétique, de Toni. Le cinéaste peaufine un portrait tout en nuances de cette Toni qui a connu la gloire avec une chanson qui a très bien marché au box-office. Mais c’était il y a 20 ans et elle ne regrette rien. Aucune nostalgie pour son ancienne notoriété. Elle continue à chanter parce que c’est son gagne-pain. Et elle regrette de laisser ses enfants seuls le soir pour aller faire ce travail dont elle n’a plus envie. Lorsqu’elle décide de devenir enseignante, c’est une nouvelle course d’obstacles qui se présente à elle. Voilà le temps des bilans de compétences, des demandes de soutien financier… Mais Toni s’accroche. Entre grosse fatigue et éclats d’énergie, Camille Cottin, tout en langueur mêlée d’autorité et de tendresse, est remarquable et porte parfaitement cette aventure intime. (Studiocanal)
Fille Belle StarrLA FILLE DE BELLE STARR
Après que sa mère, la hors-la-loi Belle Starr, ait été tuée, sa fille Rose décide de marcher sur ses pas et de rejoindre la bande de Bob Yauntis qui multiplient les coups de force et les attaques meurtrières. Son objectif : se venger du marshall Tom Jackson qu’elle croit coupable du meurtre de la femme qui l’a mise au monde. Peu à peu, elle se rend compte qu’elle est dans l’erreur, que c’est son « ami » Yauntis qui est le tueur et non point Jackson qui, d’ailleurs, ne fait pas mystère de ses sentiments à son égard. Voici un film sur lequel plane l’ombre de Belle Starr (1848-1889), l’une des plus célèbres femmes hors-la-loi de l’Ouest américain. Sur le grand écran, elle fut incarnée par Gene Tierney en 1941, Elsa Martinelli en 1968 et Elizabeth Montgomery en 1980 et, ici, Isabel Jewell qui avait déjà tenu le rôle deux ans plus tôt dans Badman’s Territory. Déjà présent deux fois dans la collection western de Sidonis Calysta (avec Fort Yuma et La loi du scalp), c’est Lesley Selander, l’un des plus prolifiques réalisateurs de western, qui, en 1948, est derrière la caméra pour cette aventure portée par Ruth Roman (L’Inconnu du Nord-Express, Je suis un aventurier ou Dallas, ville frontière) qui fait face à deux solides vedettes westerniennes, George Montgomery (Tom Jackson) et Rod Cameron (Bob Yauntis). Dans la collection Westerns de légende, La fille de Belle Starr parait pour la première fois en Blu-ray. (Sidonis Calysta)
Veuillez Nous ExcuserVEUILLEZ NOUS EXCUSER POUR LA GENE OCCASIONNEE
Contrôleur de train à la SNTF, Sébastien est un bon professionnel qui rêve d’être muté dans le sud de la France. Pour valider sa mutation, il doit effectuer, au départ de la Belgique, un dernier trajet sous la supervision de Madeleine, une inspectrice qui ne va pas le lâcher. Evidemment, tout va… dérailler. Avec un conducteur de train qui pense conduire un avion de chasse, avec Simon, un collègue très jaloux qui pensait bien décrocher le poste de Sébastien et qui, désormais, n’a plus qu’une obsession : envoyer tous les passagers à la mort. Et, parmi ces passagers, Sébastien va être confronté à une série de « gros cas ». Pour les amateurs de comédies joyeusement déglinguées, le nom de Nicolas Van Hoofstadt n’est pas inconnu. C’est lui qui, en 2006, signa le savoureux Dikkenek dans lequel François Damiens livra un grand numéro de délire ! Le cinéaste belge remet le couvert avec une aventure saugrenue qui réunit cette fois Artus et l’humoriste Benjamin Tranié en compagnie d’Elsa Zylberstein dans un rôle aux antipodes de ses précédents personnages puisqu’elle incarne une Madeleine hystérique et sociopathe. Autour de Sébastien et Madeleine et de wagons en wagons, les gags s’enchaînent mais le film peine cependant à trouver le bon rythme. Bien sûr, Van Hoofstadt entend pousser le politiquement correct dans ses retranchements et il tape dans tous les sens. Mais ça fait vite un peu trop. (Seven 7)
FreelanceFREELANCE
Quelques années après avoir pris sa retraite des forces spéciales américaines, Mason Pettits mène une vie classique dans une banlieue américaine où il travaille désormais comme avocat. Mais le gaillard s’ennuie ferme. Lorsque se présente une opportunité de retrouver un peu d’action, il n’hésite pas. Le voilà chargé de la protection de Claire Wellington, une journaliste qui doit se rendre en Paldonie, un petit pays d’Amérique du Sud, pour y interviewer le président Juan Venegas. Las, un coup d’Etat éclate en plein milieu de l’entretien. Tandis que l’armée prend le pouvoir, Mason doit fuir dans la jungle avec Claire et le président déchu. Il fut un temps (lointain) où, sur les grands écrans, une star bien musclée menait le bal de comédies d’action plus ou moins bien ficelées qui avaient nom Commando ou Piège de cristal. C’est bien de ce côté-là que lorgne le Français Pierre Morel (Banlieue 13 ou Taken) avec cette aventure où un malabar (quasiment increvable) se retrouve avec un dictateur bien tordu et une journaliste américaine (Alison Brie) plutôt téméraire (ou inconsciente ?) sur les bras. L’agent Pettits avec ses gros muscles et sa gueule cabossée, c’est John Cena, ancien catcheur professionnel, qui vient se promener sur les plates-bandes de Dwayne -The Rock- Johnson. Alors, bien sûr, on sait précisément à quoi on s’expose dans le genre vu et revu. Mais si on décide de rester, le produit tient aussi bien la route que bien d’autres. (Metropolitan)
Gold RunGOLD RUN – LE CONVOI DE L’IMPOSSIBLE
Le 9 avril 1940, les troupes allemandes entrent dans Oslo, la capitale de la Norvège… Les nazis visent trois cibles : le roi, le gouvernement et… la réserve d’or du pays. En quelques heures chaotiques, Fredrik Haslund, un simple secrétaire parlementaire, est promu d’urgence par le ministre des Finances, à la tête d’une mission d’intérêt national : empêcher 50 tonnes d’or de tomber entre les mains du Reich. Haslund réunit une équipe improbable, composée de sa sœur Nini Haslund Gleditsch, de quelques employés de banque, de chauffeurs de camion et du célèbre poète Nordahl Grieg. Objectif : mener à bien une opération top secrète et périlleuse : déplacer cinquante tonnes en lingots à travers le pays pour atteindre la côte et un convoi maritime allié. En s’appuyant sur des faits réels, le cinéaste Hallvard Braien a imaginé, à la manière d’une course contre la montre, un solide casse de banque… à l’envers. L’action ne baisse jamais de rythme dans ce thriller à la fois angoissant et passionnant. Les personnages (incarnés par des comédiens scandinaves) sont héroïques à souhait et les nazis de misérables prêts à toutes les vilenies. La mise en scène est agréable et la reconstitution d’époque tout à fait réussie. La manne enlevée aux nazis permettra la reconstruction du pays après guerre. (Condor)

JEANNE AU COEUR DE L’HISTOIRE ET L’AMATEUR D’OEUFS SUR LE PLAT  

Affaire Jeanne ArcL’AFFAIRE JEANNE D’ARC
Antoine de Meaux, l’un des réalisateurs de L’affaire… raconte qu’un grand historien lui a avoué, un jour : « Je n’ai jamais travaillé sur Jeanne d’Arc parce que Jeanne d’Arc, c’est un sujet qui rend fou… » Autant dire que les auteurs de cette contre-enquête sur la pucelle d’Orléans, pièce incontournable du roman national, ont révélé un vrai défi. Guerre civile, batailles, manipulations politiques, procès truqué… Entre documentaire historique, spectaculaires images d’animation en 3D et enquête policière, L’Affaire Jeanne d’Arc: la contre-enquête, le film d’Antoine de Meaux et Sarry Long – porté par la voix de Laurent Stocker, de la Comédie-Française – dessine le portrait d’une jeune femme à l’incroyable destin et explore les zones d’ombre d’une légende. Jeanne d’Arc est d’évidence, l’un des personnages les plus marquants et les plus attachants de l’histoire de France. Une jeune paysanne de dix-sept ans surgie des confins de ce qu’est alors le royaume, au pire moment de la guerre de Cent Ans, va trouver le roi Charles VII et se prétend envoyée par Dieu pour lui venir en aide contre ses ennemis, Anglais et Bourguignons. Elle prend les armes, commande des troupes, libère Orléans assiégé, puis est capturée, jugée pour sorcellerie au cours d’un procès politique maquillé en procès religieux, et surtout entaché d’irrégularités, avant de connaître une fin terrible sur le bûcher. L’incroyable mais brève épopée de la jeune Lorraine fascine depuis des siècles. Tous les mystères ne sont pas encore levés. Qui était-elle vraiment ? Qui l’envoyait ? Pourquoi un tel acharnement de la part de ses ennemis à la discréditer et à la faire disparaître ? Pourquoi le roi n’a-t-il pas cherché à la sauver ? Pourquoi a-t-elle fini abandonnée de tous, exécutée de la plus cruelle des manières ? D’ailleurs, au-delà de son côté polar, ce passionnant travail de recherche méticuleux et rigoureux (situations et reconstitutions reposent sur les travaux des meilleurs historiens) s’appuie sur un événement méconnu : le procès en réhabilitation organisé à partir de 1455 par le pape Calixte III et le roi Charles VII. Vingt-cinq ans après le supplice de celle qu’on nommait « la Pucelle », l’Église prend la décision d’ouvrir un nouveau procès. Au fil d’une grande enquête à travers la France, l’inquisiteur de France, le moine dominicain Jean Bréhal, et son jeune assistant, Pierre Fournier – seul personnage fictif et narrateur sensible du film –, s’efforcent de reconstituer le puzzle de la courte vie de Jeanne dans l’espoir de la blanchir des accusations d’hérésie qui lui ont valu le bûcher. Enfin, au cœur même de l’animation, des images en prise de vues réelles permettent d’intégrer dans le récit les lieux arpentés par Jeanne d’Arc mais aussi les précieuses archives des procès de Jeanne d’Arc, en leur conférant toute la puissance de rayonnement qu’elles ont conservée malgré le passage du temps. (Arte)
Coffret LavardinCOFFRET INSPECTEUR LAVARDIN
Dans une petite ville de Normandie, Louis Cuno (Lucas Belvaux), un jeune postier au comportement curieux et sa mère (Stéphane Audran), infirme et à demi folle subissent les assauts répétés de trois notables locaux : Hubert Lavoisier (Michel Bouquet), le notaire, Philippe Morasseau (Jean Topart), le médecin et Gérard Filiol (Jean-Claude Bouillaud), le boucher, afin qu’ils acceptent de leur vendre leur propriété. La jeune postière délurée, Henriette Uriel (Pauline Lafont), qui sait bien ce qu’elle veut obtenir de Louis, noue une idylle avec lui. À la suite d’un accident mortel qui coûte la vie à Filiol, mais qui ressemble fort à un crime, l’inspecteur Jean Lavardin, amateur de bonne chère (notamment d’œufs au plat saupoudré largement de paprika), arrive pour enquêter. Ses méthodes peu orthodoxes lui permettent de bientôt mettre au jour une affaire très sérieuse de magouilles immobilières, émaillées par des morts mystérieuses, des disparitions et de sombres rancunes. En 1985, Claude Chabrol (qui a connu le succès, en 82, avec Les fantômes du chapelier) adapte un roman de Dominique Roulet pour mettre en scène Poulet au vinaigre. Il confie le rôle du peu orthodoxe Lavardin à Jean Poiret qui va réussir une délicieuse composition… Devant le succès rencontré par Poulet…, Chabrol récidive, l’année suivante, en envoyant, dans Inspecteur Lavardin, le flic teigneux enquêter chez des notables de province. Car le corps de Raoul Mons a été retrouvé nu avec le mot « Porc » inscrit en rouge sur son dos sur la plage de Saint-Énogat à Dinard, en Bretagne. Ecrivain catholique et personnage à la moralité douteuse, Mons venait de faire interdire une pièce de théâtre blasphématoire. Hélène, sa veuve l’est donc pour la seconde fois, son premier mari ayant disparu en mer. Mais surtout, Lavardin, secondé par un gendarme qu’il surnomme Watson, reconnaît, en Hélène, un amour de jeunesse. Poiret reprend le personnage de Lavardin, entouré, cette fois, de Bernadette Lafont, Jean-Claude Brialy et Jean-Luc Bideau. Dans les suppléments, Claude Chabrol décrypte longuement et avec malice, les tenants et les aboutissants de ce savoureux diptyque dans lequel on retrouve nombre des thèmes favoris du cinéaste… (Carlotta)
Ame SoeurL’AME SOEUR
Dans une ferme suisse en haute montagne, un couple et leurs deux enfants vivent très isolés, à l’écart du monde. Le père travaille dur et la mère, mélancolique, se réfugie dans la prière. Du coup, c’est Belli, la fille, qui materne et éduque le fils sourd-muet, der Bub (le « bouèbe »). Elle lui apprend, entre autres, à lire et à écrire. Entre le frère et la sœur (qui réalise sa vocation contrariée d’institutrice) s’installe une grande tendresse. Elle est aussi le rempart ultime aux crises inattendues du Bub que les parents n’arrivent plus à contrôler, sinon en réprimandes et privations. Devenu adolescent, le fils se heurte de plus en plus à son père et décide de s’enfuir vers les alpages, dans la montagne aride. Très inquiète, sa sœur le rejoint avec de la nourriture. Dans leur monde pur, originel, seuls, ils deviennent amants. Plus tard, Belli (Johanna Lier) réalise qu’elle est enceinte de son frère. Le père, fou de colère, prend son fusil pour tuer ses enfants incestueux. Le fils (Thomas Nock) se défend. Dans la bagarre, le coup part et le père est mortellement blessé. Devant ce spectacle, la mère a une attaque et meurt également. Après avoir enterré les parents, le nouveau « couple » attend son enfant… dans la maison familiale. En 1985, le cinéaste suisse Fredi M. Murer tourne, avec une équipe réduite, dans le canton d’Uri (où il a grandi du côté d’Altdorf) ce drame d’un inceste montagnard aux accents de tragédie grecque. Léopard d’or au Festival de Locarno de 1985, L’âme sœur est le plus grand succès du cinéaste helvète né en 1940 et connu aussi pour Zone grise (1979) et Vitus (2006). Dans ce huis clos à ciel ouvert, la beauté tranquille, voire l’enchantement pastoral, des paysages élève le quotidien, lui donne une couleur métaphysique. Au sein de cette famille de taiseux bientôt frappée par la tragédie, le réalisateur crée un espace de liberté pour l’épanouissement du langage corporel et cinématographique. Chef-d’œuvre absolu du cinéma suisse, l’envoûtante Ame sœur est à découvrir pour la première fois en Blu-ray dans sa version restaurée ! (Carlotta)
Chambre 666CHAMBRE 666 – CHAMBRE 999
Tournés à quatre décennies d’intervalle lors du Festival de Cannes, Chambre 666 et Chambre 999 s’intéressent à l’avenir du septième art du point de vue des cinéastes d’hier et d’aujourd’hui. Loin de s’appesantir sur une sempiternelle mort annoncée du cinéma, les films de Wim Wenders et de Lubna Playoust offrent de multiples pistes de réflexion et prouvent, s’il fallait en douter, le rôle essentiel des salles obscures dans la société. En mai 1982, pendant le Festival de Cannes (deux ans plus tard, il y remportera la Palme d’or avec Paris Texas), le réalisateur Wim Wenders loue la chambre 666 de l’hôtel Martinez, la dernière disponible. Dans un coin de fenêtre du célèbre palace de la Croisette, et devant une télévision qui diffuse, notamment, le tournoi de Roland-Garros, le dispositif filmique consiste en une caméra fixe et un magnétophone que l’« interviewé » (seul dans la pièce) peut arrêter. Sur une note manuscrite : « Quel est l’avenir du cinéma ? ». Seize cinéastes de nationalités et de notoriétés différentes se succèdent dans la pièce pour y répondre. Ce sont Jean-Luc Godard, Paul Morrissey, Mike De Leon, Monte Hellman, Romain Goupil, Susan Seidelman, Noël Simsolo, Rainer Werner Fassbinder, Werner Herzog, Robert Kramer, Ana Carolina, Maroun Bagdadi, Steven Spielberg, Michelangelo Antonioni et Yilmaz Güney (par l’intermédiaire d’un enregistrement, et présenté par Wim Wenders)… Quarante ans plus tard, Chambre 999, le film de Lubna Playoust, reprend le dispositif créé par Wim Wenders en 82. Seuls dans une chambre d’hôtel, à l’écart de l’agitation cannoise, des cinéastes (James Gray, Audrey Diwan, Rebecca Zlotowski, Albert Serra, Davy Chou, Alice Rohwacher, Asghar Farhadi…) ont carte blanche pour répondre à une question : « Le cinéma est-il un langage en train de se perdre, un art qui va mourir ? ». Tourné pendant Cannes 2022, le film commence par l’intervention de Wim Wenders qui, en marge du festival 1982, avait demandé à ses confrères leur avis sur l’avenir du cinéma. Wenders répond à la question par l’affirmative – oui, pour lui, le tout-numérique va tuer le cinéma. Son raisonnement pourrait être démoralisant s’il ne rajoutait que, pour lui, la jeune génération a tout de même les armes pour changer le cours des choses. Dans les suppléments, un entretien avec Wenders (21 mn) dans lequel il se souvient des raisons qui l’ont poussé à faire ce film et de la grande diversité des interventions enregistrées, puis parle de la suite tournée en 2022 par Lubna Playoust. (Carlotta)
AntiSquatANTI-SQUAT
Menacée d’être expulsée du logement qu’elle occupe avec Adam, son fils de 14 ans, Inès, ancienne agent immobilier, est recrutée par la société Anti-Squat qui propose d’héberger des personnes dans des bâtiments inoccupés pour les protéger des squatteurs et des dégradations. Son premier client lui confie un immeuble de bureaux. Elle doit recruter les résidents et leur faire respecter des règles strictes : les enfants et les animaux sont interdits, les fêtes sont interdites, il est interdit de s’absenter sans autorisation, etc. En outre, pour s’assurer que tout se passe au mieux, elle doit habiter sur place. Inès se trouve prise en étau entre son employeur qui exige toujours plus de fermeté de sa part et menace de ne pas renouveler son contrat, les résidents qui ont chacun des situations personnelles difficiles et vivent mal les contraintes imposées par Anti-Squat, une entreprise de gardiennage qui supporte mal cette concurrence nouvelle et tente de la déstabiliser, et enfin Adam qui ne comprend pas que sa mère participe à ce qu’il perçoit comme une injustice alors qu’il développe une conscience politique propre. Pour Inès (Louise Bourgoin), les enjeux sont immenses: en période d’essai, elle doit faire ses preuves afin d’obtenir un CDI, qui lui donnera accès à la location de l’appartement dont elle a urgemment besoin. Le film débute par un carton expliquant que la loi ELAN de 2018 a créé un dispositif visant à assurer la protection et la préservation des locaux vacants en les faisant occuper par des résidents temporaires. C’est ce cadre légal qui est exploité par la société fictive Anti-Squat dans le film. Cette disposition, initialement expérimentale, a été pérennisée par la loi n° 2023-668 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, publiée un mois avant la sortie du film. Nicolas Silhol (qui avait traité de l’univers des ressources humaines dans Corporate) a imaginé tourner, dans l’intéressant décor d’un immeuble désaffecté, une œuvre d’anticipation mais il signe une sorte de drame post-apocalyptique douloureux, angoissant et dérangeant où l’on voit le fossé se creuser entre les plus nantis et les autres… (Diaphana)
Pesquet MissionTHOMAS PESQUET – L’INTEGRALE DE LA MISSION PROXIMA
Proxima est une mission de l’Agence spatiale européenne réalisée par Thomas Pesquet (qui a choisi le nom de la mission parmi plus de 1300 propositions reçues dans le cadre d’un concours) lors de son séjour de six mois dans la Station spatiale internationale de novembre 2016 à mai 2017 dans le cadre des expéditions 50 et 51. Le Français de 45 ans contribua à 62 expériences coordonnées par l’Agence spatiale européenne et le Centre national d’études spatiales ainsi qu’à 55 autres expériences des agences spatiales américaine, canadienne et japonaise. Thomas Pesquet effectua des expériences précieuses pour l’Europe dans le laboratoire européen Columbus qui viseront à faire avancer la connaissance du corps humain, la physique et la biologie. Un beau coffret regroupe l’intégrale des documentaires retraçant, au jour le jour, les six mois de mission de l’astronaute français à bord de la Station Spatiale Internationale, depuis les derniers préparatifs avant le décollage jusqu’à son retour sur terre. Des images à couper le souffle, réalisées en grande partie dans l’espace. On y trouve 16 Levers de soleil, le long-métrage (117 mn) de Pierre-Emmanuel Le Goff, sorti en salles en octobre 2018, qui évoque la première mission spatiale de Thomas Pesquet qui, en orbite à 400 kilomètres de la Terre, dresse un parallèle avec l’œuvre de Saint-Exupéry qu’il a emportée dans la station… Egalement, dans le coffret, Thomas Pesquet, L’étoffe d’un héros (long métrage cinéma sur l’entraînement), Thomas Pesquet, L’envoyé spatial et Dans les yeux de Thomas Pesquet au format IMAX familial avec la voix de Marion Cotillard. Outre 80 minutes de suppléments, le CD de la bande originale de 16 Levers de soleil est également disponible dans la version combo DVD/Blu-Ray du coffret. Enfin le coffret collector, lui, reprend l’ensemble des éléments ci-dessus en plus d’un cardboard VR, une réplique de la figurine du Petit Prince emportée dans l’espace par Thomas Pesque, des cartes postales inédites créées à partir des films et un accès notre expérience VR Dans la peau de Thomas Pesquet, premier film en réalité virtuelle tourné dans l’espace. (La Vingt-Cinquième Heure)
RetributionRETRIBUTION
Brillant homme d’affaires américain travaillant à Berlin, Matt Turner circule en voiture pour accompagner ses enfants Emily et Zach à l’école, lorsqu’il reçoit un mystérieux coup de téléphone. Au bout du fil, un inconnu l’informe qu’une bombe est placée sous son siège et qu’elle explosera s’il n’exécute pas rapidement les ordres qu’il s’apprête à recevoir. Si Matt refuse, l’homme s’en prendra à ses proches. Commence alors une course contre la montre pour Matt, qui doit essayer de sauver ses enfants et de comprendre pourquoi cet ennemi lui en veut autant… Le cinéaste américano-hongrois Nimrod Antal (remarqué pour son thriller Kontroll en 2003) signe un thriller d’action, remake du film espagnol Appel inconnu de Dani de la Torre sorti en 2015 et « nominé » à huit reprises aux Goyas, l’équivalent de nos César. Comme l’action se déroule quasi-intégralement dans le cadre confiné de la voiture, le film prend la forme d’un solide huis clos passablement claustrophobique. Seuls quelques personnages évoluent à l’extérieur, Heaver Turner, l’épouse de Matt, ou Angela Brickman, l’agent d’Europol qui finit par s’intéresser à ce véhicule étrange roulant à vive allure et provoquant de nombreux dégâts sur son passage. Bien sûr, le scénario de Retribution fait un peu déjà-vu mais ce divertissement « à l’ancienne », avec un bon suspense, est agréable et efficace. D’autant que le cinéaste filme bien Berlin et ses architectures variées et qu’il peut compter sur l’inoxydable Liam Neeson en monsieur-tout-le-monde s’apprêtant à passer la pire journée de sa vie. (Studiocanal)
Equalizer 3EQUALIZER 3
Dans un vignoble au fin fond de la Sicile, Robert McCall tue le mafieux Lorenzo Vitale et ses sbires pour obtenir une clé du coffre-fort du vignoble et récupérer une mystérieuse cargaison. En quittant le vignoble, Robert est touché dans le dos par une balle tirée par le petit-fils adolescent de Vitale. L’ancien agent des Marines et de la Direction américaine du renseignement va tenter de retourner sur le continent. Mais, en conduisant sur la côte amalfitaine, McCall perd connaissance en raison de sa blessure. Il est secouru par un carabinier local qui le confie à Enzo, le médecin d’Altamonte, une petite ville côtière isolée. L’Américain contacte, à la CIA, Emma Collins (Dakota Fanning) pour la prévenir du rôle du vignoble dans le trafic de drogue illégal déguisé en transactions commerciales normales en Sicile… Mais les membres de la Camorra ne sont pas décidés à se laisser faire… et ils le feront savoir de manière très sauvage. Après un premier Equalizer en 2014 puis un second en 2018, on peut penser qu’Antoine Fuqua, toujours secondé par le scénariste Richard Wenk, achève, ici, sa trilogie… Même si ce n°3 n’a pas démérité au box-office, il est probablement temps. Même si Robert McCall s’est exporté en Europe, le personnage commence quand même à accuser le coup. D’ailleurs, plus marmoréen que jamais, Denzel Washington la joue… fatigué. Longtemps, McCall, évidemment en convalescence après ses blessures, ne semble plus être que l’ombre de lui-même. Mais il ne faut quand même pas le chercher ! Parce que le brave Robert sait donner du gun pour venir au secours de ses amis italiens… (Sony)
Reve DaisyLE REVE DE DAISY
La Cité Sanctuaire, ville majestueuse, multiculturelle et écologique, qui regorge de vie animale et dont l’architecture est inspirée de la nature elle-même, est en effervescence avec la préparation de la Coupe du Monde de la Peur, une sorte de compétition olympique regardée par le monde entier qui accueille les animaux les plus féroces, les plus mortels et les plus effrayants pour se disputer le titre convoité d’Animal le plus Effrayant du Monde. Alors que la Cité n’a pas organisé les Jeux depuis des décennies, elle voit arriver des champions internationaux : des lions, des tigres et… une adorable quokka souriante nommée Daisy. Lassée de la traditionnelle carrière réservée aux quokkas, des petits animaux mignons destinés à apparaître sur les selfies des touristes de sa petite ville côtière, Daisy a un rêve tout autre et diablement ambitieux : devenir l’Animal le plus Effrayant du Monde ! Avec l’aide peu enthousiaste, voire réticente, d’un ancien champion banni de la Cité, un crocodile d’eau salée nommé Frankie Lagrimpe, elle doit relever tous les défis que les célèbres Jeux lui lancent. La Coupe du Monde de la Peur, structurée comme une série de défis sportifs du type Ninja Warrior, exigent intelligence, force, férocité et ténacité pour atteindre le sommet. Daisy sera poussée dans ses retranchements face à un groupe d’animaux vraiment sauvages, déjantés et méchants, dont le terrifiant champion en titre, un dragon de Komodo maléfique du nom de Drago Modo. Daisy affrontera tous ses concurrents, s’efforçant de prouver à la Cité que les vrais champions existent dans toutes les tailles ! (M6)
Salon KittySALON KITTY
Quelques mois après le début de la Seconde Guerre mondiale, le Troisième Reich reprend en mains le plus luxueux des bordels berlinois, le Salon Kitty, dont la vocation n’est plus uniquement de pourvoir aux fantasmes de sa clientèle, mais de lui soutirer des confidences. Surtout lorsqu’il s’agit de dignitaires étrangers, d’hommes d’affaires et d’officiers allemands. Chargé, dans l’ombre, de diriger l’établissement, Wallenberg, un nazi arriviste, sélectionne les filles les plus belles et les plus fanatiques. À la fois prostituées et espionnes, elles remplissent parfaitement leur mission. Du moins jusqu’au jour où l’une d’entre elles, Margharita, tombe amoureuse d’Hans Reiter, un capitaine de la Luftwaffe hostile à Hitler. C’est en 1976 que le réalisateur italien Tinto Brass met en scène ce fleuron de la nazisploitation, « le mauvais genre par excellence ». On devine que le futur réalisateur de Caligula (1979) a aisément mesuré le potentiel de décadence et de dépravation de son sujet. En s’inspirant de faits réels (le salon Kitty fut en effet truffé de micros pour permettre l’espionnage politique sur… l’oreiller), Brass et son scénariste Ennio de Concini distillent la vision glaçante d’une sexualité détraquée… Pour ce faire, ils peuvent s’appuyer sur les beaux décors imaginés par Ken Adam (chef-décorateur sur sept James Bond dans les années 60-70) ou sur la photographie de Silvano Ippoliti. Comme le rapporte Olivier Père dans son ouvrage Tinto Brass, toutes les couleurs de l’érotisme (60 p.) qui accompagne le Digibook Blu-ray, « en imaginant la mort de Wallenberg froidement assassiné sur ordre des SS, victime d’un piège tendu par celles qu’il avait lui-même manipulées et trahies, grâce à son propre« modus operandi » (un enregistrement caché), Tinto Brass fait le choix de l’uchronie et décide de « venger l’Histoire » d’une manière ironique et provocatrice… » Enfin, le film doit beaucoup à son trio vedette : Ingrid Thulin en patronne de bordel, Ann-Teresa Savoy (Margharita) et Helmut Berger (Wallenberg), « capable, selon Visconti, d’incarner mieux que quiconque la perversion ». (Sidonis Calysta)
Lola FrivoleLOLA LA FRIVOLE
Jeune et jolie, l’affriolante Lola est fiancée avec Masetto, le fils du boulanger. Mais elle le trouve un peu vieux jeu, d’autant que le mitron est convaincu qu’ils doivent demeurer vierges jusqu’au mariage. On devine que la charmante Lola n’est pas de cet avis. Lola, qui circule souvent à vélo, histoire de montrer sa culotte blanche alentour, décide de multiplier les entreprises de séduction. Rien n’y fait, Masetto (clin d’oeil au Masetto, fiancée de Zerline, dans le Don Giovanni de Mozart?) résiste ! Lola, décidément frivole, se tourne alors vers André, un homme mûr et séduisant, possédant une solide expérience des aventures érotiques. Ses récits enflamment l’imagination de Lola qui commence à penser qu’il serait peut-être un bien meilleur amant que son Masetto… En 1998, Tinto Brass, aujourd’hui âgé de 90 ans, est en fin de carrière (il tournera encore quatre longs-métrages au début des années 2000) mais il conserve, avec Monella (en v.o.) sa manière délurée et volontiers humoristique de trousser des récits érotiques… Bien sûr, ses histoires ne frôlent pas les sommets du 7e art et Brass n’est pas réputé pour avancer sur la pointe des pieds. Mais il a le don de choisir des comédiennes capables, par leurs formes et leur panache, d’emporter aisément le morceau. On se souvient qu’en 1983, il fit, de Stefania Sandrelli dans La clé, une icône érotique. Ici, c’est la pimpante Anna Ammirati qui s’y colle. Force est de reconnaître qu’elle se sort à son avantage (et avec ses avantages !) de ce porno-soft sans prétention mais joyeusement épicurien. (Sidonis Calysta)

LA DEFAITE D’UN COUPLE, LES AVENTURES D’APU ET LE CINEMA DE JEANNE  

Anatomie ChuteANATOMIE D’UNE CHUTE
Samuel est mort. Son corps git dans la neige au pied du grand chalet alpin dans lequel il s’était installé, il y a un an, avec sa femme Sandra et leur fils Daniel. Mais comment Samuel est-il mort ? A-t-il chuté du haut des combles ? Faut-il chercher une autre explication ? Et s’il s’agissait d’un homicide ? Car Sandra et Samuel n’étaient pas avares de disputes… Sandra, affolée, bouleversée, a appelé les secours. Les enquêteurs ont investi les lieux. Une autopsie a lieu. On parle de traumatisme crânien mais aussi de lésions à la tête antérieures au choc avec le sol. Désormais, l’affaire prend une autre tournure. Et Sandra Voyter fait figure de suspecte. A Vincent Renzi, un vieil ami avocat, Sandra dit fermement : « Je ne l’ai pas tué ! » L’engrenage de la justice s’est cependant mis en branle. La « machine », avec son impressionnant décorum, ne s’arrêtera plus. Mais l’essentiel du propos n’est pas là. Justine Triet le dit bien : « Je souhaitais faire un film sur la défaite d’un couple. L’idée, c’était de raconter la chute d’un corps, de façon technique, d’en faire l’image de la chute du couple, d’une histoire d’amour. » De fait, Anatomie d’une chute est à la fois un authentique film de procès et la fin d’une histoire d’amour vue à travers ses deux protagonistes principaux qui remontent le temps pour faire apparaître leurs blessures, leurs doutes, leurs désastres… La grande force du quatrième long-métrage de Justine Triet, c’est qu’il parvient, avec brio, à nous faire entrer, avec une précision rarement vue au grand écran, dans les arcanes d’un procès d’assises et à nous amener, dans un même mouvement, à partager le cheminement d’une femme accusée d’homicide. Le tribunal est un lieu où l’histoire n’appartient plus aux personnages puisqu’elle est jugée par d’autres qui doivent la reconstituer à partir d’éléments épars et ambigus. Devant ses juges, Sandra est ainsi brutalement mise à nu. Son intimité, sa bisexualité, tout y passe, tout explose, y compris cette utopie magnifique mais très difficile à atteindre qu’est l’égalité dans le couple. Dans le rôle de Sandra tour à tour bouleversante et inquiétante, l’actrice allemande Sandra Hüller est constamment au coeur du propos. Son jeu révèle (ou dissimule) les secrets et les angoisses d’une femme au coeur d’un chaos judiciaire et personnel. Swann Arlaud, comédien « hanté » tout en finesse et en regards, est l’avocat de Sandra. C’est à lui que cette femme, désormais brisée, livrera ce rude constat : « Quand on perd, on perd. Quand on gagne, on espère une récompense. Mais c’est juste fini ». Palme d’or à Cannes, Anatomie… a raflé récemment les prix du Cinéma européen. Une superbe réussite ! (Le Pacte)
 Trilogie ApuLA TRILOGIE D’APU
« Ne pas avoir vu le cinéma de Ray revient à exister dans le monde sans avoir vu le soleil ou la lune… » C’est le grand maître japonais Akira Kurosawa qui parle ainsi de son homologue bengali… En fait, en marge de Bollywood, Satyajit Ray (1921-1992) a fait découvrir au monde le cinéma d’auteur indien grâce à son premier film, La complainte du sentier en 1955. Avec L’Invaincu en 1956 puis Le monde d’Apu en 1959, il réalise une chronique à la profonde beauté de la vie d’Apu, de son enfance dans une famille pauvre du Bengale rural jusqu’à l’âge adulte à Calcutta, au rythme de l’inoubliable musique de Ravi Shankar. Cette trilogie mythique sort, pour la première fois, dans un coffret (trois disques) Blu-ray et dans une superbe restauration 4K. Première œuvre de Ray en 1955, La complainte du sentier (Pather Panchali) raconte la vie d’une famille pauvre dans un village du Bengale occidental, vers 1910. Elle a été obligée de vendre le verger qu’elle possédait. Leur petite fille, Durga, avec la complicité de la vieille femme Indir, de la famille du père, hébergée par eux, continue de prendre des fruits dans le verger. Le père, brahmane, lecteur de textes sacrés, qui travaille à Bénarès, rentre pour la naissance de leur deuxième enfant, Apu. Dans L’invaincu (Aparajito, 1956), nous sommes en 1920, Apu, âgé d’environ dix ans, vit avec ses parents installés à Bénarès, logés dans une ancienne maison au cœur de la ville. Tandis que le père, brahmane, officie sur les ghats sur les bords du Gange, Apu le regarde, observe les gens et la vie en ces lieux où, avec d’autres enfants, il se promène dans les ruelles étroites de la ville… Enfin, en 1959, Ray achève sa trilogie avec Le monde d’Apu (Apur Sansar) dans la Calcutta de 1930 où, Apu, qui vit dans une modeste chambre donnant sur une voie ferrée, doit renoncer à poursuivre ses études. Face aux réclamations pour des mois de loyers impayés, il vend ses livres pour avoir de l’argent et cherche du travail pour payer ses mois de loyer en retard. Pour réconfort, il reçoit une lettre l’informant que sa nouvelle, L’Homme de la terre, sera publiée. Riche de nombreux suppléments dont Satyajit Ray, documentaire-fleuve réalisé en 1985 (137 mn) par Shyam Benegal où l’illustre réalisateur revient en détail sur son parcours, son œuvre et sa vision de la mise en scène, illustrée par de nombreux extraits de films, le coffret est accompagné d’un livret inédit (80 pages) dans lequel Charles Tesson analyse comment les aventures du jeune Apu, adaptées d’un classique en deux tomes de la littérature bengalie, ont ouvert une nouvelle voie aux cinémas de l’Inde. (Carlotta)
Jeanne Moreau CineasteCOFFRET JEANNE MOREAU CINEASTE
Avec Simone Signoret et Romy Schneider, Jeanne Moreau (1928-2017) est l’une des plus grandes actrices du cinéma français. A travers plus de 130 films, dont Ascenseur pour l’échafaud, Les amants, Moderato cantabile, Jules et Jim, Eva, Le journal d’une femme de chambre ou La mariée était en noir, elle a imposé l’image d’une comédienne exigeante et brillante et d’une femme touchée par la grâce. Mais sait-on que l’actrice la plus libre du cinéma français a aussi écrit et réalisé trois films entre 1976 et 1983 ? Restaurés à l’initiative de la Fondation Jeanne Moreau, on découvre pour la première fois dans un coffret Blu-ray, ses deux longs-métrages de fiction ainsi que son moyen-métrage documentaire Lillian Gish. Autant d’attachants portraits de femmes ! Avec Lumière (1976), Jeanne Moreau met en scène le parcours sentimental et professionnel de quatre amies comédienne. Elles vivent intensément et font tour à tour face à différentes préoccupations, en tant que femmes et actrices. Leur solide complicité s’incarne dans la figure centrale de Sarah (Jeanne Moreau, cette fois, devant la caméra), la plus célèbre d’entre elles… Dans L’adolescente (1979), on partage l’été de Marie, 12 ans, qui, comme chaque année, s’apprête à partir, avec ses parents, pour les grandes vacances chez sa grand-mère paternelle (Simone Signoret) dans le centre de la France. Nous sommes en juillet 1939 et l’été de Marie sera marqué par la découverte de l’amour, alors que plane bientôt l’ombre de la guerre… Enfin Lillian Gish (1983) est un portrait-hommage dans lequel la cinéaste part à la rencontre de l’une des stars les plus marquantes du cinéma muet hollywoodien. La vedette d’ Intolérance, Le lys brisé, Naissance d’une nation ou encore La nuit du chasseur revient sur sa carrière depuis ses débuts en 1913 et sur sa passion pour le septième art, guidée par une curiosité insatiable… Le coffret est accompagné d’un livret rédigé par Jean-Claude Moireau, photographe et biographe officiel de Jeanne Moreau, illustré de nombreuses photos des films et enrichi de multiples suppléments sur le tournage de Lumière ou de L’adolescente mais aussi Vive le cinéma !: Jeanne Moreau et Orson Welles (Jacques Rozier, 31 mn) où les deux amis, au cours d’un dîner, se racontent des souvenirs d’enfance et de cinéma ou encore l’interview cannoise réalisée par Jeanne Moreau du réalisateur, producteur et acteur américain Clint Eastwood, alors président du jury du Festival de Cannes 1994. (Carlotta)
Coffret 100 ans WarnerCOFFRET 100 ANS DE LA WARNER
1923-2023 : en cent ans d’existence, la Warner Bros a su imposer sa marque de fabrique : l’ambition artistique des projets et la fidélité aux créateurs. Audacieux depuis toujours dans le choix des thèmes abordés, la Warner réussit à se réinventer au fil du temps et devient l’un des fers de lance du Nouvel Hollywood… Et la firme qui doit son nom aux quatre fondateurs Harry, Albert, Sam et Jack Warner, a su encore se réinventer au tournant du 21e siècle avec des sagas rapidement devenues légendaires. A l’occasion du centenaire, sort un imposant coffret Blu-ray Anniversaire Ultime qui réunit 100 films iconiques du studio. Ce coffret contient quatre collections de 25 films classés par genres : volume 1 Grands classiques, volume 2 Romances et comédies musicales, volume 3 Drames et thrillers, volume 4 Fantastique et science-fiction. Les quatre volumes sont également disponibles à l’achat séparément. A l’affiche : Casablanca ou Rio Bravo, Bonnie & Clyde ou Ben-Hur, Chantons sous la pluie ou Le bal des vampires, Sur la route de Madison ou Eyes Wide Shut, Les hommes du président ou La horde sauvage, Amadeus ou Mystic River, Vol au-dessus d’un nid de coucou ou Joker, 2001 ou Blade Runner, Orange mécanique ou Dune, Shining ou L’exorciste… Pour tout achat du coffret (499,99 euros), est offert un échantillon de pellicule 35 mm, avec certificat d’authenticité, de l’un des films suivants : La mort aux trousses, Les affranchis, Impitoyable ou Matrix. (Warner)
 YannickYANNICK
Sur la scène d’un théâtre parisien, trois comédiens jouent Le cocu, une pièce de boulevard, devant un public plutôt clairsemé. Le texte n’est pas très bon. Et c’est un euphémisme. Les comédiens le donnent mollement, sans y croire. C’est alors que se produit l’inconcevable. Dans les rangées, un type se lève et interrompt le spectacle. Il se prénomme Yannick, vit à Melun et est veilleur de nuit dans un parking. Il a pris un congé pour venir au théâtre. Pour ce faire, il a fait près d’une heure de transport en commun et de marche à pied. Alors, il le dit tout de go. Il n’aime pas la pièce. Il est venu pour se divertir, se changer les idées, oublier un quotidien sans joie. Et quoi ? On lui casse le moral comme jamais. Sur la scène, les trois comédiens sont bouchée bée. Ils se demandent quoi faire, comment réagir. Quentin Dupieux est décidément l’un des cinéastes les plus surprenants du cinéma français. D’abord, parce qu’il fait des films courts, ensuite parce qu’il en réalise beaucoup et enfin et surtout parce qu’il réussit, à chaque fois, à être parfaitement original. Yannick est une pure comédie qui a le mérite de poser la question du spectacle et du public. Et oui, si le public, à l’instar de Yannick, décidait d’intervenir, de donner son avis, de proposer sa propre vision des choses. Bien sûr, Yannick a des arguments « frappants » mais il va contraindre les comédiens, et en premier chef, Paul Rivière, à franchir un seuil, passer un cap, péter lui-même gravement les plombs. Tout cela est intense, rapide, efficace et très drôle. Pio Marmaï, Blanche Gardin et Sébastien Chassagne sont drolatiques. Dupieux a écrit Yannick pour le plaisir de diriger Raphaël Quenard auquel il permet une composition mémorable. On se régale ! (Diaphana)
 Mission CleopatreASTERIX ET OBELIX – MISSION CLEOPATRE
L’histoire commence il y a bien longtemps, à Alexandrie (ou en Alexandrie, on peut dire les deux…) Jules César défie Cléopâtre de lui construire un palais en trois mois. Délai impossible à tenir pour Numérobis, l’architecte égyptien. Son seul espoir : Panoramix et sa potion magique. Avec Astérix, Obélix et Idéfix, nos héros vont devoir déjouer les plans du vil Amonbofis, l’architecte rival, jaloux de ne pas avoir été choisi… En 2001, Alain Chabat réalise la deuxième adaptation des aventures d’Astérix et Obélix sur grand écran. Ce nouveau volet est un triomphe avec presque quinze millions d’entrées. Sur les cinq adaptations réalisées à ce jour, l’Astérix de Chabat détient le record du box-office. Crépitant de vannes et de blagues scandées par un casting cinq étoiles, ce film-culte qu’on ne se lasse pas de revoir, a été rénové en totalité et en 4K. Après une ressortie en salle l’été dernier (plus de 400 000 spectateurs dans les salles), voici les aventures de l’inoxydable Gaulois disponible dans deux éditions : un coffret collector limité et numéroté ainsi qu’un Steelbook inédit contenant l’affiche de la ressortie en version rénovée 4K, un jeu inédit en forme de course contre le sablier pour construire le Palais à temps ! Plus de 450 questions sur le film, des défis, de bonnes ou mauvaises situations et même des trucs pointus (pour les experts en Mission Cléopâtre) ! En bonus, un documentaire sur la restauration du film (inédit), le commentaire audio d’Alain Chabat, le making of – « Le Comankonafé » -, des scènes inédites et le director’s cut… Pour finir, disons-le simplement, Mission Cléopâtre est le meilleur de tous les films sur Astérix ! (Pathé)
 Joanna HoggINTEGRALE JOANNA HOGG
Née à Londres en 1960, Joanna Hogg grandit dans une ville du Kent. Elle travaille comme photographe pendant quelques années avant d’intégrer la National Film and Television School dans les années 80. Elle travaille pendant vingt ans pour la télévision et la vidéo, avant de réaliser son premier film en 2007 avec Unrelated qui évoque Le rayon vert (1986) d’Eric Rohmer et offrira à Tom Hiddleston son premier rôle au grand écran avant de devenir célèbre en incarnant Loki, un super-méchant de l’univers Marvel. En 2019, elle réalise The Souvenir, un film autobiographique qui traite de l’emprise et de la relation toxique vécue lorsqu’elle était étudiante. Et, en 2022, elle met en scène, tel une mise en abyme, The Souvenir II qui suit Julie, étudiante en cinéma qui réalise son film de fin d’études, alors qu’elle sort tout juste de sa relation toxique. Dans les deux Souvenir, la cinéaste retrouve sa compatriote Tilda Swinton. Pour la première fois, Joanna Hogg se dévoile dans un coffret (trois dvd) reprenant l’intégralité de sa filmographie. Une carrière unique, pour une cinéaste avant-gardiste de l’introspection dont les discrets personnages, souvent en retraite, observent le monde autour d’eux. De cette réalisatrice ovationnée par ses pairs, on découvre aussi Archipelago (2010), Exhibition (2013) et The Eternal Daughter (2022) dans lequel Julie et sa mère âgée séjournent dans un hôtel de la campagne anglaise. Réalisatrice en plein doute, elle espère y retrouver l’inspiration. Sa mère est déjà venue dans sa jeunesse dans cet hôtel. Julie est saisie par l’étrange atmosphère des lieux où les couloirs sont déserts, la standardiste a un comportement hostile, et son chien n’a de cesse de s’échapper. La nuit tombée, les circonstances poussent Julie à explorer le domaine. Elle est alors gagnée par l’impression tenace qu’un indicible secret hante ces murs. (Condor)
Le ColibriLE COLIBRI
Une superbe villa, au bord de la mer… Début des années 70. C’est là que la famille Carrera passe ses vacances. Ce soir-là, les parents sortent dîner avec des amis. Leurs grands enfants, Marco, Giacomo et Irène, restent à la maison. Giacomo, l’alcool aidant, est effondré sur le sofa. Irène, qui souffre de problèmes mentaux, écoute de la musique. Marco, lui, doit retrouver discrètement Luisa, une jeune Française dont il est tombé amoureux. C’est un amour qui ne sera jamais consommé mais qui ne s’éteindra jamais… Mais, cette nuit-là, la tragédie survient… L’Italienne Francesca Archibugi adapte le best-seller éponyme de Sandro Veronesi paru en 2019. Au centre du livre comme du film, apparaît le personnage-pivot de Marco Carrera, un homme qui a un problème, non pas de courage, mais d’intégrité, de rectitude morale. Il crée le désastre en voulant le bien. « Il n’est pas en capacité, dit la cinéaste, de comprendre la portée de ses actes : on ne peut pas conserver en soi, comme prisonnier d’un coffre-fort ou d’un donjon, un tel sentiment amoureux, sans que cela mène à la catastrophe. » Grand mélodrame qui charrie un mäelstrom de sensations émouvantes, le film s’attache à un homme qui explose de désir contenu. Le sexe, c’est le désordre et il ne rêve que d’ordre. Cependant, lors d’une soirée de poker, Marco (l’excellent Pierfrancesco Favino) va comprendre qu’il n’est pas obligé de suivre les règles du jeu… (Orange Studio)
The HostTHE HOST
A Séoul, Park Gang-du tient un petit snack décrépi qui vend des calamars grillés au bord de la rivière où il vit avec sa famille, dont sa fille adorée Hyun-seo. Un jour, un monstre géant surgit des profondeurs de la rivière et attaque la foule. Gang-du tente de s’enfuir avec sa fille, mais elle est enlevée brusquement par le monstre, qui disparaît au fond de la rivière. La famille Park décide alors de partir à la recherche de la créature, pour retrouver Hyun-seo… D’autant qu’il reçoit un appel téléphonique de Hyun-seo, qui lui dit qu’elle est coincée quelque part dans les égouts avec la créature avant que son portable s’arrête de fonctionner… Remarqué en France avec Memories of Murder (2003), un polar ironique et très maîtrisé qui prenait brillamment ses aises avec le genre, Bong Joon-ho conserve son ironie mordante pour s’attaquer au film de monstre. Et il a frappé fort dans son pays, The Host établissant un record absolu avec 14 millions de spectateurs ! Il est vrai que la mise en scène est simplement époustouflante, les effets spéciaux épatants et le cinéaste n’oublie pas, tout en se régalant des codes du genre, de distiller un discours autour d’une machination politique et des risques écologiques. Car c’est bien le déversement dans le fleuve Han d’un produit très toxique qui a donné naissance au monstre… Cette très belle édition (en version restaurée 4K) sort, avec en suppléments, notamment le storyboard complet de 334 pages en coréen et traduit en anglais et français, Histoire(s) de famille, un documentaire exclusif (52 mn) réalisé par Jésus Castro qui revient sur The Host quinze ans plus tard, la masterclass donnée par Bong Joon-ho au Grand Rex en février 2023, des documents sur le tournage etc. The Host a été présenté en 2006 à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes. Bong Joon-ho reviendra sur la Croisette en 2019 pour rafler la Palme d’or avec Parasite ! (The Jokers)
 Voie RoyaleLA VOIE ROYALE
Brillante lycéenne, Sophie Vasseur, encouragée par son professeur de mathématiques, quitte la ferme familiale installée dans le Rhône pour suivre une classe préparatoire scientifique à Lyon. De succès en échecs, face à une compétition acharnée où tous les coups sont permis (ou presque), la jeune fille réalise que son rêve, en l’occurence intégrer Polytechnique, représente plus qu’un concours… un vrai défi d’ascension sociale. Après Complices (2008) et Moka (2016), le Suisse Frédéric Mermoud s’inscrit dans le genre du film d’apprentissage pour détailler le « chemin de croix » d’une jeune fille très douée qui décide de laisser derrière elle l’élevage de porcs de sa famille pour aller vers les grandes écoles. Révélée, en 2021, dans Les choses humaines d’Yvan Attal, Suzanne Jouanet incarne une bûcheuse qui s’avance, avec courage et ténacité, dans un système impitoyable. Mais le cinéaste, en cultivant une écriture à la fois romanesque et réaliste, ne fait jamais de Sophie, une victime. De par son parcours et ses racines, Sophie est moins consciente de certains enjeux sociaux que ses condisciples qui comprennent mieux qu’elle l’échiquier social et maîtrisent les codes qui le régissent. Sophie est elle-même son premier obstacle. Mais elle va chercher à bousculer ce qui lui semble prédestiné… Un film social aussi intelligent que son personnage central. (Pyramide)
BugBUG
Serveuse solitaire au passé tragique, Agnès loge dans un vieux motel peu fréquenté au bord d’une route perdue dans l’immensité de la plaine américaine. Elle vit dans la peur de Jerry Goss, son ex-mari violent qui vient d’être libéré sur parole. Par l’entremise d’une collègue, elle rencontre Peter, un nouveau client du bar. Agnès (Ashley Judd) retrouve espoir en esquissant une romance avec cet homme calme, excentrique et mystérieux, jusqu’à ce qu’il lui révèle que des insectes particulièrement rares s’introduisent sous sa peau… En 2006, alors qu’il est sur la fin de sa carrière (il ne tournera plus que deux films après Bug), William Friedkin, célèbre autant pour French Connection (1971) que pour L’exorciste (1973), met en scène un thriller adapté de la pièce de théâtre éponyme écrite en 1996 par Tracy Letts qui signe également le scénario du film. Ce drame doit beaucoup au personnage de Peter, cet ancien militaire (Michael Shannon, mystérieux à souhait) avec lequel Agnès se sent en sécurité au point d’accepter d’entrer dans son univers auto-destructeur… Une histoire allégorique sur le couple et une renaissance par l’amour… (Metropolitan)
HypnoticHYPNOTIC
Inspecteur au département de police d’Austin, Danny Rourke fréquente une ergothérapeute à laquelle il parle de l’enlèvement de sa fille Minnie, âgé de 7 ans, survenue il y a quelques années. Malgré la médiatisation de l’affaire et l’arrestation d’un suspect, son corps n’a jamais été retrouvé et cela a par ailleurs provoqué le divorce de Danny avec sa femme Viv. Reconnu apte à un retour au travail, Danny retrouve ensuite son partenaire, Randy Nicks. Leur service a été informé de manière anonyme que le coffre-fort d’une banque d’Austin va être cambriolé dans la journée. Alors que la police surveille les lieux, ils voient un mystérieux homme donner des instructions aux civils sur place, aux employés de banque et même à des policiers. Tous ont ensuite des comportements étranges dès que les braqueurs arrivent dans la banque. Dans le coffre-fort ciblé, Danny retrouve une photo de Minnie avec le message « Trouve Lev Dellrayne ». Réalisateur de Desperado (1995), Une nuit en enfer (1996) ou Sin City (2005), Robert Rodriguez signe, avec Ben Affleck en tête d’affiche, un solide thriller d’action qui multiplie les péripéties autour d’un mystérieux et délirant programme gouvernemental secret pouvant influencer le comportement et les agissements d’autrui… (M6)
Boris Vian CinemaBORIS VIAN FAIT SON CINEMA
À la fois écrivain, poète, parolier, chanteur, musicien, scénariste et acteur, Boris Vian est un artiste aux multiples talents. Bien qu’il ait toujours entretenu une relation passionnée avec le cinéma, il n’a jamais eu l’occasion de passer derrière la caméra. Avec Boris Vian fait son cinéma, voici une collection de courts-métrages, tous inspirés ou adaptés de scénarios du célèbre écrivain. Dès l’âge de six ans, Vian se passionne pour cet art naissant encore muet. Sous l’Occupation, alors que le jeune écrivain n’a encore rien publié, il s’essaye à composer ses premiers scénarios. Sa rencontre avec Raymond Queneau et le cinéaste Pierre Kast en 1945 va déboucher sur de vrais projets, dont hélas aucun n’aboutira. Pourtant, il reste fasciné par le 7e art : il participe à l’écriture de nombreux scénarios, fait de la figuration aux côtés de Jean Marais et Jeanne Moreau, et va même jusqu’à fonder une société de films ! Des décennies plus tard, les nouveaux talents de la scène française reprennent ses scénarios et les adaptent sous forme de court-métrages. Chaque film court est accompagné de la reprise d’une chanson de Boris Vian, rassemble de nombreux comédiens connus (Audrey Fleurot, Lou de Laâge, Hugo Becker, Claude Perron, Jean-François Galotte, Annelise Hesme) et respire le goût très vianesque de l’insolite, du rêve et de l’humour. Entre satire sociale, thriller, romance ou chronique parisienne, chacun de ces films illustrent une facette différente de l’artiste rappellent les trésors de fantaisie, d’inventivité et de liberté d’esprit de Vian. (Blaq Out)
 Silent LandSILENT ISLAND
Adam et Anna, charmant couple polonais, a loué une belle villa sur une île italienne, histoire de profiter pleinement d’un farniente ensoleillé. Mais ils déchantent en découvrant leur villégiature car la piscine est vide… Le loueur leur conseille d’aller se baigner dans la mer toute proche. Mais après avoir tergiversé, il envoie un ouvrier pour faire des travaux. Hélas, celui-ci se tue en tombant dans la piscine. Confrontés à la police et ne s’exprimant pas en italien, Adam et Anna perdent pied d’autant que les autorités se demandent s’ils sont intervenus pour porter secours… La cinéaste polonais Aga Woszczyńska s’empare d’un cadre paradisiaque pour sonder les secrets et les troubles d’un couple tandis qu’affleurent des questions et des fissures inattendues. D’autant que la présence d’un étranger -l’ouvrier réparateur- amplifie le sentiment d’insécurité d’Adam (Dobromir Dymecki) et d’Anna (Agnieszka Zulewska). Tandis que le couple tente de retrouver une existence normale en rencontrant un moniteur de plongée (Jean-Marc Barr) et en se livrant à des activités nautiques, un sentiment d’étrangeté permanent s’installe dans leur existence… On peut se demander si la cinéaste a été marquée par le cinéma de Michael Haneke ou par la trilogie Paradis d’Ulrich Seidl… En tout cas, Silent Land, jusqu’à son dénouement fantastique, est une aventure intime sur un couple en crise bien menée et qui réussit à distiller une atmosphère tour à tour angoissante et mystérieuse. (The Jokers)
Bete JungleLA BETE DANS LA JUNGLE
En s’inspirant librement de la nouvelle éponyme d’Henry James paru en 1903, le cinéaste autrichien Patric Chiha donne un voyage hypnotique à travers la musique et le temps en racontant l’histoire d’une errance en suspension : celle d’un couple d’amis, qui durant 25 ans, se retrouve tous les samedis dans une immense boîte de nuit à attendre un obscur événement, tout en tissant une romance obsessionnelle au rythme des époques musicales. Sélectionné au festival de Berlin, La bête dans la jungle est une expérience fascinante et unique par le son et l’image. Tandis que le monde réel change autour des protagonistes, la boîte de nuit devient une véritable capsule temporelle où la vie s’écoule comme dans un rêve. Un endroit hors du temps où les corps se font sensuels, langoureux, dans une insouciance purement juvénile. Le cinéaste peut compter, pour porter un récit magnétique, sur des interprètes incandescents avec Anaïs Demoustier (à l’affiche au cinéma, actuellement, dans Le temps d’aimer) à la beauté glamour et Tom Mercier, taciturne et mystérieux. Ils incarnent jusqu’à l’envoûtement deux êtres pris dans une relation unique et fusionnelle, mais passant à côté de leur vie, car bloqués dans une attente angoissée. Dans le rôle de la physionomiste du club, Béatrice Dalle est ténébreuse à souhait. (Blaq Out)
 Orgueil PassionORGUEIL ET PASSION
En 1811, les armées napoléoniennes se battent, depuis de longs mois, contre les Espagnols. Les Anglais, alliées des Espagnols, ont envoyé sur place le capitaine Anthony Trumbull avec pour mission de de s’emparer d’un gigantesque et puissant canon abandonné par l’ennemi. Tandis que la guerre gagne encore en intensité, Trumbull rencontre Miguel, le chef de la guérilla, ainsi que sa maîtresse Juana. En dépit de leur rivalité amoureuse et de stratégies différentes, Trumbull et Miguel se dressent avec détermination contre les troupes de l’empereur, parvenant à leur arracher le canon et à libérer la cité d’Avila. En 1957, l’Américain Stanley Kramer signe son second long-métrage en adaptant The Gun, un roman écrit en 1933 par Cecil Scott Forester. Le cinéaste (qui deviendra célèbre avec La chaîne (1958), Jugement à Nuremberg (1961) et Devine qui vient dîner (1967) donne une superproduction historique qui bénéficie d’une belle tête d’affiche avec Cary Grant, Frank Sinatra et Sophia Loren. (Sidonis Calysta)
 Sous TapisSOUS LE TAPIS
Odile se prépare à fêter son anniversaire. Alors que ses enfants et petits-enfants sont en route pour la soirée, Jean, son mari, décède brutalement. Incapable de faire face à cette réalité, elle le cache sous son lit… Comment réagir face au décès d’un proche ? Le deuil est au cœur de la première réalisation de l’actrice Camille Japy, (vue dans Alceste à bicyclette de Philippe Le Guay), qui entre au sein d’une famille où les secrets sont bien gardés. Comédie dramatique drôle, légère et audacieuse, Sous le tapis apporte un regard tout en délicatesse, sur la façon d’apprivoiser la mort. À la fois lumineux, subtil et émouvant, le film transporte le spectateur dans un véritable ascenseur émotionnel, le faisant passer du rire aux larmes en un instant. Les personnages ont, chacun, leurs propres réactions face au déni de deuil, à l’acceptation digne, au deuil festif ou encore face aux attitudes innocentes des enfants… La cinéaste peut s’appuyer sur un bon casting avec Ariane Ascaride et Bérénice Béjo dans un duo mère-fille tout en finesse, plein d’amour et de non-dits. Sur un musique de Matthieu Chedid, un hymne à la vie sur la force réparatrice de l’amour et des liens familiaux… (Blaq Out)
 Tournesols SauvagesLES TOURNESOLS SAUVAGES
Jeune Barcelonaise, Julia est tombée amoureuse d’Oscar, un garçon passionné et conflictuel qui vient de sortir de prison. Oscar oscille continuellement entre un amour ravi, des explosions de violence et un retour à l’amour aveugle. Une nuit, après une dispute de jalousie, tout se termine par une scène de violence conjugale. Quelques jours plus tard, Julia (Anna Castillo) décide de revenir vers Marcos, le père de ses trois enfants, jeune militaire affecté à Melilla, une enclave espagnole au Maroc. Quelques mois heureux s’écoulent avant que tout ne retourne à l’apathie et à une nouvelle séparation. Enfin, Álex, un ancien ami du lycée, devient son nouveau partenaire. En relatant, en 2022, la vie amoureuse de la solaire Julia découpée en trois parties dont chacune porte le nom d’un homme (Oscar, Marcos et Alex), le cinéaste espagnol Jaime Rosales, volontiers présenté comme le cousin ibérique de Michael Haneke, « livre le portrait empathique d’une fille tournesol, cherchant à se tourner vers un vrai soleil ». (Condor)
Continent Hommes PoissonsLE CONTINENT DES HOMMES POISSONS
Après le naufrage d’un navire qui se dirigeait vers le bagne de Cayenne avec une cargaison de déportés, le lieutenant Claude De Ros a la chance avec quelques-uns d’entre eux de gagner une île mystérieuse. Alors qu’ils recherchent de quoi manger, Claude et deux de ses compagnons tombent entre les mains d’Edmond Rackham, étrange personnage qui vit dans une villa de style colonial, protégé par Shakiva, une sorcière vaudou, chargée de surveiller la séduisante Amanda. De Ros comprend qu’il doit son salut au fait qu’il est médecin et qu’on lui confie la tâche de maintenir en vie le professeur Marvin, spécialiste en biologie et père d’Amanda. Attaché à Amanda, Claude découvre les laboratoires où Marvin a réussi à créer des créatures, croisement génétique entre les hommes et les poissons. Ceux-ci doivent récupérer un trésor enseveli dans les profondeurs souterraines de l’île. Sur fond d’Atlantide, l’Italien Sergio Martino tourne, en 1979, cette série Z de science-fiction dans laquelle on croise Joseph Cotten, le héros avec Orson Welles, du Troisième homme et, dans le rôle d’Amanda, Barbara Bach qui, fut en 1977, la Bond Girl de L’espion qui m’aimait… D’un autre maître italien du cinéma bis, en l’occurrence Lucio Fulci, Artus Films sort également Murder Rock (1984) dans lequel le propriétaire d’une prestigieuse école de ballet de New-York s’allie avec un mannequin masculin pour l’aider à résoudre une ténébreuse série de meurtres parmi ses étudiantes. (Artus Films )
Douce Nuit Sanglante NuitDOUCE NUIT, SANGLANTE NUIT
Enfants, Billy et Ricky ont assisté au meurtre de leurs parents par un criminel en cavale déguisé en Père Noël. Devenu adulte, Billy travaille dans un magasin de jouets. Un jour, il doit revêtir un costume de Père Noël. Les traumatismes du passé ressurgissent alors soudainement… Il se déguise en Père Noël pour tuer les personnes qu’il juge « vilaines », à commencer par la mère supérieure dont il fut le souffre-douleur pendant ses années passées à l’orphelinat… Sorti au cinéma en novembre 1984, le film de Charles E. Sellier Jr. rencontra un joli succès en salles avant de voir sa carrière rapidement stoppée. Son distributeur le déprogramma sous la pression de nombreuses associations de parents d’élèves. Bien qu’amputé de quelques minutes, le film fit scandale, accusé par l’Amérique conservatrice de dévoyer l’image du Père Noël en le montrant comme un serial-killer. Le thème servira ensuite à plusieurs reprises dans d’autres films… Fleuron de l’âge d’or du slaher, Silent Night, Deadly Night se place du point de vue du tueur et multiplie, avec imagination, les meurtres… Le film sort pour la première fois en HD et en version non censurée. Il est accompagné d’un livret (24 p.) sur la genèse de cette aventure. (Rimini Editions)
 Peche VenielPECHE VENIEL
Dans la station balnéaire de Versilia où il est en vacances,  le jeune Sandro, les hormones en effervescence, passe son temps à feuilleter des revues érotiques et à observer les filles sur la plage. Son frère ainé contraint de s’absenter, il porte toute son attention sur Laura, sa belle-sœur, une femme très attirante dont il est chargé de prendre soin. Sandro va se montrer fort attentionné à l’égard de la belle Laura… Ah, il faut le reconnaître, la plastique de Mademoiselle Antonelli est parfaite. On comprend aisément que Salvatore Samperi, l’un des maîtres de la comédie érotique italienne, ait voulu surfer sur le succès de Malicia (1973) qui rassembla plus de onze millions de spectateurs dans les salles italiennes. Un public qui vit naître, sur le grand écran, l’un des sex-symbols du cinéma transalpin. En 1974, il donne à nouveau Alessandro Momo pour partenaire à Laura Antonelli. On sait évidemment à quoi s’attendre dans le registre érotico-humoristico-matteur… (Sidonis Calysta)
 Malicia 2000MALICIA 2000
Riche oisif de la soixantaine, Ignazio La Brocca coule des jours heureux dans sa belle villa sicilienne avec Angela, son ancienne bonne devenue son épouse. Le jour où un jeune architecte s’y installe avec son fils Jimmy âgé de quinze ans, l’harmonie du couple se fissure. L’adolescent tombe sous le charme de la belle maîtresse des lieux et, pour la séduire, redouble d’imagination. S’il réussit à sortir son mari de sa maison en pleine nuit pour arriver à ses fins, il ne s’attendait pas à que ce soit son père qui profite des faveurs d’Angela. Aussi rusé qu’amoureux, Jimmy n’a pas dit son dernier mot… Malicia (1973) fut (voir plus haut) un imposant succès en Italie. En France, le film réunit aussi plus d’un million et demi de spectateurs. Comme les producteurs pensent que le succès appelle le succès, on décida donc, en 1992, de donner une suite à Malicia. Salvatore Samperi est toujours à la caméra et Laura Antonelli de la partie. Il manque Alessandro Momo qui s’est tué, à moto, en 1974, quelques mois après la sortie de Péché véniel. Fallait-il remettre le couvert autour des émois d’un adolescent devant une belle femme mûre ? On se doute de la réponse… Quant à la malheureuse Laura Antonelli, elle eut à souffrir de la chose. Pendant la préparation du film, un chirurgien esthétique pratiqua une injection de collagène sur son visage afin de masquer des rides. Hélas, l’injection provoqua une violente allergie qui lui laissa de lourdes séquelles… (Sidonis Calysta)

LE TUEUR GLACIAL DE MELVILLE ET L’HIVER RUSSE DE BONDARTCHOUK  

SamouraiLE SAMOURAI
« Il n’y a pas de plus profonde solitude que celle du samouraï si ce n’est celle du tigre dans la jungle, peut-être… » Cette citation, prétendument issue du livre du Bushido mais écrite par Melville lui-même, s’inscrit au générique du film. Dans sa chambre aux murs gris, dont la sobriété monacale n’est troublée que par un petit oiseau en cage, Jef Costello se prépare à sa prochaine mission. Le tueur à gages solitaire doit liquider le patron d’une boîte de jazz. Soigneusement, Costello exécute son coup. Dans le club, personne ne le remarque sauf la pianiste qui le croise alors qu’il quitte la scène du crime… Arrêté pour vérification d’identité, il est relâché grâce à un solide alibi mis au point avec sa maîtresse Jane (Nathalie Delon). Pourtant persuadé que Costello est bien son homme, le commissaire de police (François Périer) n’entend pas le lâcher… Référence absolue du cinéma melvillien, du film noir et même du cinéma tout court, Le samouraï, écrit expressément pour Delon, est un chef-d’œuvre du 7e art qui a influencé et continue d’influencer des générations de cinéastes. Sorti en 1967, Le samouraï est le premier des trois films tournés par le duo Delon/Melville. Suivront Le cercle rouge (1970) et Un flic (1972). Le cinéaste avait très tôt repéré Delon et travailler avec lui avait tourné quasiment à l’obsession. Au-delà de sa place dans le 7e art, Le samouraï marque la rencontre entre deux monstres sacrés. Devant un metteur en scène passionné par la direction d’acteurs, Delon excelle à donner vie à un fascinant personnage impassible, inhumain et inaltérable. Dans sa chambre délabrée, enfilant son imper et lissant son chapeau feutre d’un geste lent, Jeff Costello, homme mystérieux, fermé, taciturne, impose pour toujours la figure du tueur froid, habité par aucune haine et aucun sentiment… Ce polar dépouillé et glaçant, sombre et énigmatique sort dans une nouvelle version 4K restaurée et présenté dans un coffret collector limité et numéroté à 1000 exemplaires. Le thème de la solitude qui traverse toute l’œuvre de Melville n’avait jamais été traité avec autant de rigueur. En faisant preuve d’une maîtrise formelle tant pour la mise en scène, le montage que l’esthétique, le réalisateur signe un polar poétique et blême d’une cruelle beauté. (Pathé)
Guerre PaixGUERRE ET PAIX
Alors que le Napoléon de Ridley Scott fait l’actualité dans les salles obscures, on retrouve aussi, en coffret collector, Guerre et paix, l’adaptation cinématographique soviétique du roman de Léon Tolstoï mise en scène par Sergueï Bondartchouk et sortie sur les écrans en 1966-67. L’histoire se déroule entre 1805 et 1820. Alors que Napoléon mène sa Grande Armée toujours plus loin en Russie, la vie continue pour l’aristocratie à Moscou avec ses mondanités et ses petits scandales. La bataille de la Moskova sera un carnage épique. Moscou est dévorée par les flammes. La retraite en hiver, soumise aux attaques des Cosaques, est un calvaire pour les troupes de l’empereur. À travers une épopée lyrique et étourdissante, cette fresque historique retrace, en quatre épisodes, l’histoire de deux familles de l’aristocratie russe bouleversée par la guerre. Tirant son origine du Guerre et paix (1956) de l’Américain King Vidor (qui connut un imposant succès dans les salles russes avec plus de 31 millions de spectateurs), le film est, à l’instar du livre, divisé en quatre parties totalisant 484 minutes (8h04) dans sa version longue. Œuvre cinématographique monumentale, le film est réputé pour la hardiesse de sa forme, la richesse des thèmes abordés (analyses psychologiques, éthiques, esthétiques, métaphysiques, géopolitiques, historiques) et la brillante complexité de son architecture. Le coffret contient d’abondants suppléments avec notamment le résumé de chaque épisode par Joël Chapron, spécialiste des cinématographies d’Europe de l’Est, des entretiens autour de la production du film et son réalisateur, le making of du film (30 mn, Mosfilm, 1969), un livre de 156 pages ou encore un portrait (dans l’émission Les Soviétiques (28 mn, 1968) de la comédienne russe Lioudmila Savelieva qui incarne le personnage principal de Natacha Rostov. Notons qu’avec humour, l’éditeur observe, dans sa communication, que le Napoléon de Scott utilisa mille figurants tandis que Bondartchouk (le film remporta l’Oscar du meilleur film étranger en 1969) oeuvra avec 100.000 figurants… (Potemkine)
Hello Actors StudioHELLO ACTORS STUDIO
À l’occasion de son 40e anniversaire, l’Actors Studio, le mythique laboratoire américain pour acteurs professionnels, a ouvert ses portes à Annie Tresgot, monteuse (notamment pour Jean Rouch) et réalisatrice française reconnue de documentaires, notamment sur Elia Kazan ou Billy Wilder. Hello Actors Studio (réalisée en 1987) est une plongée passionnante au cœur de la vénérable institution new-yorkaise, fondée en 1947 par des anciens membres du Group Theatre souhaitant diffuser la méthode d’interprétation dérivée de Stanislavsky. Paul Newman, Ellen Burstyn, Sydney Pollack, Shelley Winters, Arthur Penn, Gene Wilder, Robert De Niro et bien d’autres encore parlent de ce lieu atypique, véritable écrin de liberté et de création. Le film est constituée de trois épisodes : L’atelier des acteurs (58 mn), Une solitude publique (57 mn) et Une communauté de travail (56 mn). Hello Actors Studio est disponible pour la première fois dans sa nouvelle restauration… (Carlotta)
Master GardenerMASTER GARDENER
Narvel Roth est un type sombre, à l’allure raide, au regard inquisiteur et quasiment inquiétant. Il œuvre comme horticulteur dans la propriété de la très raffinée Mme Haverhill. Alors qu’ils préparent une grande exhibition florale, Norma Haverhill (Sigourney Weaver) demande un service à Narvel. Qui sait bien qu’il ne pourra pas dire non à son employeuse. Celle-ci lui demande de prendre sa petite-nièce Maya (Quintessa Swindell) comme apprentie… Bientôt le chaos s’installe car Narvel se retrouve déchiré entre deux femmes, l’une assez vieille pour être sa mère, l’autre assez jeune pour être sa fille. Paul Schrader (scénariste de Taxi Driver ou de Raging Bull (1980) pour Scorsese ou réalisateur de Blue Collar (1978), American Gigolo (1980) ou Mishima (1985) revient agréablement dans la lumière avec une réflexion sur un être très solitaire en quête de rédemption. Il s’intéresse à la dimension « toxique » d’une liaison entre Narvel et Norma qui signale par un « Mon trésor », le moment où elle souhaite « consommer » son jardinier. Ensuite, le film prend une tournure plus conventionnelle lorsque Narvel (Joël Edgerton) décide, en retrouvant ses réflexes criminels (lorsqu’il retire son t-shirt, ses tatouages ne laissent aucun doute sur son passé), de tirer Maya des griffes de dealers. (The Jokers)
Inferno RossoINFERNO ROSSO
Le Romain Aristide Massaccesi (1936-1999), connu sous le pseudonyme Joe D’Amato, est généralement considéré comme le cinéaste italien le plus prolifique de tous les temps, avec plus de 200 films réalisés, produits et photographiés. Maître du cinéma d’exploitation, D’Amato a souvent choqué (provoquant du coup les foudres de la censure) avec, par exemple, Viol sous les tropiques (1977) qui met en scène une journaliste prénommée Emanuelle découvrant un cas troublant de cannibalisme sur une jeune fille dans la forêt amazonienne ou encore Blue Holocaust (1979) qui traite de nécrophilie… Manlio Gomarasca, ardent défenseur du cinéma bis italien, et Massimiliano Zanin, auteur, en 2013, d’un documentaire sur le réalisateur Tinto Brass, se penchent, ici, sur un monument du cinéma et un artisan stakhanoviste de la pellicule souvent perçu comme un « roi du porno » ou, au mieux, un petit tâcheron de films bis. Ils ont choisi de raconter Joe D’Amato comme un personnage aux mille vies et autant d’histoires qui passent de l’érotisme soft – puis hard – au gore, et du cinéma post-apocalyptique à un retour forcé au porno. Ils ne traitent pas les périodes western et péplum, Le documentaire d’environ une heure donne aussi la parole, avec forces anecdotes et souvenirs, à des amis, des parents, des confrères, voire des fans… On découvre ainsi le parcours d’un autodidacte curieux de tout (qui fut assistant de Godard et Lizzani) qui se voulait artisan et dont le Strasbourgeois Jean-François Rauger, directeur de la programmation de la Cinémathèque française, dit « qu’il filme comme il respire »… Un cinéaste qui n’a jamais connu la reconnaissance de son vivant et qu’on (re)découvre ici avec intérêt. (Le Pacte)
Silver HazeSILVER HAZE
Aujourd’hui âgée de 23 ans, Franky soupçonne Jane, la meilleure amie de sa mère, d’avoir mis le feu au pub où elle dormait lorsqu’elle était enfant. Elle cherche à se venger. Lorsqu’elle rencontre Florence, une jeune fille dont elle tombe éperdument amoureuse, elle s’enfuit de chez elle. C’est dans une atmosphère british et dans le style du cinéma social anglais que la cinéaste hollandaise Sacha Polak installe son action qui tourne autour de personnages endurcis et profondément blessés. Dans le rôle de Franky, l’infirmière d’hôpital capable et pleine de compassion, la cinéaste retrouve Vicky Knight, comédienne non-professionnelle qui tenait déjà avec talent la vedette dans Dirty God (2019). Parmi les patients que suit Franky, se trouve Florence (Esmé Creed-Miles) en convalescence après une tentative de suicide. Lorsque les deux femmes deviendront amantes, c’est Florence qui fournira à Franky, avec sa maison de Southend-on-Sea, un lieu sûr pour se loger et la mettre à l’abri de l’homophobie de sa famille… Une œuvre âpre, pas sans défaut dans sa narration mais qui distille cependant des lueurs d’espoir… (The Jokers)
Initial DINITIAL D
Jeune étudiant livreur de tofu pour l’entreprise de son père, Takumi Fujiwara passe son temps à dévaler à toute vitesse les routes escarpées du Mont Akina à bord de sa voiture, une Toyota Sprinter Trueno AE86 blanche et noir. Lors d’une de ses livraisons matinales, ce type rêveur qui ne connaît rien aux voitures, croise la route d’un Street racer expérimenté qu’il bat avec une facilité déconcertante. Dès lors, les défis de professionnels et d’amateurs surdoués du drift lui sont lancés. Il va devoir se confronter à leurs talents et les vaincre pour s’affirmer comme le meilleur conducteur de la ville… Pour leur quatrième collaboration à la réalisation, Andrew Lau et Alan Mak adaptent avec brio le manga culte de Shuichi Shigeno. Dans la droite lignée de la saga Fast and Furious, Initial D plonge le spectateur dans l’expérience intense et palpitante des courses de voiture, au plus près du danger. Les réalisateurs de la trilogie Infernal Affairs offrent de purs moments d’adrénaline, aux fans du genre comme aux néophytes, grâce à une mise en scène parfaitement maîtrisée et visuellement captivante. Présenté pour la première fois en Blu-ray dans une nouvelle restauration 4K, Initial D (réalisé en 2005) est accompagné de suppléments comme L’envers de la course (21mn), un making-of dans lequel les membres de l’équipe – des réalisateurs au chef cascadeur en passant par les acteurs – racontent le tournage du film. Pour sa part, Andrew Lau détaille l’aventure de l’adaptation du célèbre manga au cinéma. (Carlotta)
Land of DeadLAND OF THE DEAD
Dans un avenir pas si lointain, une poignée de survivants barricadés dans une ville bunker vit encore dans le souvenir de l’ancien monde… Des zombies, qui désormais pensent et communiquent, s’organisent pour prendre d’assaut la ville bunker. Kaufman, autoproclamé chef des vivants, engage un commando de mercenaires pour contrer les attaques de ces morts-vivants d’un genre nouveau…Vingt ans après Le jour des morts-vivants, George A. Romero (1940-2017) faisait, en 2005, un retour par la grande porte avec le nouvel opus de l’œuvre de sa vie. Si le cinéaste est toujours aussi à l’aise dans le film de genre, son propos s’élargit à une lucide réflexion sociopolitique sur l’Amérique moderne et ses contradictions. Dans un monde envahi par des zombies de plus en plus intelligents et organisés, les riches humains se réfugient dans une tour d’ivoire tandis que les plus démunis vivent difficilement à la périphérie, tous se protégeant derrière des palissades électrifiées les séparant des morts-vivants. Alors que dans Zombie (1978), les morts-vivants apparaissaient comme une caricature de la société humaine, ils sont ici un peuple en train de se structurer, d’accéder à l’intelligence et aux sentiments : compassion et colère face à la manière dont sont traités leurs congénères, utilisés comme cibles « vivantes ». De son côté, Kaufman, dans le luxueux gratte-ciel nommé Fiddler’s Green, a reproduit tous les défauts de « l’ancien monde » : la corruption, la drogue, la prostitution, tenant le peuple par le pain et les jeux. Dans le rôle de Kaufman, le grand Dennis Hopper incarne un personnage à l’opposé de celui de ses débuts dans Easy Rider. (Wild Side)
The ChampionTHE CHAMPION – LE COMBAT DE LA LIBERTE
En 1940, le champion de boxe polonais Tadeusz « Teddy » Pietrzykowski est séparé de sa famille. Il tente de fuir en France mais est arrêté puis déporté à Auschwitz. Alors que les détenus luttent quotidiennement pour leur survie, sa condition physique lui permet de traverser les premiers mois de travaux forcés sans faire de vagues. Jusqu’au jour où, pris à parti par un Kapo, il est contraint de dévoiler sa vraie nature. D’abord tentés de le sanctionner sévèrement, les nazis lui proposent un marché : participer à des combats pour divertir les soldats, et bénéficier en échange de nourriture, de médicaments, et de tâches allégées. Discret et solitaire, Teddy y voit une opportunité d’améliorer les conditions de vie de ses camarades. Mais les geôliers voient d’un mauvais oeil la popularité grandissante du boxeur, devenu symbole d’espoir et de résistance. En 2020, avec Piotr Glowacki dans le rôle principal, le réalisateur polonais Maciej Barczewski déroule une aventure qui se déroule au plus fort de la Deuxième Guerre mondiale et suit le combat presque impossible de Pietrzykowski pour sa survie. Le cinéaste Barczewski a écrit le scénario en se fondant sur l’histoire vraie mais peu connue de Tadeusz Pietrzykowski (1917-1991). Surnommé le Weiss Nebel (brouillard blanc) en raison de son style de combat unique, « Teddy » n’aurait perdu qu’un seul combat pendant son séjour à Auschwitz. Transféré plus tard dans d’autres camps et finalement à Bergen-Belsen, il y sera libéré en avril 1945. Un drame sportif et historique. (Condor)
Sur La BrancheSUR LA BRANCHE
Elle ne va pas très fort, la pauvre Mimi ! A 30 ans, elle se demande toujours ce qu’elle pourrait faire quand elle sera grande. Elle pousse la porte d’un cabinet d’avocats mais Claire Bloch, avocate plutôt surmenée, n’a rien à lui proposer, sinon lui confier le soin d’aller récupérer un dossier au domicile de Paul, son ex-associé… La rencontre de Mimi et de Paul va faire des étincelles. Et lorsqu’il va s’agir de défendre Christophe Ajame, actuellement en détention, les choses vont partir en vrille, d’autant que Mimi tombe amoureuse de Christophe. Paul, lui, voudrait bien tourner la page mais Mimi bouscule l’existence d’un type au bout du rouleau, traqué notamment par deux harpies… Marie Garel-Weiss a imaginé une fiction autour de deux « inadaptés de la vie ». Mimi va au bout de ses obsessions et est totalement acceptée pour ce qu’elle est, alors que dans la vie, elle aurait probablement été vouée à l’enfermement. Assoiffée d’absolu, Mimi a compris qu’elle n’y arriverait pas de la même façon que les autres. Paul, lui, va entrer dans la sphère, à la fois jubilatoire et angoissante, de Mimi. On devine bien le potentiel de comédie qu’il y a dans ce sujet. Même si la cocasserie est parfois au rendez-vous, le film manque singulièrement de rythme et, in fine, on n’entre jamais vraiment dans ce mélange d’enquête et de comédie romantique. Pourtant les comédiens s’en donnent à coeur-joie. Daphné Patakia est une Mimi barrée à souhait. Benoît Poelvoorde est au diapason. (Pyramide)
Titeuf S3TITEUF – LA CONSPIRATION DES FILLES
Turbulent ado à la mèche blonde flamboyante, Titeuf est la star des cours de récré ! Toujours cerné de son indéfectible bande de copains, Manu en tête, il ne recule jamais devant une bonne bêtise, faisant des pieds et des mains pour attirer l’attention de la ravissante Nadia… Créé en 1992 par le Suisse Philippe Chappuis, alias Zep, la bande dessinée et son personnage culte aux expressions inoubliables, a connu un imposant succès (plus de 23 millions d’albums vendus). L’adaptation en série d’animation à partir de 2001 est restée fidèle à l’esprit de la BD avec son humour, ses gags hilarants, ses dialogues réussis et ses personnages attachants. Son héros y est un peu édulcoré, rendant la série ainsi accessible à des enfants un peu plus jeunes. L’adaptation animée est en effet recommandée dès 8 ans, quand la BD ne l’est qu’à partir de 10 ans. Titeuf raconte la vie quotidienne d’un garçon de huit à dix ans, de ses amis et de leur vision du monde des grands. Une grande partie de leurs discussions tourne autour du mystère des filles, de l’amour et du sexe. La troisième saison de la série est entièrement inédite en dvd. Le premier volume comporte 26 épisodes, pour plus de trois heures de bons rires. (Hopikid)
Sacre Pere NoelSACRE PERE NOEL
Mais que fait le Père Noël après la nuit du 24 décembre ? Comme chaque année, après avoir terminé sa livraison de cadeaux, il a quitté ses bottes et son manteau pour partir en vacances ! Son traîneau transformé en caravane, il vole à la découverte de la France et ses bons petits plats, de l’Ecosse et de Las Vegas. Un voyage mouvementé, mais qui ne fera pas oublier à ce bougon, grognon, glouton de revenir à temps pour ouvrir les premières lettres, préparer les cadeaux et décrasser son traîneau. Il faut vite reprendre le rythme, à renfort de chocolat chaud, pour organiser la nouvelle tournée et réveiller la magie de Noël. Plus de 40 ans après leur sortie, Sacré Père Noël et Les Vacances du Sacré Père Noël, les livres de Raymond Briggs sont des best-sellers internationaux qui s’attachent à démythifier le père Noël. Fidèle à l’oeuvre originale, l’adaptation animée, fluide et colorée (éditée en dvd pour la première fois en France), offre le portrait d’un vieil homme grincheux, un Père Noël qui n’aime pas l’hiver et rêve de vacances à la plage. Mais malgré son caractère bougon, le Père Noël s’avère touchant, drôle et attachant, et il reste dévoué à son travail : la féerie de Noël est préservée ! Un enchantement pour petits (dès 5 ans) et grands ! (Hopikid)
Blagues Toto 2LES BLAGUES DE TOTO 2
Toto part à la campagne pour cinq jours de classe verte avec ses camarades de classe. Il essaye de trouver de nouvelles blagues à tester. Comme les fermiers du coin lui semblent plutôt bizarres, le gamin est très tenté de trouver des secrets ou des mystères cachés… Trois ans après Les blagues de Toto (2020), Toto enchaîne de nouvelles blagues, cette fois-ci campagnardes dans une ferme bio. Pascal Bourdiaux est toujours derrière la caméra et il développe, avec son scénariste Mathias Gavarry, des thèmes autour de la pollution, l’agriculture biologique et le retraitement des déchets, bonne manière après tout de sensibiliser le jeune public. C’est désormais Hugo Trophardy qui incarne le personnage de Toto tandis qu’on retrouve, autour de lui, Guillaume de Tonquédec et Anne Marivin déjà présents dans le n°1. Si l’intrigue est gentille et la qualité des gags de Toto pas constante, ceux-ci devraient néanmoins divertir le jeune public. D’autant que le propos est positif, voire écolo-citoyen. Et, au total, voici un bon petit moment à savourer en famille. (M6)