Valérian, Laureline, héros d’un space-opera atone

Valerian (Dane DeHaan) au Glam Club. DR

Valerian (Dane DeHaan) au Glam Club. DR

Luc Besson est un homme heureux. Pas encore parce que son nouvel opus cartonne sur les écrans français. Cela, on le saura un peu plus tard… Mais parce qu’en tant qu’artiste, il a le bonheur de pouvoir mener à bien des projets qui lui tiennent à coeur. Si on a bien compris, Valérian est un rêve d’enfant. Le héros de Christin et Mézières (avec lequel Besson avait déjà travaillé sur Le cinquième élément) a donc bercé, dans les pages du magazine Pilote, au cours des années 70, les jeunes années du petit Luc. Et quand on dit le héros, il faut évidemment dire les héros. Car, comme d’autres certainement en même temps que lui, le gamin de 10 ans est tombé amoureux du sergent Laureline, une belle dure-à-cuire. Les exégètes de l’oeuvre bessonienne observent d’ailleurs que Laureline est la matrice des héroïnes de Besson. Qu’il s’agisse de Nikita, de Leeloo (Le cinquième élément) ou de la Lucy incarnée par Scarlett Johansson…

Et voilà donc que le môme devenu grand mais qui semble avoir gardé ses émerveillements de jeunesse, met en scène ce Valérian et la cité des mille planètes qui se présente déjà, avec un budget de quelque 197 millions d’euros, comme la production la plus chère de tous les temps dans le cinéma français. Soyons honnêtes, l’argent dépensé par Besson se voit sur l’écran. C’est déjà ça. Et si on veut s’en tenir aux chiffres, on est vite dans la surenchère: plus de 6000 dessins pour le storyboard, 2547 plans avec effets visuels, 2206 personnes impliquées dans le tournage (dont 115 acteurs et 552 figurants), 100 jours de tournage sur sept plateaux de la Cité du cinéma, 200 espèces d’aliens et de créatures créées pour le film. On en passe…

Alpha, une cité menacée par une force obscure. DR

Alpha, une cité menacée par une force obscure. DR

Sur une plage idyllique et sous une lumière radieuse, des personnages androgynes, nacrés et filiformes à la langue incompréhensible mais gazouillante vivent en parfaite harmonie avec la nature. Mais soudain, le ciel s’obscurcit. D’immenses engins spatiaux s’abattent de toutes parts. Pour les Pearls de la planète Mül, c’est le début de la fin. Et c’est là que le major Valérian se réveille… Cauchemar? Mauvais rêve? Vision prémonitoire?

C’est alors le moment de faire la connaissance de Valérian et de Laureline. Tous deux font partie des agents d’élite du SST, le Service spatio-temporel chargé de maintenir l’ordre terrien dans l’univers. Pour être des fonctionnaires du gouvernement, ces deux-là ne se comportent pas moins comme des gamins. Véritable cavaleur, Valérian considère cependant Laureline comme la femme de sa vie et va enfin lui demander de l’épouser. Pour cela, estime Laureline, il faudra d’abord que son soupirant purge sa play-list de conquêtes. Mais, avant de convoler, ils devront affronter bien des dangers et partir en mission sur l’extraordinaire cité intergalactique Alpha, une métropole en constante expansion où des espèces venues de l’univers tout entier ont convergé au fil des siècles pour partager leurs connaissances, leur savoir-faire et leur culture. Mais un mystère se cache au coeur d’Alpha, une force obscure qui menace l’existence paisible de la Cité des Mille Planètes.

Dans les profondeurs de la mer de Galata. DR

Dans les profondeurs de la mer de Galata. DR

C’est lorsque Besson, invité sur le plateau d’Avatar (2009) par James Cameron, a découvert l’arsenal des nouvelles technologies au service de la science-fiction, qu’il a compris qu’il pourrait enfin réaliser un rêve de cinéma qui s’appuie sur la série de bandes dessinées imaginées par Pierre Christin et Jean-Claude Mézières (c’est précisément l’album Les ambassadeurs des Ombres qui sert de base au film) et publiées pour la première fois en 1967. C’était il y a cinquante ans!

C’est donc avec une réelle curiosité qu’on est allé se promener sur Alpha… Et la première sortie du côté du gigantesque Big Market, où il s’agit de retrouver un très précieux transmutteur (en l’occurrence, une mignonne bestiole orange bourrée d’énergie), ne manque pas de charme, ni d’efficacité. Bientôt, il faudra à Valérian batailler ferme dans le bazar pour sauver sa peau. « On est censés faire quoi? » demande Valerian. « Courir! » ordonne Laureline. Le problème, c’est qu’assez rapidement, on va se lasser de la répétition des séquences qui s’enchaînent tandis que les deux policiers du 28e siècle tentent de débrouiller une enquête qui se dérobe sous l’emprise de félons de haut niveau… Bien sûr, Bob le pirate (Alain Chabat) est marrant dans sa pêche en eaux profondes à la recherche d’une méduse capable de raviver les souvenirs et Besson s’est fendu d’une longue séquence où, du côté de Paradise Alley, Valerian fond devant Bubble, la danseuse vedette du Glam Club (la chanteuse Rihanna). Championne de pole dance, la belle lui offre un catalogue de la séduction, tour à tour en meneuse de revue façon Cabaret, en écolière, en infirmière, en catwoman ou en blond avatar marilyien. Mais Bubble (sous les masques, elle est une visqueuse créature) est aussi bonne fille. A Valérian, elle conseille de montrer ses fragilités afin de conquérir Laureline…

Valerian (Dane DeHaan) et Laureline (Cara Delevingne). DR

Valerian (Dane DeHaan) et Laureline (Cara Delevingne). DR

Si Besson s’applique à se concentrer sur l’action et évite de se faire plaisir en montrant combien ses aliens sont réussis, son space-opera nous laisse quand même, in fine, sur notre faim. Il y a de l’humour, des références (on songe parfois à Star Wars, à Ghost in a Shell ou à Blade Runner avec le clin d’oeil au « replicant » Rutger Hauer), des répliques (« Faites la paix avec votre passé ou vous n’aurez pas d’avenir » et l’incontournable « T’as de beaux yeux, tu sais »), des amis de Besson venus faire coucou (les réalisateurs Xavier Giannoli, Louis Leterrier, Eric Rochant, Gérard Krawczyk, Mathieu Kassovitz, Benoît Jacquot), un couple de jeunes stars, Dane DeHaan, vu naguère dans A Cure for Life et la mannequin britannique aux yeux cernés Cara Delevingne qui obtient, avec Laureline, son plus gros rôle au cinéma… Mais, au total, l’ensemble, malgré les moyens imposants mis en oeuvre, n’arrive pas à nous enthousiasmer. Dommage.

VALERIAN ET LA CITE DES MILLE PLANETES Science-fiction (France – 2h17) de Luc Besson avec Cara Delevingne, Dane DeHaan, Clive Owen, Rihanna, Ethian Hawke, Herbie Hancock, Kris Wu, Sam Spruell, Alain Chabat, Rutger Hauer, Peter Hudson, Ola Rapace. Dans les salles le 26 juillet.

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