Gérardmer et Denis Blum qui fait son marché

Lorsque le soleil brille sur Gérardmer, la « perle des Vosges » dispense, presque à Pâques fleuries, des grâces méditerranéennes! Et les rayons qui jouent avec les friselis du lac lancent d’intermittentes lumières qui imposent aux promeneurs le port de lunettes de soleil… Pourtant, du 4 au 7 avril, c’est bien dans l’obscurité complice et les fauteuils rouges de la salle de cinéma du casino, qu’on ira goûter d’autres éclats lumineux, ceux de ce 7e art dont Cocteau disait qu’il était « l’écriture moderne dont l’encre est la lumière »

Dans la salle de cinéma du Casino JOA. DR

Dans la salle de cinéma du Casino JOA. DR

Lorsque le rideau se lèvera sur la 21e édition des Rencontres du cinéma de Gérardmer, Denis Blum, le responsable de la programmation, poussera probablement un (petit) soupir de soulagement. Les Rencontres 2017 -celles de la majorité après celles, l’an dernier, du bel âge- seront sur les rails. Bien sûr, le discret Denis Blum est, en matière de Rencontres, un solide briscard qui a, sans doute, vu tout ce qu’il fallait voir en matière de programmation de cette manifestation qui ancre la cité vosgienne dans les bons rendez-vous du cinéma national. « Le plus compliqué, explique notre homme, c’est de trouver le bon équilibre, notamment par rapport aux venues des équipes de films… C’est parfois un vrai casse-tête pour construire quelque chose qui se tienne. Car un distributeur peut très bien dire qu’il ne peut pas finalement donner un film. Et il faut alors tout reprendre… » Car les Rencontres tentent, pour tous les films français, de faire venir des équipes à Gérardmer. « Nous aurons neuf équipes sur trois jours et demi. Et il y a beaucoup de monde sur jeudi et vendredi… » Denis Blum sait aussi que les demandes d’interviews des médias deviennent alors compliquées à gérer et à satisfaire: « Certains vont devoir manquer des films et je sais bien que les journalistes veulent tout voir… »

Car les Rencontres réunissent trois publics bien distincts. « Et nous y tenons! », insiste Denis Blum. Gérardmer est d’abord un rendez-vous professionnel pour les exploitants de salles du Grand Est mais aussi de la région parisienne ou de Bourgogne et de Franche Comté. Mais, depuis les débuts en 1996, les Rencontres ont toujours été ouvertes au grand public: « Dès la première séance, à 9h, nous avons environ 200 personnes dans la salle… ». Une première séance qui ressemble à une réunion de cinéphiles alors que la soirée a plus des allures, toutes proportions gardées, de gala. « Pour la soirée, c’est évident que je cherche à avoir les films les plus ‘grand public’ possibles. »

Responsable de la programmation, Denis Blum (à droite) monte aussi sur scène pour animer les rencontres. DR

Responsable de la programmation, Denis Blum
(à droite) monte aussi sur scène pour animer
les rencontres. DR

Pour l’accès aux films, Denis Blum observe qu’il a plutôt l’embarras du choix dans son marché: « C’est vrai pour les films français, ça l’est encore plus pour les films étrangers. Mais pour les films français, se pose évidemment la question de l’équipe qui pourrait venir. Mais on n’a pas toujours le choix… Pour Ce qui nous lie, le nouveau Klaspisch, on savait qu’il ne pourrait pas être là car il est en repérages aux Etats-Unis pour son prochain tournage… » D’autres raisons peuvent encore jouer comme l’approche du Festival de Cannes et le souci des distributeurs de « bloquer » leurs films pour la Croisette. Il y aussi les distributeurs qui veulent bien que leur film aille à Gérardmer mais qui exigent que la séance ne soit pas ouverte au grand public (ce sera le cas, cette année, pour Otez-moi d’un doute de Carine Tardieu) ou, plus rarement, une séance… sans médias.

Celui qui fut, de 1989 à fin 2012, patron des Cinés Palace d’Epinal (8 salles et 1600 fauteuils) attaque, dès décembre, ses visionnements: « Je reçois beaucoup de liens mais je préfère regarder les films en DVD sur l’ écran d’une télé. Et puis, je vais aussi voir les films en salles. Les distributeurs, bien sûr, me proposent des films mais, c’est certes plus rare, je visionne aussi des films qu’on ne m’a pas proposés… Enfin, il y a aussi des films qui ne sont pas complètement achevés et qu’on a envie de montrer. C’est le cas de Marie-Francine, la nouvelle réalisation de Valérie Lemercier. Je pense que Gérardmer bénéficiera d’une des toutes premières projections devant le grand public. » Enfin, pour la programmation, 2017 est une année spéciale: « On constate une certaine frilosité des distributeurs pour la période qui va de l »élection présidentielle aux législatives. La campagne occupe beaucoup d’espace dans les médias et les distributeurs craignent un manque de visibilité pour leurs films… »

DEMANDEZ LE PROGRAMME!

ANNA.- On l’avait aperçue dans Le règne de la beauté de Denys Arcand en 2014. Ici, dans le premier long-métrage de Jacques Toulemonde Vidal, Juana Acosta a le premier rôle. Elle incarne une femme si excentrique que son ex-mari estime qu’elle ne peut plus s’occuper de Nathan, leur fils de 10 ans. Alors Anna décide de partir pour sa Colombie natale avec son petit ami et Nathan. Une occasion parfaite de découvrir une superbe comédienne. Mardi 4 avril à 14h15. Dans les salles le 5 juillet.

A VOIX HAUTE.- L’Université de Saint-Denis organise chaque année le concours « Eloquentia » pour élire « le meilleur orateur du 93 ». Des étudiants de cette université y participent et s’y préparent grâce à des professionnels (avocats, slameurs, metteurs en scène…) qui leur enseignent le difficile exercice de la prise de parole en public. A l’origine de ce concours, le réalisateur Stéphane de Freitas (qui sera présent en compagnie de l’un des participants au film, Johanne Youtchou)  montre, dans ce documentaire, des jeunes gens qui vont se révéler aux autres, et surtout à eux-mêmes. 4 avril à 16h15. Dans les salles le 12 avril.

HOMMAGE A EMMANUELLE RIVA.- C’est évidemment la séquence émotion! L’héroïne d’Hiroshima mon amour a traversé définitivement l’écran le 27 janvier dernier et Gérardmer qui aurait bien aimé l’avoir sur la scène des Rencontres, lui rend un juste hommage. L’enfant de Cheniménil fut une grande dame de l’écran comme du théâtre, notamment  couronnée par un César pour son interprétation dans Amour de Haneke. Son agent, Anne Alavrez-Correa et le cinéaste Fernand Berenguer, auteur d’un film de montage sur la comédienne, seront à Gérardmer. Mardi 4 avril à 19h.

"Sous le même toit": Julien Boisselier et Louise Bourgoin. DR

« Sous le même toit »: Julien Boisselier
et Louise Bourgoin. DR

SOUS LE MEME TOIT.- Delphine et Yvan divorcent. Las, Yvan n’a pas les moyens financiers pour se trouver un nouveau domicile. Il se souvient qu’il détient 20% de la maison de son ex-femme. Il revient alors s’installer dans ses 20%. Présent aux Rencontres avec le comédien Julien Boisselier, Dominique Farrugia, l’ancien des Nuls, signe une comédie sur une colocation forcée, également interprétée par Gilles Lellouche, Louise Bourgoin et Manu Payet… Mardi 4 avril à la suite de l’hommage à Emmanuelle Riva. Dans les salles le 19 avril.

LA COLERE D’UN HOMME PATIENT.- Le comédien espagnol Raul Arevado a mis huit années pour mener à bien ce thriller où un homme attend huit ans pour se venger d’un crime que tout le monde a oublié… Le metteur en scène a confié le rôle principal à Antonio de la Torre avec lequel il avait joué dans Les amants passagers de Pedro Almodovar. Cette histoire de vengeance  a remporté quatre Goyas, l’équivalent espagnol des César, dont celui de meilleur film. Mercredi 5 avril à 9h15. Dans les salles le 26 avril.

KOMBISSIRI.- Fondateur de l’association Yvoir, le Strasbourgeois Gérard Muller, 68 ans, atteint de cécité dans la force de l’âge, est un non-voyant hyperactif, notamment passionné de vélo. L’une de ses aventures l’a conduit au Burkina Faso. Il a découvert ce pays d’Afrique occidentale sur une suggestion du producteur-réalisateur strasbourgeois René Letzgus. A travers une épreuve cycliste, Gérard Muller va organiser l’opération en France d’un jeune Burkinabé aveugle devenu son ami. Mercredi 5 avril à 11h. Dans les salles le 4 octobre.

TUNNEL.-Alors qu’il rentre retrouver sa famille, un homme est accidentellement enseveli sous un tunnel, au volant de sa voiture. Pendant qu’une opération de sauvetage d’envergure nationale se met en place pour l’en sortir, scrutée et commentée par les médias, les politiques et les citoyens, l’homme joue sa survie avec les maigres moyens à sa disposition. Combien de temps tiendra-t-il ? Le Sud-Coréen Kim Seong-hun signe un thriller qui questionne aussi les errements de la société moderne… 5 avril à 14h30. Dans les salles le 3 mai.

SAINT-GEORGES.- Boxeur fauché et sans emploi, Jorge voit sa femme le quitter pour repartir au Brésil avec leur fils. Le Portugal étant au bord de la faillite, les sociétés de recouvrement prospèrent. Pour sauver sa famille, Jorge décide alors d’offrir ses services à l’une d’entre elles, malgré leurs méthodes d’intimidation peu scrupuleuses… Le cinéaste portugais Marco Martins, déjà auteur d’une dizaine de longs-métrages, associe le thriller et la chronique d’une société au bord de la catastrophe… 5 avril à 16h45. Dans les salles le 17 mai.

"Ce qui nous lie": Ana Girardot. DR

« Ce qui nous lie »: Ana Girardot. DR

CE QUI NOUS LIE.- On attendait le retour de Cédric Klapisch à la mise en scène depuis 2013 et Casse-tête chinois, troisième volet d’une trilogie composée aussi de L’Auberge espagnole et des Poupées russes. En compagnie des comédiens Pio Marmaï et Ana Girardot, le cinéaste a planté sa caméra dans les vignobles de Bourgogne. Parti faire le tour du monde pendant dix ans, Jean retrouve sa famille à l’heure où son père se meurt. Avec sa soeur Juliette et son frère Jérémie, il va devoir réinventer leur fraternité. Mercredi 5 avril à 19h15. Dans les salles le 14 juin.

LE CAIRE CONFIDENTIEL.-Le Caire, quelques semaines avant la révolution égyptienne de 2011. Une chanteuse de club est assassinée dans une chambre de l’hôtel Nile Hilton. Inspecteur de police corrompu, Noredin (Farès Farès, vu récemment dans La communauté) est chargé d’enquêter sur le meurtre. Petit à petit, il réalise que les coupables pourraient être liés à la garde rapprochée du Président. Il décide alors de changer de camp, prenant délibérément parti en faveur des laissés- pour-compte du régime. 6 avril à 9h15. Dans les salles le 12 juillet.

"De toutes mes forces": Khaled Alouach et Yolande Moreau. DR

« De toutes mes forces »: Khaled Alouach
et Yolande Moreau. DR

DE TOUTES MES FORCES.- Elève de première dans un grand lycée parisien, Nassim semble aussi insouciant que ses copains. Personne ne se doute qu’en réalité, il vient de perdre sa mère et rentre chaque soir dans un foyer. Malgré la bienveillance de la directrice, il refuse d’être assimilé aux jeunes de ce centre. Tel un funambule, Nassim (Khaled Alouach) navigue entre ses deux vies, qui ne doivent à aucun prix se rencontrer… Acteur dans Le fils de l’épicier, Chad Chanouga, présent aux Rencontres, signe, ici, un premier long-métrage fortement autobiographique. Jeudi 6 avril à 11h15. Dans les salles le 3 mai.

ADIEU MANDALAY.- Deux jeunes Birmans, Liangqing et Guo, émigrent clandestinement en Thaïlande. Tandis que Liangqing trouve un emploi de plonge dans un restaurant de Bangkok, Guo est embauché dans une usine textile. Sans papiers, leur quotidien est plus que précaire et le jeune couple ne partage pas les mêmes ambitions : si Guo veut gagner assez d’argent pour retourner en Birmanie, Liangqing est prête à tout pour obtenir un visa de travail et échapper à sa condition. 6 avril à 14h30. Dans les salles le 26 avril.

"Django": Reda Kateb. DR

« Django »: Reda Kateb. DR

DJANGO.- Pour son premier long-métrage, le scénariste et producteur Etienne Comar (qui sera à Gérardmer avec Reda Kateb et Cécile de France) signe le portrait d’un musicien dans la tourmente de la guerre. Car ce biopic du King of swing n’évoque qu’un épisode de la vie du célèbre guitariste de jazz, alors au sommet de son art. En 1943, sous l’occupation allemande, le tsigane auteur de Nuages, sent monter le danger et tente de passer en Suisse avec l’aide de l’une de ses admiratrices. Mais les choses sont plus compliquées que prévues… Jeudi 6 avril à 16h30. Dans les salles le 26 avril.

"A mon âge, je me cache encore...": Hiam Abbass. DR

« A mon âge, je me cache encore… »:
Hiam Abbass. DR

A MON AGE, JE ME CACHE ENCORE POUR FUMER.- Au cœur du hammam, loin du regard accusateur des hommes, mères, amantes, vierges ou exaltées islamistes, des fesses et des foulards de Dieu se confrontent, s’interpellent entre fous rires, pleurs et colères, bible et coran… avant le sifflement d’un poignard et le silence de Dieu. La cinéaste franco-algérienne Rayhana (présente aux Rencontres avec la productrice Michèle Ray-Gavras) signe un film militant dont l’origine remonte aux années 90 lorsqu’en Algérie, les femmes devinrent les ennemies n°1 des islamistes du FIS. Jeudi 6 avril à 19h30. Dans les salles le 26 avril.

ON L’APPELLE JEEG ROBOT.-Poursuivi par la police, Enzo plonge dans les eaux du Tibre et entre en contact avec une substance radioactive qui le contamine. Il possède désormais des pouvoirs surnaturels : une force et une capacité de régénération surhumaines qu’il décide de mettre au service de ses activités criminelles. Jusqu’à sa rencontre avec la fragile Alessia. Celle-ci est persuadée qu’Enzo est l’incarnation de Jeeg Robot, héros de manga japonais. Une comédie qui détourne les codes de films de super-héros. 7 avril à 9h15. Dans les salles le 3 mai.

"Otez-moi d'une doute": François Damiens et Cécile de France. DR

« Otez-moi d’une doute »: François Damiens
et Cécile de France. DR

OTEZ-MOI D’UN DOUTE.- Par hasard, Erwan (François Damiens) découvre que le vieux loup de mer qui l’a élevé n’est pas son père. Dans son enquête pour retrouver son géniteur, il croise le chemin de l’impétueuse Anna, avec laquelle le courant passe de suite. Ayant retrouvé la trace de Joseph, son père biologique, il part à la rencontre de cet octogénaire. Alors qu’il se trouve chez Joseph, la fille de ce dernier débarque. Ce n’est autre qu’Anna (Cécile de France). Erwan serait-il sur le point d’avoir un rendez-vous galant avec… sa demi-sœur ?  7 avril à 11h30 (Uniquement pour les professionnels). Dans les salles le 6 septembre.

CESSEZ-LE-FEU.- Héros de la Grande guerre fuyant son passé, Georges mène, dans les années 20, une vie nomade et aventureuse en Afrique. Il décide de rentrer en France où il retrouve sa mère et son frère Marcel, invalide de guerre muré dans le silence. Peinant à retrouver une place dans cet Après-guerre où la vie a continué sans lui, il fait la rencontre d’Hélène, professeure de langue des signes avec qui il noue une relation tourmentée… Dans son premier long-métrage, Emmanuel Courcol, présent aux Rencontres, réunit Romain Duris et Céline Sallette. Vendredi 7 avril à 14h45. Dans les salles le 19 avril.

LES INITIES.- Afrique du sud, montagnes du Cap Oriental. Comme tous les ans, Xolani, ouvrier solitaire, participe avec d’autres hommes de sa communauté aux cérémonies rituelles d’initiation d’une dizaine d’adolescents. L’un d’eux, venu de Johannesburg, découvre un secret précieusement gardé… Toute l’existence de Xolani menace alors de basculer. Le cinéaste sud-africain John Trengove signe de manière sensible une oeuvre sur le passage à l’âge adulte… 7 avril à 17h30. Dans les salles le 19 avril.

"Marie-Francine": Valérie Lemercier. DR

« Marie-Francine »: Valérie Lemercier. DR

MARIE-FRANCINE.- Valérie Lemercier fait la clôture de l’édition 2017 et on l’attend, pétulante, sur la scène du casino comme sur l’écran où elle est une femme de 50 ans contrainte, pour cause de couple et de boulot perdus, de retourner vivre chez ses parents. Qui lui ouvrent un petit commerce de cigarettes électroniques. Marie-Francine va y rencontrer un homme qui n’ose pas lui avouer qu’il vit… chez ses parents. La cinquième réalisation de Valérie Lemercier qui n’avait plus signé de mise en scène depuis 100% cachemire en 2013. Vendredi 7 avril à 19h30. Dans les salles le 31 mai.

Sitôt les Rencontres achevées, Gérardmer accueille, le dimanche 9 avril, sa traditionnelle fête des jonquilles. Mais ceci est une autre histoire.

EN PRATIQUE

Toutes les projections ouvertes au public ont lieu au cinéma du Casino JOA de Gérardmer.
Tarifs: 6 € la séance, 15 € le Pass journée (valable mardi, mercredi, jeudi ou vendredi), 38 € le Pass Rencontres (valable du mardi au vendredi inclus).

Où réserver? Office du tourisme intercommunal des Hautes-Vosges 4, place des Déportes à 88400 Gérardmer. Téléphone: 03.29.27.27.27. Mail: info@gerardmer.net
A partir du 4 avril (11-12h et à partir de 13h30) au cinéma du Casino JOA (hall d’accueil de la salle de cinéma).

Renseignements: www.rencontres-du-cinema.com

 

Laisser une réponse