RESNAIS, KALATOZOV, FORMAN, UN NEZ ET UN SOLDAT NIPPON

MURIEL OU LE TEMPS D’UN RETOUR
MurielDeux ans après L’année dernière à Marienbad qui la révéla au grand public, Alain Resnais retrouve, en 1963, Delphine Seyrig pour une évocation du traumatisme de la guerre d’Algérie avec, en filigrane, la torture. En septembre 1962, Hélène, antiquaire à domicile, vit avec son beau-fils, Bernard revenu de son service militaire en Algérie. Elle invite son vieil ami Alphonse (qui fut son amour de jeunesse) et sa nièce à venir chez eux à Boulogne-sur-Mer. Cette irruption, en faisant remonter les souvenirs du passé, rouvrira de profondes cicatrices… Grand film sur le sentiment amoureux, Muriel, dans une belle version restaurée et inédite en Blu-ray, est un portrait des transformations sociales de la France du début des années soixante. Dans les suppléments, une évocation de Delphine Seyrig (qui sera couronnée meilleure actrice à la Mostra de Venise) à l’heure de Muriel. (Potemkine)
SOY CUBA
Soy CubaRévélé à l’international par la Palme d’or 1958 attribué à l’admirable Quand passent les cigognes, le cinéaste russe Mikhaïl Kalatozov (1903-1973) tourne en 1963 à Cuba son avant-dernier film, une oeuvre militant pour la révolution cubaine. A travers quatre histoires distinctes sur l’idéal communiste face à la mainmise du capitalisme, on observe la lente évolution de Cuba du régime de Batista jusqu’à la révolution castriste. Tournée dans un noir et blanc lumineux, cette vaste fresque (qui fut mal accueillie aussi bien à Moscou qu’à La Havane) se distingue par sa virtuosité technique, notamment par ses grands plans-séquences signés Serge Ouroussevski, déjà chef-opérateur de Quand passent… Une écriture lyrique et baroque pour une ode à Cuba enrichie de multiples bonus. (Potemkine)
MILOS FORMAN – 4 ŒUVRES DE JEUNESSE
Forman JeunesseAu sortir de l’Ecole de cinéma de Prague, Milos Forman (1932-2018) tourne, en 1963, L’audition (45 mn) autour d’un casting de jeunes chanteuses qui cherchent à intégrer un groupe yéyé. A la suite, il réalise L’as de pique sur les premières expériences amoureuses d’un adolescent timide qui le fait immédiatement connaître au-delà des frontières de son pays. Il poursuit avec Les amours d’une blonde (1965) sur l’idylle éphémère d’Andula et d’un pianiste et Au feu les pompiers (1967), puissante satire de la bureaucratie qui sera sélectionné pour Cannes. Mais la répression du Printemps de Prague, en 1968, oblige Forman à fuir son pays. Restent quatre œuvres de jeunesse dans un beau coffret qui attestent du goût de Forman pour la critique sociale et un cinéma dont le ton tranche fortement avec l’académisme des productions communistes de l’époque. (Carlotta)
LES PARFUMS
Les ParfumsCélébrité dans le monde du parfum, Anne Walberg vit en diva égoïste et asociale dans la haute société parisienne. Mais celle qui a créé des fragrances et prêté son talent à diverses sociétés de renom, cache un secret. Un jour, elle embauche Guillaume, un nouveau chauffeur. Il est le seul qui n’a pas peur de lui tenir tête. Pour son second long-métrage, Grégory Magne réussit une comédie agréable et intelligente qui touche juste en évitant sentimentalisme ou mièvrerie. Emmanuelle Devos, parfaite dans le registre méprisant et Grégory Montel composent un duo mal assorti mais qui va doucement se découvrir et s’apprécier. Un divertissement certes prévisible mais tout en finesse et en élégance. (Pyramide)
LA CONDITION DE L’HOMME
Condition HommeCombattant dans les forces japonaises pendant la Seconde Guerre mondiale, le cinéaste Masaki Kobayashi (1916-1996) va évoquer les horreurs de la guerre dans une trilogie, sortie entre 1959 et 1961, qui constitue, avec ses 9h30 de film, l’une des plus longues fresques jamais réalisées au cinéma. Cinéaste perfectionniste, Kobayashi raconte la vie de Kaji, jeune intellectuel nippon pacifiste (interprété par Tatsuya Nakadai) qui tente de survivre à l’époque du Japon fasciste et impérialiste. Il n’y a pas de plus grand amourLe chemin de l’éternité et La prière du soldat constituent les trois volets de cette œuvre monumentale (inédite en Blu-ray) présentée dans un beau coffret (accompagné d’un livret sur la forme historique, thématique et picturale de l’œuvre) qui propose une exploration de ce qu’il y a de plus sombre dans l’homme… (Carlotta)
BROOKLYN SECRET
Brooklyn SecretAide à domicile auprès d’Olga, une vieille dame russe, Olivia est fragilisée par sa situation d’immigrante philippine. Elle paie secrètement un Américain pour organiser un mariage blanc. Lorsque celui-ci se rétracte, elle croise Alex, le petit fils d’Olga, avec qui elle ose enfin vivre une véritable histoire d’amour… Avec ce troisième long-métrage réalisé juste après sa transition, Isabel Sandoval (qui incarne Olivia) développe un thème récurrent : le féminin, le désir et la manière conflictuelle dont les personnages s’y confrontent. Dans le quartier de Brighton Beach au sud de Brooklyn, un décor qui renforce la dimension mélancolique du propos, voici une chronique touchante et grave autour de la figure centrale d’une immigrante transgenre vulnérable. Où il est question d’amour, de survie et de croyance dans le… rêve américain. (JHR Films)
THE CROWN – SAISON 3
The Crown S3On attendait avec impatience le retour des pensionnaires de Buckingham. C’est chose faite dans une saison n°3 de The Crown où, après Claire Foy dans les deux premières saisons, Elisabeth II a pris les traits de l’excellente Olivia Colman. On se plonge donc dans une suite de dix épisodes où l’on voit le Royaume s’enfoncer dans la crise économique et financière alors que l’antiroyaliste Harold Wilson occupe le 10, Downing Street… Si l’épisode consacré aux premiers pas de l’homme sur la lune donne à voir l’ennui profond que vit le duc d’Edimbourg, celui sur la catastrophe minière d’Aberfan (1966) permet d’explorer la psychologie de la reine alors que l’on suit aussi la récurrente rivalité entre Elisabeth et sa sœur Margaret (Helena Bonham Carter), tour à tour festive et dépressive… Indiscutablement, le plaisir est toujours là. (Sony)
J’IRAI DECROCHER LA LUNE
J'irai decrocher la lune« J’ai le droit d’avoir une vie comme les autres ! » Quand on a la trentaine, être indépendant semble tout à fait normal. Mais quand on a un chromosome en plus, ce n’est pas une évidence. Dans ce documentaire riche et sensible, Laurent Boileau suit Stéphanie, Robin, Elise, Gilles-Emmanuel et les autres dans leur rêve d’une vie ordinaire au quotidien. A travers leurs témoignages sincères et sans complaisance, le documentariste raconte leur volonté et leur capacité à s’insérer dans la société et sur le marché du travail. Autour d’un regard sur le trisomie 21, une réflexion forte et clairvoyante sur notre rapport à la différence. (L’Atelier d’images)
UN CŒUR EN HIVER
Un Coeur HiverHomme actif mais sans états d’âme, Maxime, marchand de violons, travaille avec Stéphane dans un atelier de lutherie, Stéphane, luthier de son état, vit dans un hiver du cœur dont on discerne mal les raisons… Lorsque Maxime tombe amoureux de Camille Kessler, une jeune violoniste, une dangereuse relation de séduction s’installe dans le trio. Si Claude Sautet (1924-2000) semble un peu oublié aujourd’hui, l’occasion est belle, avec cet inédit en Blu-ray, de découvrir l’un des films les plus aboutis de ce cinéaste qui alliait musicalité, sensualité et conte moral. En 1992, l’avant-dernier film de Sautet plongeait dans la vie intérieure de personnages brillamment incarnés par Daniel Auteuil, Emmanuelle Béart et André Dussollier. (Studiocanal)
LES RESCAPES DU FUTUR
Rescapes FuturFermé à cause de ses robots devenus incontrôlables et meurtriers, le parc Delos a rouvert ses portes en jouant à fond la carte de la sécurité. On y retrouve toujours les mondes romain et médiéval mais aussi une nouveauté, le monde du futur, animé par des robots toujours plus perfectionnés. Le parc doit être inauguré par les grands de ce monde sous le regard de la presse… Mais deux reporters s’inquiètent car ils constatent que même les employés sont des machines. Suite de Mondwest (1973), ce techno-thriller (inédit en Blu-ray), avec Yul Brynner, Peter Fonda et Blythe Danne, tourné en 1976 par Richard T. Heffron, joue, avec efficacité, la carte de la paranoïa aiguë autour d’une immense conspiration pour donner le pouvoir aux machines… (Sidonis Calysta)
LE CHEVALIER DU CHATEAU MAUDIT
Chevalier Chateau MauditDans l’Italie du 14e siècle, Ugone dit le Bâtard a fait emprisonner le brave duc Olivero, pour s’emparer du duché de Valgrado. Face à la grogne des paysans frappés par les taxes, il veut consolider son pouvoir en épousant la jeune Isabella, fille du duc. Mais un mystérieux chevalier noir ne l’entend pas de cette oreille. Entre amours et intrigues, embuscades, duels et chevauchées, l’Italien Mario Costa (1904-1995) tourne, en 1959, cette épopée de chevalerie où un insaisissable justicier dame constamment le pion à l’usurpateur. Dans le rôle de la « méchante » Fiamma, on reconnaît la Française Irène Tunc qui fut Miss France en 1954.  (Artus)
TOUT SIMPLEMENT NOIR
Tout Simplement Noir« Je suis en colère ! » Parce que l’homme noir n’a pas une vraie place dans la société française, JP, acteur raté de 38 ans, songe à organiser la première grosse marche de contestation noire en France. Pour cela, il lui faut des soutiens, beaucoup de soutiens… Mais, entre ceux qui ne comprennent pas son engagement, ceux qui le prennent pour un activiste et les autres qui le considèrent comme un opportuniste, tracer sa route est malaisé. Candide voltairien qui révèle, sans le vouloir, les failles de ses interlocuteurs leaders d’opinion, Jean-Pascal Zadi se met en scène dans ce faux documentaire (mais vraie comédie) traversé par de multiples guests comme Claudia Tagbo, Eric Judor, Matthieu Kassovitz, Jonathan Cohen etc. Tout cela fonctionne avec plus ou moins de bonheur dans une succession de saynètes dont certaines sont absolument hilarantes. Un ovni loufoque sur la cause de l’homme noir. (Gaumont)

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