L’INSÉCURITÉ DES CITÉS, UN JEU DE PISTE NIPPON, L’ANTI-FRANQUISTE CACHÉ ET LE JAZZMAN ALCOOLIQUE

LES CHIENS
Les ChiensInstallé depuis peu en banlieue parisienne, le docteur Henri Ferret (Victor Lanoux) remarque que de nombreux patients le consultent pour des morsures de chien. Il apprend que, face à l’insécurité ambiante, les habitants s’équipent de chiens chez un certain Morel (Gérard Depardieu), un dresseur qui porte un amour excessif à des bêtes parfois dangereuses et imprévisibles. En 1979, Alain Jessua signe son film sans doute le plus fameux avec ce pamphlet grinçant sur la paranoïa sécuritaire. Choisi par Jean-Baptiste Thoret dans son excellente collection Make My Day, ce thriller (qui a été tourné dans la ville nouvelle de Torcy) résonne comme une œuvre d’anticipation qui traque, sur les rythmes musicaux volontiers dissonnants de Michel Portal, l’envers sombre de l’idéologie du progrès et du bien-être. Dans les suppléments, on trouve un entretien (25 mn) avec Alain Jessua et Nicole Calfan, l’une des interprètes du film. (Studiocanal)
CURE
CureDans Tokyo déserté, l’officier de police Kenichi Takabe enquête sur une série de crimes dont toutes les victimes portent une croix entaillée dans le cou… Un jour, à proximité du lieu de découverte d’un corps, il met la main sur un vagabond, ancien étudiant en psychologie, devenu fou, qui étudia l’incitation hypnotique. Possédant d’inquiétants pouvoirs, il est capable de pousser, contre leur volonté, des individus à commettre des crimes. Entre film noir et fantastique, Kiyoshi Kurosawa distille, en 1999, un thriller sensoriel, à l’esthétique très élaborée, qui ressort dans une belle version restaurée et pour la première fois en Blu-ray. Dans une atmosphère inquiétante, voici un jeu de piste jalonné de crimes sanglants qui est aussi la peinture d’une société japonaise en proie au vide intérieur. Aussi angoissant qu’envoûtant. (Carlotta)
UNE VIE SECRETE
Une Vie SecreteDans l’Espagne de 1936, Higinio Blanco, tailleur, conseiller municipal et partisan républicain, sait que sa vie est menacée par l’arrivée des troupes franquistes dans sa ville. D’accord avec sa femme Rosa (excellente Belen Cuesta), il décide de se cacher dans sa propre maison. Tandis que son épouse affecte de ne pas savoir où est passé son époux, Higinio va rester terré chez lui pendant plus de 30 ans ! C’est un trio de réalisateurs basques qui fait revivre, de manière palpitante alors que le sujet était casse-gueule, l’existence de… taupe d’Higinio incarné par un Antonio de la Torre véritablement habité. On mesure la crainte des représailles, la peur toujours présente lorsque des voisins commencent à rôder dangereusement autour de la maison mais aussi l’amour qu’éprouve un couple constamment contraint au mensonge. (Epicentre)
A MAN CALLED ADAM
A Man Called AdamBrillant cornettiste de jazz, Adam Johnson est miné par l’alcoolisme, le racisme et par la culpabilité liée au décès de sa femme et de son enfant. Son mauvais caractère le met régulièrement en porte-à-faux avec ses proches. La rencontre de ce type quasiment irrécupérable avec une militante des droits civiques et avec son grand-père, lui aussi trompettiste, va infléchir son parcours de façon décisive… En 1966, Léo Penn (qui fut l’une des victimes du maccarthysme en étant placé sur la liste noire d’Hollywood) signe sa première réalisation avec ce drame à l’atmosphère très jazzy, présenté dans la collection Make my Day. Entouré de Louis Armstrong, Ossie Davis, Cicely Tyson, Sammy Davis Jr. est formidable en type cassé dont le visage reflète constamment une vraie souffrance. (Studiocanal)
WANDER
WanderIl n’est pas bien dans sa tête, Arthur Bretnik… Il est vrai qu’il a de quoi être détraqué à cause de la mort de sa fillette et de l’état catatonique de sa femme. Recruté par la mère d’une jeune femme assassinée, ce privé (Aaron Eckhart) enquête dans la petite ville de Wander au Nouveaux Mexique et se persuade que l’affaire est liée à la mort de sa fille. April Mullen propose un thriller qui doit beaucoup au personnage instable de Bretnik, de plus en plus paranoïaque et obnubilé par les théories complotistes. Sa quête de justice met gravement sa santé mentale en danger. Bientôt Bretnik, sous le regard de son ami Jimmy (Tommy Lee Jones), ne sera plus capable de faire la différence entre la réalité et la fiction… (Universal)
GANDHI
GandhiSoutenu dès 1962 dans son projet par le premier ministre indien Nehru puis par Indira Gandhi, le Britannique Richard Attenborough mit pourtant une vingtaine d’années pour trouver les producteurs qui lui permirent, en 1982, de se lancer dans le vaste (190 mn) biopic de la vie du père de la Nation brillamment incarné par un Ben Kingsley originaire, par son père, du même Etat indien où naquit Gandhi. A travers des épisodes de la vie du Mahatma (1869-1948) comme le massacre d’Amristar et le mouvement de désobéissance civile qui suivit ou la lutte pour l’indépendance, le cinéaste s’applique à retranscrire la philosophie de Gandhi et notamment son souci de la non-violence. Une œuvre ample sur les choix nécessaires à faire dans l’existence. Le film décrocha, en 1983, pas moins de huit Oscars. (Sony)
L’ENVOLÉE
EnvoléeGymnaste douée, Leigh, 14 ans, vit dans la banlieue de Brighton avec un père trop absent. Elle s’entraîne intensément pour sa première compétition. Lorsqu’un demi-frère plus âgé apparaît une nuit sur le pas de sa porte, l’existence solitaire de Leigh vacille… Avec Joe, demi-voyou, Leigh découvre des sensations grisantes. Même si elle s’inscrit dans la tradition du naturalisme social du cinéma anglais, Eva Riley, pour son premier long-métrage, ne filme pas la grisaille et les immeubles sans joie mais le soleil et de larges paysages. Et elle réussit le bon portrait de deux adolescents en rupture de famille et cherchant leurs marques. Frankie Box (Leigh) et Alfie Deegan sont excellents… (Arizona)
DEUTSCHLAND 89
Deutschland 89La chute du Mur de Berlin est proche et la Stasi craint une invasion de la RDA par l’Allemagne de l’Ouest. C’est dans cette période historique tendue que se déroule l’ultime volet (8 épisodes) de la saga d’espionnage créée par Anna et Jörg Winger qui avaient d’abord donné Deutschland 83 et Deutschland 86. Martin Rauch (Jonas Day), agent de la HVA, le renseignement extérieur de la RDA, est, tout comme les membres de la Stasi, à un carrefour de son existence. Quoi faire lorsque la RDA va disparaître quasiment du jour au lendemain? Passer sous le giron du grand frère russe, collaborer avec les services de l’Ouest ou encore fuir à l’étranger et se faire oublier. « Ils veulent la liberté… Ils auront le capitalisme » observe, amère et cynique, Lenora (Maria Schrader), une ancienne du HVA… (Studiocanal)
LE REFLUX
Le RefluxNé en 1922 à Blotzheim en Alsace et mort assassiné en Norvège la nuit de Noël 1983 par sa dernière compagne, Paul Gégauff fut le scénariste le plus prolifique de la Nouvelle vague, signant notamment quinze films pour Chabrol. Personnalité complexe, séducteur et dandy, Gégauff réalisa (en écrivant aussi le scenario et les dialogues) un unique film en adaptant librement Stevenson et en tournant à Tahiti en 1962. Voici l’aventure aux relents coloniaux de trois anti-héros (Christian Marquand, Michel Subor, Franco Fabrizi) échoués pour des raisons mystérieuses à Tahiti. Ils ne s’apprécient guère mais vont s’aider à survivre en transportant une cargaison de champagne volée sur un bateau dont l’équipage a été décimé par le typhus. Une curiosité… (Gaumont)
LA CIBLE HUMAINE
Cible HumaineLe boxeur Jack Dempsey racontait qu’il était souvent importuné par des bagarreurs qui lui cherchaient noise en voulant prouver qu’ils étaient plus forts que lui. Le scénariste William Bowers s’empara de l’idée et la transposa dans l’Ouest américain. Après avoir tué en légitime défense le jeune Eddie qui l’avait défié, Jimmy Ringo est poursuivi par les trois frères du mort qui veulent se venger… En 1950, devant la caméra d’Henry King, Gregory Peck incarne le tireur le plus rapide de l’Ouest mais son personnage de Ringo est surtout un homme fatigué de devoir toujours fuir. Dans un saloon, où se déroule l’essentiel de l’action, Ringo attend de pouvoir revoir sa femme (Helen Westcott) et son jeune fils et peut-être de partir s’installer ailleurs. Un western âpre et pessimiste. (Sidonis Calysta)
LE BEAU VOYAGE
Beau VoyageDans un port brumeux, Léna, jeune fille exploitée par son patron, croit trouver en Yvon, un jeune docker, l’amour. Pour connaître une vie de rêve dans des pays merveilleux, Yvon vole et est arrêté. Libéré, Yvon part seul, Léna le rejoindra plus tard. Le temps file. Un jour, Léna (Renée Saint-Cyr) reçoit une lettre d’Yvon contenant l’argent du voyage. Elle s’embarque sur un paquebot. A bord, voyage Richard Lehmann, un célèbre pianiste. Entre Léna et lui, quelque chose passe. Ils s’aperçoivent peu à peu qu’ils se complètent harmonieusement. En 1947, sur un scénario de Maurice Clavel, Louis Cuny signe ce drame d’amour qui sera la dernière apparition sur grand écran de Pierre Richard-Willm (Lehmann) qui prendra ensuite la tête du Théâtre du peuple de Bussang. (Gaumont)
EMBATTLED
EmbattledJusqu’à quelle limite peut-on aller pour atteindre son rêve ? Lycéen, Jett Boykins vit avec sa mère et son jeune frère atteint du syndrome de Williams. Même si Cash, son père, a quitté sa famille dans des conditions sinistres, Jett continue à l’admirer sans réserve. D’ailleurs, il le rejoint régulièrement dans son club de sport pour s’entraîner avec lui. Grand champion de MMA, Cash est un type hâbleur, brutal, volontiers odieux et appartenant à une époque révolue. Le réalisateur Nick Sarkisov s’empare de l’univers du MMA, le sport de combat le plus en vogue actuellement aux USA, pour servir de décor à un drame familial douloureux où les personnages s’affrontent sans merci. Ainsi Jett finira par monter dans la cage pour combattre son propre père (Stephen Dorff). Et comprendre que certaines défaites valent des victoires… (Universal)

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